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11/04/2017 | FRANCE | N°16BX03930

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 11 avril 2017, 16BX03930


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 18 mars 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivré un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602101 du 21 septembre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2016, MmeC...,

représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 18 mars 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivré un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602101 du 21 septembre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2016, MmeC..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Laurent Pouget a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., de nationalité algérienne, est entrée régulièrement en France le 29 avril 2014 sous couvert d'un visa de court séjour. Elle a bénéficié d'autorisations provisoires de séjour successives en tant qu'étranger malade, valables en dernier lieu jusqu'au 15 décembre 2015. Elle a demandé le 25 septembre 2015 la délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'étranger malade sur le fondement de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé. Par un arrêté du 30 juin 2016, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C...relève appel du jugement du 21 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté son recours dirigé contre cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut pas avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans son pays d'origine. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause en Algérie. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut pas en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C...a été atteinte d'un cancer du sein droit pour lequel elle a été opérée en 2011 en Algérie et à la suite duquel elle a suivi une chimiothérapie et une radiothérapie. Elle a été traitée en France à compter d'avril 2014 pour un syndrome douloureux post-mastectomie dont les répercussions psychologiques sont sérieuses, associé à un lymphoedème important et à une douleur neuropathique au niveau du bras droit. Afin de soulager ces douleurs, elle a bénéficié en France, en novembre 2015, de la pose d'un bloc para-vertébral, permettant une anesthésie loco-régionale. Par un avis du 7 janvier 2016, le médecin inspecteur de santé publique a considéré que l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine pour sa prise en charge médicale. A l'appui de sa contestation de cet avis, la requérante produit divers certificats médicaux attestant des traitements qui lui ont été administrés et du suivi thérapeutique dont elle a bénéficié en France, tant en ce qui concerne les suites de son cancer que son état psychologique, mais aucun de ces certificats ne comporte de mentions de nature à remettre en cause l'analyse du médecin inspecteur quant à la disponibilité de traitements appropriés en Algérie pour ces deux types de pathologies. Il ne ressort notamment d'aucun des certificats fournis que les traitements suivis en France par Mme C...pour atténuer les séquelles de sa mastectomie et notamment la technique du bloc para-vertébral thoracique, à supposer qu'elle puisse être regardée comme correspondant à la mise en oeuvre d'une thérapie innovante, ne serait pas disponible dans son pays d'origine, lequel dispose d'établissements ou services spécialisés en oncologie et radiothérapie. Une telle indisponibilité ne saurait, en particulier, être établie par une attestation rédigée par un médecin du centre hospitalier de la ville de Magnhia, faisant état de ce que la technique pratiquée en France pour la prise en charge du lymphoedème de l'intéressée n'a pas cours dans cet établissement. Si enfin Mme C...fait valoir qu'elle est désormais suivie pour un cancer du sein gauche et que son état de santé ne s'est pas amélioré depuis les précédents avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, il est constant que ce dernier, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'aurait pas pris en considération ces évolutions, a lui-même reconnu la gravité de l'état de santé actuel de l'intéressée et les risques d'un défaut de prise en charge, et aucun élément du dossier ne démontre que la requérante ne pourrait pour autant poursuivre en Algérie les traitements par chimiothérapie et radiothérapie qu'elle a entamés en France pour soigner ce second cancer. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde a pu légalement refuser de délivrer à Mme C...une autorisation provisoire de séjour pour motif de santé, sur le fondement des stipulations du point 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

5. Si Mme C...se prévaut de ce qu'elle bénéficie en France du soutien matériel et psychologique de sa soeur et de son beau-frère, elle n'allègue pas, en dépit du décès de sa mère, être dépourvue d'attaches familiales en Algérie, où réside à tout le moins son père et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans. Dès lors que, ainsi qu'il a été dit, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ne pourrait y recevoir de soins appropriés à son état de santé, et alors même qu'elle a suivi depuis son arrivée en France des formations professionnelles et des stages, le préfet de la Gironde n'a pas entaché son arrêté du 18 juin 2016 d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressée.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Il résulte de ce qui précède que la décision refusant de délivrer un titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de cette décision doit être écarté.

7. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ". Ainsi qu'il a été dit au point 4, Mme C...pourra disposer en Algérie de traitements appropriés au traitement des pathologies dont elle souffre. En conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. Pour les motifs exposés aux points 5, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation d'ensemble de Mme C...doit être également écarté.

En ce qui concerne le pays de renvoi :

9. Mme C...fait valoir qu'elle encourrait de graves risques pour sa vie en cas de retour en Algérie, dès lors qu'elle ne pourrait y bénéficier des traitements appropriés à son état de santé, et en tire que la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, compte tenu de ce qui a été exposé précédemment, le moyen doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

11. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont MmeC..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

5

N° 16BX03930


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03930
Date de la décision : 11/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP ASTIE-BARAKE-POULET-MEYNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-04-11;16bx03930 ?
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