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27/04/2017 | FRANCE | N°15BX01405

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 27 avril 2017, 15BX01405


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) l'Anse des Pins a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2011 par lequel le maire de Saint-Georges d'Oléron a rejeté sa demande de permis de construire ainsi que la décision du 1er mars 2012 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1201077 du 26 février 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés

le 23 avril 2015 et le 27 avril 2016, la SARL l'Anse des Pins, représentée par MeB..., demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) l'Anse des Pins a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2011 par lequel le maire de Saint-Georges d'Oléron a rejeté sa demande de permis de construire ainsi que la décision du 1er mars 2012 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1201077 du 26 février 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 23 avril 2015 et le 27 avril 2016, la SARL l'Anse des Pins, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 26 février 2015 ;

2°) d'annuler le refus de permis de construire et la décision rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Georges d'Oléron la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que les modifications projetées dans la demande de permis de construire étaient substantielles par rapport au projet qui avait été autorisé le 1er juillet 2008 ;

- ainsi, le motif qui fonde le refus litigieux, tiré du non respect de la distance de 10 mètres entre le projet de construction et l'alignement de la voie communale, ne pouvait être opposé dès lors que la nouvelle demande de permis se bornait, sur ce point, à décaler de 3,35 mètres seulement l'implantation du bâtiment ;

- ce décalage qui ne concerne que 3,35 mètres de distance alors que la longueur totale du bâtiment est de 32,20 mètres justifiait l'application au bénéfice du projet d'une adaptation mineure à la règle du plan local d'urbanisme en application de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme ;

- c'est donc à tort également que le tribunal administratif a jugé que le projet ne pouvait bénéficier d'une telle adaptation mineure ;

- celle-ci, en outre, était justifiée par des contraintes techniques tirées de l'accessibilité du bâtiment aux personnes handicapées et de la sécurité ;

- l'article Nt1 6 du plan local d'urbanisme, qui énonce la règle de distance de 10 mètres entre le projet de construction et l'alignement de la voie communale, est illégal dès lors qu'il double la distance d'éloignement par rapport au règlement national d'urbanisme en vigueur lors du précédent permis et qu'il ne prévoit pas d'adaptation à la règle ainsi posée ;

- une note rédigée par un architecte démontre que la règle de l'article Nt1 6 n'est justifiée par aucune nécessité particulière ;

- cette règle est d'autant moins justifiée qu'elle s'applique à un terrain qui est proche de parcelles situées en zone NC pour lesquelles la règle de distance d'implantation par rapport à l'alignement des voies communales est de cinq mètres seulement.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 mars 2016, la commune de Saint-Georges d'Oléron, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société requérante la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de permis déposée en 2011 modifiaient en de nombreux points le projet autorisé en 2008 dont la conception générale n'était ainsi plus la même ; un tel projet devait donc être traité dans le cadre d'une nouvelle demande de permis de construire soumise aux dispositions d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle l'autorité compétente rend sa décision ;

- ainsi, le maire pouvait sans commettre d'erreur de droit se fonder sur l'article Nt1 6 du plan local d'urbanisme pour refuser le permis de construire sollicité ;

- en vertu de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme, les adaptations mineures aux règles du plan local d'urbanisme doivent être justifiées au regard de la nature du sol, de la configuration des parcelles ou des caractéristiques des constructions avoisinantes ; aucune des considérations invoquées par la société requérantes ne relève de ces considérations ; en outre, son bâtiment est implanté à 5 mètres et à 5,17 mètres de l'alignement et ne peut en conséquence bénéficier d'une adaptation mineure eu égard à la règle de distances des 10 mètres applicable ;

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'article Nt 1 6 du plan local d'urbanisme doit être écarté dès lors que la règle édictée s'applique dans une zone naturelle, où peu de constructions sont autorisées, qu'il convient de préserver conformément au parti d'aménagement exposé dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme ; ainsi, l'implantation d'un bâtiment massif, comme c'est le cas en l'espèce, porte atteinte au caractère de la zone ;

- le terrain d'assiette du projet est entouré de parcelles situées en zones Nr et Nt pour lesquels s'applique également la règle d'éloignement des 10 mètres.

Par ordonnance du 10 mai 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 7 juin 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant de la SARL l'Anse des Pins, et de Me A..., représentant de la commune Saint-Georges d'Oléron.

