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14/03/2017 | FRANCE | N°15BX02815

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 14 mars 2017, 15BX02815


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat intercommunal à vocation scolaire (SIVOS) d'Excideuil a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner solidairement M. B...et la société mutuelle assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) à lui verser une somme de 19 992,10 euros en réparation des désordres affectant le revêtement de sol de la salle de sport ainsi qu'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par un jugement n° 1204446 du 17 juin 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a re

jeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat intercommunal à vocation scolaire (SIVOS) d'Excideuil a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner solidairement M. B...et la société mutuelle assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) à lui verser une somme de 19 992,10 euros en réparation des désordres affectant le revêtement de sol de la salle de sport ainsi qu'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par un jugement n° 1204446 du 17 juin 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 août 2015, le syndicat intercommunal à vocation scolaire (SIVOS) d'Excideuil, représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 17 juin 2015 ;

2°) de condamner solidairement M. B...et la société SMABTP à lui verser la somme de 19 992,10 euros à titre de dommages et intérêts ;

3°) de condamner la société SMABTP à lui verser la somme de 5 000 euros pour résistance abusive ;

4°) de mettre à la charge solidaire des mêmes la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l'instance.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant le syndicat intercommunal à vocation scolaire d'Excideuil et de MeC..., représentant M.B....

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de la construction d'un gymnase à Excideuil, le syndicat intercommunal à vocation scolaire (SIVOS) d'Excideuil, maître de l'ouvrage, a confié la réalisation du lot " revêtement sol sportif " à M.B.... Les travaux réalisés par ce dernier ont fait l'objet d'une réception sans réserve prononcée le 28 juillet 2000. L'apparition, au cours de l'année 2002, de fissures sur le revêtement du gymnase a conduit le SIVOS d'Excideuil à rechercher la responsabilité de son assureur, la société mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) et celle de M.B..., à titre principal sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs, et, à titre subsidiaire, en application de la théorie des dommages intermédiaires. Le SIVOS d'Excideuil relève appel du jugement rendu le 17 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. M. B...conclut au rejet de la requête d'appel du SIVOS tout comme la SMABTP qui demande, en outre, à être garantie par M. B...de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre.

Sur les conclusions présentées par le SIVOS d'Excideuil :

En ce qui concerne la garantie décennale des constructeurs :

2. Après avoir relevé que les fissures qui affectent le revêtement du gymnase ne présentent pas une importance faisant obstacle une utilisation normale de la salle de sport, les premiers juges en ont conclu que ces désordres, dont le caractère évolutif n'était pas établi, ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage ou ne le rendent pas impropre à sa destination et qu'ainsi, ils ne peuvent engager la garantie décennale des constructeurs.

3. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des dommages apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 4 décembre 2010, que le revêtement de la salle des sports d'Excideuil est affecté, sur toute sa surface, de fissurations d'une longueur allant de 2 à 5 centimètres, se présentant sous la forme d'entailles superficielles ou de déchirures en surface. Ces désordres, qui sont apparus dès l'année 2002, se sont progressivement aggravés au fil du temps ainsi que le confirment les nombreuses attestations rédigées en 2009 et en avril 2010 par des professeurs d'éducation physique, des agents du SIVOS et autres utilisateurs occasionnels de la salle des sports. De plus, au 23 juillet 2015, date du constat d'huissier réalisé à la demande du SIVOS d'Excideuil, le revêtement de la salle présentait une multitude de microfissures avec des longueurs variant de un à quarante centimètres, plusieurs trous d'environ cinq centimètres de diamètre, une fissure aussi longue que la porte de l'entrepôt du gymnase et présentant une largeur de cinq centimètres, une autre fissure en forme d'arc de cercle de sept mètres linéaires. Il résulte également de ce constat, et des photographies qui l'accompagnent, que sur une surface équivalente à un mètre carré, pas moins de cinquante-sept fissures ont été dénombrées.

5. Même si ces désordres ne rendaient pas l'ouvrage impropre à sa destination à la date du rapport d'expertise du 4 décembre 2010, dès lors qu'ils ne s'étaient pas encore révélés dans toute leur étendue, ils présentent néanmoins un caractère évolutif de nature à remettre en cause l'utilisation normale de l'ouvrage et à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, alors même que celui-ci n'a pas cessé d'être utilisé depuis sa construction. De plus, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que ces désordres étaient seulement dus à l'usage de la salle des sports par ses utilisateurs. Par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a considéré que les désordres en cause n'étaient pas de nature à engager la garantie décennale des constructeurs et s'est fondé sur ce motif pour rejeter la demande du SIVOS d'Excideuil.

6. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par le SIVOS d'Excideuil.

