Vu la procédure suivante :
Procédure antérieure :
M. et Mme A...D...ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge de l'amende prévue à l'article 1736-IV du code général des impôts, à laquelle ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.
Par un jugement n° 1401684 du 19 mai 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 juillet 2015, M. et MmeD..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) de leur accorder la décharge des amendes litigieuses et, subsidiairement, que l'amende infligée au titre de l'année 2009 soit ramenée à 1 500 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laurent Pouget,
- et les conclusions de M. B...de la Taille Lolainville, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme D...ont fait l'objet en 2012 d'un examen de leur situation fiscale personnelle portant sur l'impôt sur le revenu au titre des années 2009 et 2010. A l'issue de ce contrôle, l'administration, constatant que les contribuables étaient titulaires d'un compte bancaire ouvert au Luxembourg et non déclaré en France, leur a infligé, au titre des deux années d'imposition, l'amende prévue par le IV de l'article 1736 du code général des impôts. M. et Mme D...ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge de ces amendes. Ils relèvent appel du jugement du 19 mai 2015 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande.
2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts : " les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger (...) ". Selon le IV de l'article 1736 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition : " les infractions aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A et de l'article 1649 A bis sont passibles d'une amende de 1 500 euros par compte ou avance non déclaré. Toutefois, pour l'infraction aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A, ce montant est porté à 10 000 euros par compte non déclaré lorsque l'obligation déclarative concerne un Etat ou un territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales permettant l'accès aux renseignements bancaires ". Et aux termes de l'article 344 A de l'annexe III au code général des impôts : " I. Les comptes à déclarer en application du deuxième alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts sont ceux ouverts auprès de toute personne de droit privé ou public qui reçoit habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou espèces. / II. Les personnes physiques joignent la déclaration de compte à la déclaration annuelle de leurs revenus. Chaque compte à usage privé, professionnel ou à usage privé et professionnel doit être mentionné distinctement (...) / III. La déclaration de compte mentionnée au II porte sur le ou les comptes ouverts, utilisés ou clos, au cours de l'année ou de l'exercice par le déclarant, l'un des membres de son foyer fiscal ou une personne rattachée à ce foyer. / Un compte est réputé avoir été utilisé par l'une des personnes visées au premier alinéa dès lors que celle-ci a effectué au moins une opération de crédit ou de débit pendant la période visée par la déclaration, qu'elle soit titulaire du compte ou qu'elle ait agi par procuration, soit pour elle-même, soit au profit d'une personne ayant la qualité de résident. ".
3. Il résulte de ces dispositions que les personnes physiques domiciliées en France qui ne déclarent pas les références des comptes ouverts, utilisés ou clos qu'elles possèdent à l'étranger sont passibles d'une amende d'un montant forfaitaire par compte non déclaré, dont le montant est majoré lorsque la France n'a pas conclu de convention d'assistance administrative de lutte contre la fraude avec l'Etat dans lequel sont ouverts les comptes non déclarés. En l'occurrence, la convention fiscale franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958 a prévu la mise en oeuvre d'une assistance administrative par la voie d'un avenant en date du 3 juin 2009, applicable selon son article 2 aux revenus afférents, suivant les cas, à toute année civile ou tout exercice commençant à compter du 1er janvier de l'année suivant immédiatement sa signature. En conséquence, ayant relevé que M. et Mme D...avaient manqué à leurs obligations déclaratives au titre des deux années d'imposition contrôlées, l'administration leur a infligé en vertu des dispositions précitées du IV de l'article 1736 du code général des impôts une amende d'un montant de 10 000 euros au titre de l'année 2009 et une amende d'un montant de 1 500 euros au titre de l'année 2010.
En ce qui concerne l'année 2009 :
4. Il est constant que M. et Mme D...ont utilisé au cours de l'année 2009 un compte bancaire au Luxembourg, ouvert auprès de la banque Edmond de Rothschild. Ils ne contestent pas s'être abstenus de procéder dans les délais impartis pour le dépôt des déclarations de revenus, c'est-à-dire au plus tard le 24 juin 2009, à la déclaration des références de ce compte, conformément aux dispositions du deuxième alinéa précité de l'article 1649 A du code général des impôts, et le seul courrier émanant de leur banque luxembourgeoise joint à leur déclaration de revenus pour 2010, mentionnant le montant au crédit du compte au 31 décembre 2009 ne peut en tout état de cause tenir lieu de déclaration rectificative. Par ailleurs, les circonstances tenant, d'une part, à ce que les intéressés auraient ignoré avant 2010 être dans l'obligation de déclarer le compte, se fiant aux indications de leur conseiller bancaire luxembourgeois, et, d'autre part, à ce qu'ils n'ont pas cherché à dissimuler les sommes transférées sur ce compte, lesquelles ont été régulièrement imposées en France, sont sans incidence sur le bien-fondé de l'amende contestée, dont l'application n'est pas subordonnée à la preuve de la mauvaise foi du contribuable mais est fondée sur la seule carence des obligations déclaratives. Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'administration a pu légalement mettre à leur charge, au titre de l'année 2009, l'amende de 10 000 euros prévue par les dispositions précitées du IV de l'article 1736 A du code général des impôts.
En ce qui concerne l'année 2010 :
5. Il résulte de l'instruction que M. et MmeD..., s'ils n'ont pas coché la case 8 UU du formulaire n° 2042 adressé à l'administration pour la déclaration de leurs revenus de l'année 2010, afférente aux comptes bancaires à l'étranger, ont néanmoins joint en annexe à cette déclaration, signée par eux, des courriers et imprimés émanant de la banque Edmond de Rothschild, mentionnant la référence du compte ouvert auprès de cette banque et détaillant les mouvements sur ce compte et le solde des sommes y figurant au 31 décembre 2009 et au 31 décembre 2010, ainsi qu'un formulaire fiscal intitulé " Relevé d'opérations pour établissement de la déclaration des revenus encaissés à l'étranger 2010 " indiquant également le numéro du compte. Dans ces conditions, et alors même que ces documents ne comportaient pas la mention explicite de la nature et de l'usage du compte, visée à l'article 344 B de l'annexe III au code général des impôts, les requérants ne peuvent être regardés comme entrant dans le champ des dispositions précitées du IV de l'article 1736 du code général des impôts. Par suite, c'est à tort que l'administration a infligé l'amende contestée à M. et Mme D...au titre de l'année considérée.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande en tant qu'elle portait sur l'amende d'un montant de 1 500 euros mise à leur charge au titre de l'année 2010.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 750 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : M. et Mme D...sont déchargés de l'amende de 1 500 euros mise à leur charge au titre de l'année 2010.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 19 mai 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme D...une somme de 750 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 15BX02445