Considérant ce qui suit :

1. La société l'Anse des Pins exploite un terrain de camping situé au n° 397 chemin du Rateau sur le territoire de la commune de Saint-Georges d'Oléron. Le 1er juillet 2008, le maire de cette commune lui a délivré un permis de construire un bâtiment comprenant un bar, une épicerie et une salle polyvalente en lieu et place d'une construction vétuste à démolir. Toutefois, le 30 juin 2011, le maire a dressé un procès-verbal constatant que les travaux entrepris n'étaient pas conformes à ceux autorisés par le permis de construire en ce qui concerne l'implantation du nouveau bâtiment, sa hauteur, ses façades et son aspect. La société l'Anse des Pins a déposé, le 15 septembre 2011, une nouvelle demande de permis prévoyant la démolition de l'existant et la construction d'un nouveau bâtiment composé d'un bar, d'une épicerie, d'une salle polyvalente et prévoyant un réaménagement des espaces extérieurs. Le 26 octobre 2011, le maire de Saint-Georges d'Oléron a pris un arrêté de refus de permis La société l'Anse des Pins a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler ce refus ainsi que la décision par laquelle le maire de Saint-Georges d'Oléron a rejeté son recours gracieux. Elle relève appel du jugement rendu le 26 février 2015 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité du motif de refus de permis de construire :

2. Dans le cas où un immeuble est édifié en violation des prescriptions du permis de construire, un permis modificatif portant sur des éléments indissociables de cet immeuble ne peut être légalement accordé que s'il a pour objet de permettre la régularisation de l'ensemble du bâtiment.

3. Pour refuser le permis de construire demandé, le maire de Saint-Georges d'Oléron a relevé que le bâtiment projeté était implanté à moins de 10 mètres de l'alignement de la voie communale en méconnaissance de l'article Nt 1 6 du plan local d'urbanisme, approuvé le 30 avril 2009, aux termes duquel : " Les constructions doivent s'implanter à une distance de l'alignement des voies communales au moins égale à dix mètres ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'au 1er juillet 2008, date à laquelle la société a obtenu un premier permis de construire, les constructions devaient être implantées à cinq mètres de distance de l'alignement des voies communales en vertu du règlement national d'urbanisme alors applicable. La société requérante soutient que son nouveau projet prévoit seulement de décaler de quelques mètres vers l'ouest le bâtiment autorisé en 2008 sans modifier l'implantation du bâtiment initial par rapport à l'alignement de la voie communale. Elle en déduit que sa demande ne porte pas une atteinte supplémentaire à l'article Nt1 6 précité du plan local d'urbanisme, entré en vigueur postérieurement au permis délivré le 1er juillet 2008, et qu'en conséquence ledit article ne peut fonder le refus de permis de construire contesté.

5. En principe, la légalité d'un permis de construire modificatif s'apprécie en fonction des considérations de droit existantes à la date de son édiction. Toutefois, les droits que le pétitionnaire tient d'un permis de construire initial devenu définitif font obstacle à ce que lui soient opposées, pour lui refuser un permis de construire modificatif des dispositions d'urbanisme auxquelles ce permis modificatif ne porte aucune atteinte supplémentaire. Cependant, seules des modifications apportées au projet de construction qui sont sans influence sur la conception générale du projet initial peuvent faire l'objet d'un tel permis modificatif et ne nécessitent pas l'octroi d'un nouveau permis.

6. Il ressort des pièces du dossier que le bâtiment décrit dans la nouvelle demande déposée le 15 septembre 2011 diffère en de nombreux points de celui concerné par le permis de construire du 1er juillet 2008. Ainsi, comparativement au bâtiment autorisé initialement, la nouvelle construction doit être implantée avec un décalage vers l'ouest de 3,35 mètres, présente une emprise au sol inférieure de 25 m2 et une hauteur de 4,82 mètres contre 5,45 mètres précédemment. De plus, et surtout, le nouveau projet prévoit le remplacement de la toiture initiale qui était composée de quatre pans couverts en tuiles de pays par une toiture à deux pans présentant un ton noir. Il utilise également une maçonnerie avec un enduit blanc et des menuiseries aluminium laqué bleu alors que le précédent projet présentait un bardage en bois et comportait des parements en pierres naturelles ainsi que des menuiseries au ton gris. Enfin, des modifications ont été apportées sur les façades du bâtiment en ce qui concerne le nombre et l'emplacement des ouvertures qu'elles comportent.

7. Ainsi, et comme l'a jugé à juste titre le tribunal administratif, ces modifications, prises dans leur ensemble, changent la conception générale du projet qui avait fait l'objet du premier permis de construire délivré le 1er juillet 2008. Dans ces conditions, les nouveaux travaux projetés nécessitent la délivrance, non pas d'un simple permis de construire modificatif, mais d'un nouveau permis de construire soumis aux dispositions du plan local d'urbanisme de la commune approuvé le 30 avril 2009 et en particulier à celles de l'article Nt 1 6 précitées de ce plan. Le maire de Saint-Georges d'Oléron n'a donc pas commis d'erreur de droit en appréciant la légalité de l'ensemble du nouveau projet au regard des exigences de l'article Nt1 6 du plan local d'urbanisme. Il ressort ensuite des pièces composant la demande de permis, et notamment de son plan de masse, que la construction projetée doit être implantée à 5 mètres et à 5,17 mètres de distance de l'alignement de la voie communale, constituée par le chemin de Rateau, en méconnaissance de l'article Nt1 6 du plan local d'urbanisme. Par suite, le motif qui fonde le refus de permis de construire contesté n'est pas entaché d'illégalité.

