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16/03/2017 | FRANCE | N°15BX00679

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 16 mars 2017, 15BX00679


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 24 octobre 2014 par laquelle l'ordonnateur du GRETA Garonne lui a notifié son licenciement.

Par une ordonnance n° 1405719 du 2 février 2015, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 mars 2015 et 14 mars 2016, M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler

cette ordonnance de la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse du 2 févri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 24 octobre 2014 par laquelle l'ordonnateur du GRETA Garonne lui a notifié son licenciement.

Par une ordonnance n° 1405719 du 2 février 2015, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 mars 2015 et 14 mars 2016, M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse du 2 février 2015 ;

2°) d'annuler la décision de licenciement du 24 octobre 2014 de l'ordonnateur du GRETA Garonne ;

3°) de mettre à la charge du GRETA Garonne la somme de 135 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance a omis de prendre en compte ses écritures ; si elles sont succinctes, elles sont suffisamment précises ;

- le délai entre l'entretien préalable au licenciement, intervenu en novembre 2013, et le licenciement, intervenu plus d'un an après, ne peut s'expliquer ;

- deux personnes ont été engagées après son entretien préalable au licenciement pour exercer des tâches qu'il aurait pu assumer, ce qui est contradictoire avec le licenciement et l'obligation de tenter un reclassement ; lui ont été confiées des tâches d'accueil physique des personnes et de tenue de standard pour lesquelles ces deux personnes ont été recrutées ;

- la proposition d'emploi qui lui a été faite ne pouvait s'analyser en un reclassement alors que l'emploi proposé nécessitait un trajet aller-retour de 250 km et qu'il s'agissait d'un temps partiel à 35 %.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2015, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- si M. B...peut être regardé comme soutenant que le délai entre son entretien préalable et son licenciement était excessif, l'article 47 du décret du 17 janvier 1986 " ne spécifie aucun délai " entre la date de l'entretien préalable du licenciement et celle de sa prise d'effet. En se bornant à indiquer que " l'esprit de ce que doit être un licenciement économique et un entretien préalable " aurait été nié, le requérant ne précise pas en quoi le délai les séparant aurait eu une influence sur la légalité de la décision attaquée ; ainsi, il n'assortit le moyen d'aucune précision de droit ou de fait permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

- à la supposer établie, la circonstance que le GRETA Garonne soit, compte tenu des besoins spécifiques et de l'intérêt du service, amené à recruter ponctuellement des agents par contrats à durée déterminée n'est, en aucun cas, de nature à contredire la réalité des difficultés économiques qui ont, notamment, justifié la fermeture du SARAPP de Rieumes et, par suite, le licenciement pour motif économique de M. B...qui y exerçait alors ses fonctions d'accompagnateur relais ;

- le GRETA Garonne était tenu de tenter de reclasser M. B...uniquement au sein de son groupement sur un poste vacant correspondant au niveau de l'emploi d'accompagnateur relais qu'il occupait et à ses qualifications professionnelles ;

- les fonctions d'accompagnateur relais exercées par le requérant, qui consistaient à encadrer la formation donnée et à veiller à son bon déroulement, différaient totalement des tâches administratives effectuées par les deux agents contractuels mentionnés par M. B... ; au demeurant, il ne démontre pas qu'il justifierait des compétences nécessaires pour assumer ces fonctions ; ainsi, une proposition de reclassement sur des fonctions " subalternes " telles que celles exercées par ces agents contractuels n'aurait correspondu ni au niveau d'emploi qui était le sien en qualité d'accompagnateur relais ni à ses qualifications professionnelles ;

- l'ordonnateur du GRETA Garonne a, par un courrier du 11 décembre 2013, fait une proposition de reclassement à M. B...sur un poste d'accompagnateur relais au SARAPP de Revel à compter du 1er janvier 2014. Cette proposition, qui correspondait en tous points à l'emploi supprimé pour des motifs économiques d'accompagnateur relais de Rieumes, a cependant été rejetée par M. B...qui n'a, en aucun cas, demandé à occuper un emploi d'une autre nature antérieurement à la date de la décision attaquée.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 16 mars 2016, le syndicat SGEN-CFDT Midi-Pyrénées demande à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la requête.

Il fait valoir que :

- le délai d'un an séparant l'entretien et la décision de licenciement économique est incompréhensible ;

- la proposition de reclassement n'est faite que pour la forme ; il s'agit en réalité d'éviter qu'un contrat à durée indéterminée soit proposé.

Par une ordonnance du 22 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 12 mai 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Cécile Cabanne,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...a été recruté pour occuper les fonctions d'accompagnateur relais des sites antennes relais des ateliers pédagogiques personnalisés du GRETA Garonne, sous contrats à durée déterminée successifs à compter du 1er février 2006, puis à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2013, sa quotité de travail étant égale en exécution de ce dernier contrat à 35 % d'un temps complet. Par décision en date du 24 octobre 2014, l'ordonnateur du GRETA Garonne a prononcé le licenciement de M. B...pour un motif économique. M. B... relève appel de l'ordonnance n° 1405719 du 2 février 2015 par laquelle la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur l'intervention

2. Le syndicat SGEN-CFDT Midi-Pyrénées a intérêt, au regard de son objet social, à l'annulation de la décision de licenciement attaquée. Par suite, son intervention est recevable.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) Les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ".

