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16/03/2017 | FRANCE | N°15BX00117

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 16 mars 2017, 15BX00117


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision en date du 8 janvier 2013 par laquelle le maire de la commune de Lormont a décidé de ne pas renouveler au-delà de son terme du 31 janvier 2013 son contrat de travail, ensemble la décision du 31 janvier 2013 par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux présenté le 23 janvier 2013.

Par un jugement n° 1300686 du 12 novembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé ces décisions, enjoint

à la commune de réintégrer Mme B...dans son emploi et mis à la charge de la commu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision en date du 8 janvier 2013 par laquelle le maire de la commune de Lormont a décidé de ne pas renouveler au-delà de son terme du 31 janvier 2013 son contrat de travail, ensemble la décision du 31 janvier 2013 par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux présenté le 23 janvier 2013.

Par un jugement n° 1300686 du 12 novembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé ces décisions, enjoint à la commune de réintégrer Mme B...dans son emploi et mis à la charge de la commune une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 janvier 2015, et un mémoire, enregistré le 23 mai 2016, la commune de Lormont, représentée par le cabinet Noyer-D... avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 novembre 2014 ;

2°) de rejeter la demande de MmeB... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- pour annuler les décisions litigieuses, les premiers juges se sont fondés sur les dispositions du II de l'article 3-4 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant statut de la fonction publique territoriale, qui prévoient que " tout contrat conclu ou renouvelé pour pourvoir un emploi permanent en application de l'article 3-3 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics effectifs de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu pour une durée indéterminée " ; or, Mme B...n'a jamais été recrutée sur le fondement des dispositions de l'article 3-3 de la loi précitée du 26 janvier 1984, mais sur celui des dispositions de l'article 3-1 de la même loi - anciennement alinéa 1er de l'article 3, relatives, entre autres, au "remplacement temporaire de fonctionnaires ou d'agents contractuels indisponibles en raison (...) d'un congé de maladie " ; l'inapplicabilité du dispositif de transformation du CDD en CDI résulte également des dispositions du II de l'article 41 de la loi du 12 mars 2012 ;

- à supposer que les recrutements successifs de Mme B...n'aient pas été conformes aux dispositions du premier alinéa de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, une telle circonstance ne serait pas de nature, en tout état de cause, à affecter la légalité de la décision portant non-renouvellement de son contrat ; ses recrutements successifs ont bel et bien tous été justifiés par le remplacement temporaire d'un agent indisponible en raison d'un congé de maladie, comme cela ressort des visas des arrêtés municipaux en cause, qui mentionnent expressément " le remplacement d'un agent en congé maladie" et les dispositions de l'alinéa premier de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 puis, à compter de 2012, les dispositions de l'article 3-1 de cette même loi, étant rappelé que le secret médical s'oppose, naturellement, à ce que Mme B...prenne connaissance des avis d'arrêts de travail de l'agent dont elle a assuré, temporairement, le remplacement.

- Mme B...ne saurait bénéficier du dispositif de transformation automatique de son CDD en CDI dans la mesure où elle ne totalise pas six années de services publics effectifs, accomplis au cours des huit années précédant la publication de la loi du 12 mars 2012, mais seulement 5 ans et 6 mois de services publics effectifs ;

- l'intéressée ne saurait faire valoir que la commune de Lormont lui aurait brutalement opposé une décision de refus de transformation de son CDD en CDI dès lors que, sur sa demande, la commune lui a indiqué dès le 20 novembre 2012 que ses états de service ne lui permettaient pas de prétendre à l'obtention d'un CDI ;

- les conclusions indemnitaires présentées par Mme B...doivent être rejetées à défaut d'avoir été précédées d'une réclamation préalable indemnitaire, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges.

Par un mémoire en défense et un mémoire en production de pièces, enregistrés le 24 mars 2016, MmeB..., représentée par MeA..., conclut, d'une part, au rejet de la requête de la commune de Lormont et d'autre part, par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement du 12 novembre 2014 en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions indemnitaires et à la condamnation de la commune de Lormont aux entiers dépens et à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les arrêtés de nomination, qui indiquent que le motif de son engagement est le remplacement d'un agent en congé maladie, auraient dû préciser quel agent elle remplaçait ; sans cette précision, il est aisé pour la commune de Lormont d'indiquer comme motif d'embauche le remplacement d'un agent en congé maladie afin d'éviter que l'agent nouvellement embauché ne bénéficie des avantages d'un agent engagé sur le fondement des dispositions de l'article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984 ; à cet égard, le dernier arrêté, qui renouvelait son contrat de travail pour une durée d'un mois ne fait pas référence au remplacement d'un agent en congé maladie ;