En ce qui concerne l'existence d'une adaptation mineure :

8. Aux termes de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation, à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes. ".

9. La société requérante ne peut utilement soutenir qu'elle était en droit d'obtenir le permis demandé au moyen d'une adaptation mineure dès lors qu'il convient, selon elle, d'apprécier le non respect de l'article Nt1 6 du plan local d'urbanisme au regard de la seule distance de 3,35 mètres correspondant au décalage côté ouest de la construction. En effet, comme il a été dit précédemment, sa seconde demande de permis porte sur un nouveau projet dont l'intégralité du linéaire est de ce fait soumise à la règle d'implantation des 10 mètres de l'article Nt1 6. Dès lors que le nouveau bâtiment projeté est situé à 5 mètres et à 5,17 mètres par rapport à l'alignement de la voie communale, une telle distance ne saurait être permise à titre d'adaptation mineure à la règle énoncée à l'article Nt1 6 du plan local d'urbanisme en vertu de laquelle les constructions doivent être implantées à 10 mètres de cet alignement. Au surplus, la requérante ne démontre pas que l'adaptation mineure qu'elle sollicite serait justifiée par des considérations tirées de la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes. Par suite, le moyen soulevé doit être écarté.

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'article Nt1 6 du plan local d'urbanisme :

10. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir sur le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer, en conséquence, notamment les règles de distance par rapport aux voies publiques propre à chaque secteur. Leur appréciation s'effectue en tenant compte non seulement de la situation existante, mais aussi de ses perspectives d'évolution et des formes urbaines les mieux adaptées à son devenir. Ladite appréciation ne peut, sur ces différents points, être censurée par le juge administratif que dans le cas où elle se révèle entachée d'une erreur manifeste ou s'appuie sur des faits matériellement inexacts.

11. Le terrain d'assiette de la construction projetée est située en zone Nt1 que le préambule du règlement du plan local d'urbanisme définit comme recouvrant " les espaces naturels occupés par des campings-caravanings (...) Il s'agit de zones destinées à redevenir espaces naturels lorsque cesse l'activité (...) ". Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme précise que " la zone N dite naturelle délimite des secteurs de nature très variée qui sont protégés du fait de la qualité de leurs sites, milieux naturels ou paysages, (de) l'intérêt esthétique, historique ou écologique, des cônes de visibilité importants à préserver notamment depuis les axes de communication (du) caractère d'espace naturel ". Ce document indique de plus que le secteur Nt1 concerne " des zones occupées de façon temporaire mais qui doivent conserver un aspect naturel une partie de l'année ".

12. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du document graphique du plan local d'urbanisme, que la zone Nt1 est contiguë ou proche de zones Nr et Nt3 soumises à la même règle d'implantation des constructions par rapport à l'alignement que celle énoncée à l'article Nt1 6. Il en résulte, comme l'a relevé à bon droit le tribunal administratif, que cette règle est appliquée de manière homogène dans le secteur considéré quand bien même le terrain d'assiette du projet serait aussi contigu à des zones Ucp dans lesquels la distance d'implantation est de 5 mètres seulement en raison du fait qu'elles présentent, pour leur part, un caractère plus urbanisé. Par ailleurs, la règle contestée vise, en conformité avec les objectifs poursuivis par les auteurs du plan local d'urbanisme, à conserver les caractéristiques des espaces naturels existants et, notamment, à y préserver des cônes de visibilité depuis les axes de communication. En produisant seulement une note d'un architecte critiquant ce parti d'aménagement, la société l'Anse des Pins ne démontre pas, compte tenu des considérations qui précèdent, que les auteurs du plan local d'urbanisme auraient commis une erreur manifeste d'appréciation en instituant en zone Nt1 la règle d'implantation des dix mètres sans possibilité d'adaptation.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la société l'Anse des Pins n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. En revanche, il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à sa charge de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Saint-Georges d'Oléron et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : La requête de la société l'Anse des Pins est rejetée.

Article 2 : La société l'Anse des Pins versera à la commune de Saint-Georges d'Oléron la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL l'Anse des Pins et à la commune Saint-Georges d'Oléron.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. Didier Péano, président,

Mme Christine Mège, président-assesseur,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 avril 2017.

Le rapporteur,

Frédéric Faïck

Le président,

Didier Péano Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime de en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

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N° 15BX01405


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