En ce qui concerne la responsabilité de M.B... :

7. Comme il a été dit précédemment, M. B...était titulaire du lot " revêtement sol sportif " chargé à ce titre de poser le revêtement couvrant le sol du gymnase. Par suite, les désordres sont imputables à son intervention et engagent sa responsabilité au titre de la garantie décennale.

En ce qui concerne la responsabilité de la SMABTP :

S'agissant de la responsabilité au titre de la garantie décennale des constructeurs :

8. Le SIVOS d'Excideuil demande que son assureur, la SMABTP, soit condamné solidairement avec M. B...à l'indemniser pour les désordres qui affectent le revêtement du gymnase en application du contrat d'assurance, lequel couvre la réparation des désordres rendant les ouvrages assurés impropres à leur destination.

9. Une condamnation solidaire sur le fondement de la garantie décennale n'est possible que si les désordres en cause sont regardés comme simultanément imputables aux intervenants à l'acte de construire, parmi lesquels ne figure pas l'assureur du maître de l'ouvrage. Ainsi, l'assureur du SIVOS d'Excideuil ne peut être tenu pour solidairement responsable des désordres litigieux sur le fondement des principes dont s'inspire la garantie décennale des constructeurs.

10. Par ailleurs, aucune des stipulations du contrat d'assurance ne prévoit que l'assureur du maître de l'ouvrage est tenu à une réparation solidaire des désordres décennaux avec un entrepreneur responsable de ces derniers. De même, aucune disposition législative ne prévoit de solidarité entre l'assureur du maître de l'ouvrage et les entrepreneurs responsables en ce qui concerne la réparation des désordres de nature décennale affectant un ouvrage.

11. Il résulte de ce qui précède que la demande, présentée par le SIVOS d'Excideuil, de condamnation solidaire de la SMABTP avec M. B...doit être rejetée.

S'agissant de la responsabilité au titre de la théorie des dommages intermédiaires :

12. La SMABTP, qui est l'assureur du maître de l'ouvrage, ne constitue pas un constructeur qui, en tant que tel, peut voir sa responsabilité être engagée sur le fondement de la théorie des dommages intermédiaires comme le soutient le SIVOS d'Excideuil. Par suite, les conclusions présentées sur ce fondement par le SIVOS d'Excideuil doivent être rejetées en tout état de cause.

En ce qui concerne le préjudice :

13. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que la réparation des désordres qui affectent le revêtement du sol du gymnase présente un coût de 17 865,31 euros. De plus, la réfection du revêtement du local de rangement du gymnase s'avère aussi nécessaire pour un montant de 2 126,49 euros. Dès lors, il y a lieu de condamner M. B...à verser au SIVOS d'Excideuil la somme totale de 19 992 euros.

14. Le SIVOS d'Excideuil demande également la condamnation de la SMBATP à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de la " résistance abusive " dont elle aurait fait preuve en refusant d'exécuter ses obligations contractuelles. Toutefois, le SIVOS requérant n'établit pas avoir subi un quelconque préjudice de ce seul fait.

15. Il résulte de tout ce qui précède que le SIVOS d'Excideuil est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre M.B....

Sur les conclusions présentées par la SMABTP :

16. La SMABTP entend exercer à l'encontre de M. B...l'action subrogatoire qui appartient, en vertu de l'article L. 121-12 du code des assurances, à l'assureur dommages-ouvrage contre les constructeurs qu'il estime responsables des désordres dont il a été condamné à garantir le maître de l'ouvrage.

17. Il résulte toutefois de ce qui a été dit au point 9 à 12 du présent arrêt qu'aucune condamnation n'est prononcée à l'encontre de la SMABTP au profit de son assuré, le SIVOS d'Excideuil. Par suite, les conclusions présentées par la SMABTP à l'encontre de M. B...ne peuvent qu'être rejetées, en tout état de cause.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. B...tendant à la condamnation, en application de cet article, du SIVOS d'Excideuil qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

19. Dans les circonstances de l'espèce et en application de ce même article, il y a lieu de mettre à la charge de M. B...une somme de 1 500 euros au titre des frais, non compris dans les dépens, exposés par le SIVOS d'Excideuil.

20. Il y a lieu également de mettre à la charge du SIVOS d'Excideuil la somme de 1 500 euros au titre des frais, non compris dans les dépens, exposés par la SMABTP qui n'est pas la partie perdante à son égard.

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1204446 du tribunal administratif de Bordeaux du 17 juin 2015 est annulé.

Article 2 : M. B...est condamné à verser au SIVOS d'Excideuil la somme de 19 992 euros à titre de dommages et intérêts ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du SIVOS d'Excideuil est rejeté.

Article 4 : Le SIVOS d'Excideuil versera à la SMABTP la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de M. B...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 15BX02815


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX02815
Date de la décision : 14/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage.

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SELARL BERTOL et BONDAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-03-14;15bx02815 ?
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