- compte tenu de l'illégalité de forme des arrêtés individuels, c'est sur le fondement de l'article 3-1 de la loi du 26 janvier 1984 qu'elle doit être regardée comme ayant été recrutée ; à compter du 8 septembre 2012, ayant acquis une ancienneté de six années, son contrat aurait dû être transformé en contrat à durée indéterminée ;

- aucun motif n'ayant présidé à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, son licenciement est entaché d'illégalité ; la rupture du contrat de travail n'a pas été précédée du préavis de deux mois applicable en vertu du décret du 15 février 1988 ; la décision de licenciement n'a été précédée d'aucun entretien préalable ; compte tenu de ces illégalités, elle doit être réintégrée au sein de la commune de Lormont ;

- dans l'hypothèse où la cour ne ferait pas droit à sa demande de réintégration, l'article 43 du décret du 15 février 1988 prévoit qu'une indemnité de licenciement est due à l'agent non titulaire embauché dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ; elle a droit à la somme de 7 339,95 euros à ce titre, le licenciement devant alors prendre effet à la date de l'arrêt de la cour ;

- elle a subi un préjudice moral qu'elle évalue à la somme de 5 000 euros ; après six années de service, à l'âge de 54 ans, la commune de Lormont a rompu brutalement son contrat de travail ; cette rupture est intervenue alors qu'elle revenait d'un congé maladie à la suite du décès de son père ; elle a multiplié les recherches d'emploi sans succès, les collectivités ne souhaitant pas l'embaucher compte tenu du contentieux qui l'oppose à la commune de Lormont ; elle s'est également aperçue lors de la rupture de contrat que la commune n'avait pas correctement effectué ses déclarations auprès de l'URSSAF et des services fiscaux, engendrant pour elle des conséquences financières difficiles.

Par une ordonnance du 18 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 26 mai 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mai 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique ;

- le décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeC...,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- et les observations de MeD..., représentant la commune de Lormont ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...a été recrutée par la commune de Lormont du 7 septembre au 31 décembre 2006 en qualité d'agent des services techniques auxiliaire à temps non complet. Les parties ont poursuivi l'exécution de cet engagement, au moins jusqu'au mois de février 2007, ainsi que l'attestent les bulletins de paie de MmeB.... Puis, du 1er mars au 31 décembre 2007, elle a été recrutée en qualité d'agent technique de 2ème classe non titulaire à temps complet, engagement régulièrement renouvelé jusqu'au 31 janvier 2013. Par un courrier du 8 janvier 2013, le maire de la commune de Lormont a rappelé à Mme B...que son contrat arriverait à son terme le 31 janvier 2013 et l'a informée de sa volonté de ne pas poursuivre cette collaboration au-delà du terme du contrat. Ce contrat n'a effectivement pas été renouvelé. Par un courrier du 23 janvier 2013, Mme B...a demandé au maire de la commune de Lormont de la réintégrer dans ses fonctions aux motifs qu'elle occupait un emploi permanent et qu'elle entrait dans le champ d'application des dispositions de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique. Cette demande a été rejetée par le maire de la commune de Lormont le 31 janvier 2013. Mme B...a demandé ensuite au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision de non-renouvellement de son contrat et la décision du 31 janvier 2013 de rejet de son recours gracieux, d'enjoindre à la commune de la réintégrer dans son emploi et de la condamner à lui verser diverses sommes. Par un jugement n° 1300686 du 12 novembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé ces décisions, a enjoint à la commune de la réintégrer dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus de ses conclusions. La commune de Lormont doit être regardée comme relevant appel de ce jugement dans la mesure où il lui fait grief. Mme B...conclut au rejet de la requête et par la voie de l'appel incident à la réformation du jugement du 12 novembre 2014 en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions indemnitaires.

