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14/03/2017 | FRANCE | N°16BX03405

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 14 mars 2017, 16BX03405


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 juillet 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, l'arrêté du préfet en date du même jour le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1603316 du 25 juillet 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

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rocédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2016, M.B..., représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 juillet 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, l'arrêté du préfet en date du même jour le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1603316 du 25 juillet 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1603316 du 25 juillet 2016 ;

2°) d'annuler les arrêtés contestés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Laurent Pouget a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant kosovar, est entré irrégulièrement en France en mars 2015, selon ses déclarations, et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 23 septembre 2015. Cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet prise le 28 avril 2016 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). M. B...a entre-temps quitté le territoire français à une date indéterminée pour se rendre en Suisse, où il n'avait aucun droit au séjour. Par une décision du 17 mai 2016, les autorités françaises ont donné à l'Office fédéral suisse des migrations leur accord pour une reprise en charge de l'intéressé en application de l'article 18-1-d du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. A son retour en France, le 20 juillet 2016, M. B...s'est vu notifier deux arrêtés du préfet de la Haute-Garonne, pour l'un l'obligeant à quitter le territoire français sans délai à destination de son pays d'origine et, pour l'autre, le plaçant en rétention administrative. M. B... relève appel du jugement du 25 juillet 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Haute-Garonne a rejeté sa demande à fin d'annulation de ces deux arrêtés.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les moyens ayant trait à l'ensemble des décisions contestées :

2. Il ressort des pièces du dossier que l'avion ramenant M. B...en France s'est posé à l'aéroport de Toulouse-Blagnac le 20 juillet 2016 à 16 heures 10. L'audition de l'intéressé par les services de police a débuté à 16 heures 45 et les décisions du même jour par lesquelles le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et l'a placé en rétention administrative lui ont été notifiées à 18 heures 20, soit plus d'une heure trente après son arrivée. Dans ces conditions, les services préfectoraux ont disposé d'un temps suffisant pour se livrer à un examen particulier de la situation du requérant. En outre, il ne ressort pas de la motivation des différentes décisions en cause que le préfet aurait négligé de procéder à un tel examen avant de prendre chacune d'elles.

3. Il résulte par ailleurs des mentions du procès-verbal d'audition de M. B... par les services de police judiciaire, établi le 20 juillet 2016, que l'intéressé, qui a été entendu et mis en mesure de présenter ses observations préalablement à l'édiction des décisions du même jour par lesquelles le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et l'a placé en rétention administrative, n'a pas sollicité l'assistance d'un interprète et a néanmoins répondu sans difficultés apparentes aux questions qui lui ont été posées en français, langue dont il y a dès lors lieu de considérer qu'il la comprend. Il ne ressort ainsi aucunement des pièces du dossier que M. B..., pour un motif tenant aux conditions dans lesquelles il a été entendu et notamment à l'absence d'interprète, aurait été empêché de porter à la connaissance des services préfectoraux, avant que ne soit prise à son encontre une mesure d'éloignement, des informations de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu préalablement à toute décision doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. La décision portant obligation de quitter le territoire français vise notamment l'article L. 511-1 I 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et se fonde sur ce que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'asile de M. B...le 28 avril 2016, sur ce qu'à ce jour, il est donc en séjour irrégulier sur le territoire français, et sur ce qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie personnelle et familiale. Par suite, la décision attaquée, qui comporte les considérations de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

5. Ainsi qu'il a été dit, l'OFPRA a rejeté la demande d'asile présentée le 23 septembre 2015 par M. B...par une décision du 28 avril 2016, constatant notamment que l'intéressé n'a donné aucune suite à sa saisine initiale et ne s'est pas présenté à l'audience du 14 avril 2016, ainsi qu'il y était invité. Si le requérant soutient que cette décision ne lui aurait pas été notifiée dans les conditions prévues par l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avant que soit édictée la mesure d'éloignement prise à son encontre, il ressort cependant des pièces du dossier que ladite décision lui a été communiquée par courrier recommandé avec accusé de réception au Secours Catholique de Chambéry, lieu de résidence qu'il avait indiqué mais auquel, sans en avoir informé l'administration, il ne résidait plus à la date à laquelle la décision de l'OFPRA lui a été adressée. En tout état de cause, cette décision lui a été notifiée le 20 juillet 2016, avant l'édiction de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il disposait encore, à cette date, d'un droit à se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :

6. Le présent arrêt écarte les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français de sorte que le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait privée de base légale ne peut qu'être écarté.

7. M. B...reprend en appel, sans faire état de circonstances de fait ou de droit qu'il n'aurait déjà invoqué devant le premier juge, les moyens tirés de ce que la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est insuffisamment motivée et de ce que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas fait usage de son pouvoir d'appréciation avant de prendre cette décision. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse.

8. Pour ordonner à M. B...de quitter le territoire sans délai, le préfet s'est fondé sur l'existence d'un risque de soustraction à cette obligation, en application des c) et f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors qu'à la date de sa reprise par les autorités françaises, le récépissé de demande de titre de séjour de l'intéressé était venu à expiration et qu'il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes puisqu'il n'a pu présenter de document de voyage en cours de validité ni attester d'un lieu de résidence effectif ou avéré sur le territoire national, le préfet a fait en l'espèce une exacte application de ces dispositions, sans que le requérant puisse utilement faire valoir qu'il a un temps séjourné en Suisse.

En ce qui concerne la fixation du pays de renvoi :

9. Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait privée de base légale ne peut qu'être écarté.

10. M. B...reprend en appel, sans faire état de circonstances de fait ou de droit qu'il n'aurait déjà invoqué devant le premier juge, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse.

11. Si M.B..., dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'asile le 28 avril 2016, soutient qu'il ne peut retourner dans son pays d'origine sans mettre en danger sa vie ou son intégrité physique, il n'étaye cette affirmation d'aucune argumentation circonstanciée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

En ce qui concerne le placement en rétention administrative :

12. Dès lors que le présent arrêt ne fait pas droit aux moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait privée de base légale doit être écarté.

13. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...). ". Aux termes de l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision de placement est prise par l'autorité administrative, après l'interpellation de l'étranger et, le cas échéant, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention. Elle est écrite et motivée (...) ". L'article L. 561-2 du même code ajoute que : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...). ".

14. La décision attaquée mentionne l'obligation de quitter le territoire français du 20 juillet 2016 prise à l'encontre de M.B..., et se fonde sur la circonstance que l'intéressé ne peut pas faire l'objet d'une assignation à résidence car il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, à défaut de disposer d'un document de voyage en cours de validité et de pouvoir indiquer un lieu de résidence effectif ou permanent avéré sur le territoire français. Ainsi, la décision attaquée, qui comporte les considérations de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée.

15. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, M. B...n'a pu présenter de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il n'a pu justifier ni de la possession d'un document de voyage en cours de validité ni d'un lieu de résidence effectif ou permanent avéré sur le territoire français. Par suite, en ordonnant son placement en rétention administrative, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

17. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

5

N° 16BX03405


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03405
Date de la décision : 14/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : MARTIN-CAMBON

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-03-14;16bx03405 ?
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