4. Par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a, sur le fondement des dispositions précitées, et après l'expiration du délai de recours, rejeté la demande de M. B...au motif que les moyens de la requête n'étaient manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

5. Si le requérant s'est borné à soutenir qu'il ne s'expliquait pas le délai entre l'entretien préalable au licenciement, tenu en novembre 2013, et le licenciement, intervenu plus d'un an après, il faisait également état de ce que deux personnes avaient été embauchées après son entretien préalable au licenciement pour exercer des tâches administratives qu'il décrivait et dont il alléguait qu'il aurait pu les assumer, en contradiction avec l'obligation de reclassement du GRETA et le motif économique du licenciement. Dans ces conditions, M. B...devait être regardé comme demandant l'annulation de la décision de licenciement aux motifs que les obligations de reclassement avaient été méconnues et que le motif économique pour justifier le licenciement n'était pas constitué. Quel que soit leur bien-fondé, ces moyens de légalité interne n'étaient pas " manifestement dépourvus de précisions permettant d'en apprécier le bien fondé " au sens des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Il suit de là que ladite requête contenait des conclusions, assorties des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Par suite, l'ordonnance attaquée en date du 2 février 2015 est irrégulière et doit être annulée.

6. Il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par M. B...devant le tribunal administratif tendant à l'annulation de la décision de licenciement du 24 octobre 2014.

Sur la légalité de la décision de licenciement

7. Le requérant soutient que le délai d'un an séparant l'entretien du licenciement est excessif. Toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire n'encadre le délai entre l'entretien préalable au licenciement et la décision de licenciement. En l'absence de changement de circonstances entre ces deux dates, le Greta Garonne n'était pas tenu de procéder à un nouvel entretien préalable.

8. Il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés dont l'emploi est supprimé que les règles du statut général de la fonction publique qui imposent de donner, dans un délai raisonnable, aux fonctionnaires en activité dont l'emploi est supprimé une nouvelle affectation correspondant à leur grade, qu'il incombe à l'administration, avant de pouvoir prononcer le licenciement d'un agent contractuel recruté en vertu d'un contrat à durée indéterminée, motivé par la suppression, dans le cadre d'une réorganisation du service, de l'emploi permanent qu'il occupait, de chercher à reclasser l'intéressé.

9. Dans l'attente des décrets prévus par l'article 49 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, la mise en oeuvre de ce principe implique que l'administration, lorsqu'elle entend pourvoir par un fonctionnaire l'emploi occupé par un agent contractuel titulaire d'un contrat à durée indéterminée ou supprimer cet emploi dans le cadre d'une modification de l'organisation du service, propose à cet agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande, tout autre emploi. L'agent contractuel ne peut être licencié, sous réserve du respect des règles relatives au préavis et aux droits à indemnité qui résultent, pour les agents non-titulaires de l'Etat, des dispositions des titres XI et XII du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, que si le reclassement s'avère impossible, faute d'emploi vacant ou si l'intéressé refuse la proposition qui lui est faite.

10. Lorsqu'une réorganisation de service conduit à la suppression d'un emploi occupé par un agent contractuel titulaire d'un contrat à durée indéterminée au sein d'un GRETA, l'administration doit mettre en oeuvre l'obligation mentionnée aux points 7 et 8 ci-dessus en prenant en compte l'ensemble des postes vacants au sein de ce GRETA.

11. Il ressort des pièces du dossier, et n'est pas sérieusement contredit, que le budget du GRETA Garonne a connu une baisse significative pour l'année 2013, l'obligeant à fermer les antennes SARAP de Rieumes et Grenade au 1er janvier 2014. Le poste de M. B..., correspondant à des fonctions d'accompagnateur relais au sein de l'antenne de Rieumes, a été supprimé dans ce contexte. Ces éléments objectifs ne sauraient être remis en cause par la circonstance que deux agents ont été recrutés à temps non complet en février 2014 et janvier 2015 sur un site différent et pour des fonctions distinctes de celles pour lesquelles M. B... a été recruté. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas allégué que le GRETA Garonne aurait connu des perspectives de redressement pour l'année 2014, la réalité du motif économique du licenciement du requérant est établie.

12. Ainsi qu'il a été dit précédemment, le reclassement à temps complet ou incomplet de M. B... était impossible au sein de l'antenne de Rieumes dans un emploi de niveau équivalent, compte tenu de sa fermeture. L'administration a, par un courrier du 11 décembre 2013, avancé une solution destinée à maintenir le contrat de travail du requérant en lui proposant d'assurer son service d'enseignement à l'antenne de Revel du GRETA Garonne pour une quotité de travail identique à celle définie dans son contrat à durée indéterminée. Il est constant que M. B... a décliné la proposition. Dans ces conditions, alors même que deux postes d'un niveau d'emploi inférieur auraient été vacants, l'administration doit être regardée comme ayant satisfait à l'obligation qui lui incombait de chercher à reclasser l'intéressé, sans que celui-ci puisse utilement faire valoir que le poste proposé était géographiquement trop éloigné de son domicile pour qu'il puisse envisager de l'accepter.

13. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de licenciement du 24 octobre 2014 de l'ordonnateur du GRETA Garonne. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1405719 du 2 février 2015 de la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse est annulée.

Article 2 : La demande de M. B...et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de l'enseignement supérieur.

Délibéré après l'audience du 9 février 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mars 2017.

Le rapporteur,

Cécile CABANNELe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de l'enseignement supérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 15BX00679


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00679
Date de la décision : 16/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-06-02 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement. Auxiliaires, agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Cécile CABANNE
Rapporteur public ?: M. NORMAND

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-03-16;15bx00679 ?
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