Sur la légalité des décisions :

2. D'une part, aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 dans sa version antérieure à sa modification par l'article 40 de la loi du 12 mars 2012, publiée au Journal officiel de la République française le 13 mars 2012 et entrée en vigueur le lendemain : " Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité, d'un congé parental ou d'un congé de présence parentale, ou de l'accomplissement du service civil ou national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, de leur participation à des activités dans le cadre de l'une des réserves mentionnées à l'article 74, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. / Ces collectivités et établissements peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une seule fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel. / Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. (...). ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, en vigueur depuis sa modification par la loi du 12 mars 2012 précitée : " Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 peuvent recruter temporairement des agents contractuels sur des emplois non permanents pour faire face à un besoin lié à : 1° Un accroissement temporaire d'activité, pour une durée maximale de douze mois, compte tenu, le cas échéant, du renouvellement du contrat, pendant une même période de dix-huit mois consécutifs ; 2° Un accroissement saisonnier d'activité, pour une durée maximale de six mois, compte tenu, le cas échéant, du renouvellement du contrat, pendant une même période de douze mois consécutifs ". Aux termes de son article 3-3 : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et sous réserve de l'article 34 de la présente loi, des emplois permanents peuvent être occupés de manière permanente par des agents contractuels dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A lorsque les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient et sous réserve qu'aucun fonctionnaire n'ait pu être recruté dans les conditions prévues par la présente loi ; 3° Pour les emplois de secrétaire de mairie des communes de moins de 1 000 habitants et de secrétaire des groupements composés de communes dont la population moyenne est inférieure à ce seuil ; 4° Pour les emplois à temps non complet des communes de moins de 1 000 habitants et des groupements composés de communes dont la population moyenne est inférieure à ce seuil, lorsque la quotité de temps de travail est inférieure à 50 % ; 5° Pour les emplois des communes de moins de 2 000 habitants et des groupements de communes de moins de 10 000 habitants dont la création ou la suppression dépend de la décision d'une autorité qui s'impose à la collectivité ou à l'établissement en matière de création, de changement de périmètre ou de suppression d'un service public. Les agents ainsi recrutés sont engagés par contrat à durée déterminée d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables par reconduction expresse, dans la limite d'une durée maximale de six ans. Si, à l'issue de cette durée, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée. ". Enfin, selon l'article 3-4 de la même loi : " II. - Tout contrat conclu ou renouvelé pour pourvoir un emploi permanent en application de l'article 3-3 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics effectifs de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu pour une durée indéterminée. La durée de six ans mentionnée au premier alinéa du présent II est comptabilisée au titre de l'ensemble des services accomplis auprès de la même collectivité ou du même établissement dans des emplois occupés sur le fondement des articles 3 à 3-3. Elle inclut, en outre, les services effectués au titre du deuxième alinéa de l'article 25 s'ils l'ont été auprès de la collectivité ou de l'établissement l'ayant ensuite recruté par contrat. Pour l'appréciation de cette durée, les services accomplis à temps non complet et à temps partiel sont assimilés à des services effectués à temps complet. Les services accomplis de manière discontinue sont pris en compte, sous réserve que la durée des interruptions entre deux contrats n'excède pas quatre mois. Lorsqu'un agent remplit les conditions d'ancienneté mentionnées aux deuxième à quatrième alinéas du présent II avant l'échéance de son contrat en cours, les parties peuvent conclure d'un commun accord un nouveau contrat, qui ne peut être qu'à durée indéterminée ". En vertu du II de l'article 41 de la loi du 12 mars 2012, l'article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984 est applicable aux contrats en cours qui ont été conclus sur le fondement des quatrième à sixième alinéas de l'article 3 de ladite loi, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la loi du 12 mars 2012.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...a été engagée par la commune de Lormont à compter du 7 septembre 2006 pour occuper des fonctions d'agent des services techniques non-titulaire à temps non complet, puis d'adjoint technique de deuxième classe non-titulaire à temps complet. L'ensemble de ces engagements renvoie à l'alinéa 1er de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, figurant désormais à l'article 3-1 de ladite loi, permettant le recrutement d'agents non titulaires pour occuper des emplois permanents afin d'assurer le remplacement d'un agent en congé maladie ou momentanément indisponible. A supposer même que, en l'absence de toute précision par la commune du nom du salarié en congé de maladie et de justification des arrêtés successifs le plaçant dans cette position, le recrutement de Mme B...aurait été irrégulier, aucun élément du dossier ne démontre que ses contrats auraient été conclus en application des dispositions des quatrième, cinquième ou sixième alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction alors en vigueur, ou de l'article 3-3 de la même loi dans sa rédaction applicable à la date à laquelle elle a signé son dernier contrat. Les fonctions exercées par l'intéressée étaient en effet, par nature, susceptibles d'être exercées par des fonctionnaires relevant des cadres d'emplois des fonctionnaires territoriaux. Les emplois qu'elle a occupés ne relevaient pas du niveau de la catégorie A mais de la catégorie C. Enfin, la population de la commune de Lormont excède 2000 habitants. Dans ces conditions, la commune de Lormont est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984 pour annuler la décision du 8 janvier 2013, confirmée le 31 janvier 2013 refusant de renouveler le contrat de Mme B...au-delà du 31 janvier 2013.

5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B...devant le tribunal administratif.

6. Aux termes de l'article 21 de la loi susvisée du 12 mars 2012 : " A la date de publication de la présente loi, la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée est obligatoirement proposée à l'agent contractuel, employé par une collectivité territoriale ou un des établissements publics mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée conformément à l'article 3 de la même loi, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la présente loi, qui se trouve en fonction ou bénéficie d'un congé prévu par le décret pris en application de l'article 136 de ladite loi. / Le droit défini au premier alinéa du présent article est subordonné à une durée de services publics effectifs, accomplis auprès de la même collectivité ou du même établissement public, au moins égale à six années au cours des huit années précédant la publication de la présente loi (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...doit être regardée comme se prévalant de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 21 de la loi susvisée du 12 mars 2012, dès lors que l'intéressée invoque son droit à la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée que lui a refusée le maire de la commune de Lormont. Toutefois, si l'intéressée a été employée par la commune sans discontinuité du 7 septembre 2006 au 31 janvier 2013, elle ne bénéficiait pas d'une durée effective de services de six ans à la date de publication de cette dernière loi, soit le 13 mars 2012 mais seulement de 5 ans, 6 mois et 5 jours. Si elle a également invoqué devant le tribunal " la loi 83-634 du 13 juillet 1983 ", elle n'indique pas en quoi ses dispositions, qui ne portaient pas sur un droit à titularisation des agents contractuels, auraient été méconnues.

8. Il résulte de ce qui précède que les décisions contestées s'analysent comme des décisions de refus de renouveler un contrat à durée déterminée et non comme une mesure de licenciement. Par suite, le moyen tiré de ce que les décisions ne sont fondées sur aucun des cas de licenciement autorisés par la loi doit être écarté comme inopérant. Il en va de même des moyens tirés du non-respect du délai de préavis et du défaut d'entretien préalable précédant la décision de licenciement tels que régis par les dispositions invoquées par la requérante des articles 39 et suivants du décret 15 février 1988.

9. Aucune disposition législative ou réglementaire n'imposant une obligation de motiver un refus de renouveler un contrat dès lors que les agents n'ont pas de droit à un tel renouvellement, la circonstance que la décision attaquée n'indique aucun motif ne peut utilement être invoquée.

10. Si Mme B...a entendu soulever le moyen tiré du caractère infondé de la décision de non-renouvellement de son contrat à durée déterminée en ce qu'elle ne serait pas motivée par l'intérêt du service mais par son état de santé, la commune de Lormont expose qu'elle n'a été recrutée que pour pourvoir au remplacement d'agents momentanément indisponibles. Il n'est pas établi, par ailleurs, que la commune de Lormont aurait recruté une autre personne pour exercer les mêmes fonctions à compter du 1er février 2013.

11. Il résulte de ce qui précède que la commune de Lormont est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé les décisions de son maire des 8 et 31 janvier 2013 de ne pas renouveler le contrat de MmeB..., lui a enjoint de procéder à sa réintégration, et l'a condamnée à indemniser Mme B...des frais exposés pour l'instance.

Sur les conclusions indemnitaires :

12. Mme B...demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de condamner la commune de Lormont à lui verser une indemnité de licenciement de 7 339,95 euros et 5 000 euros au titre du préjudice moral subi. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, dont la motivation n'est pas critiquée, ces conclusions n'ont pas fait l'objet d'une demande préalable et sont ainsi irrecevables. Elles ne peuvent dès lors, en tout état de cause, qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lormont, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme B...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la requérante la somme que la commune de Lormont demande sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1, 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 novembre 2014 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Bordeaux tendant à l'annulation des décisions attaquées, à sa réintégration et à l'indemnisation des frais engagés dans l'instance est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Lormont est rejeté.

Article 4 : Les conclusions indemnitaires de Mme B...et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lormont et à Mme E...B....

Délibéré après l'audience du 9 février 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mars 2017.

Le rapporteur,

Cécile C...Le président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre de la fonction publique en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

No 15BX00117


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00117
Date de la décision : 16/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Cécile CABANNE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP NOYER - CAZCARRA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-03-16;15bx00117 ?
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