Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2013 par lequel la directrice de l'agence régionale de santé (ARS) Océan Indien a autorisé la SELARL Pharmacie Ylang Ylang à transférer son officine de pharmacie du 38 rue des Bons enfants au 149 bis avenue François Mitterrand à Saint-Pierre, ainsi que la décision rejetant implicitement le recours hiérarchique formé contre cette décision.
Par un jugement n° 1400311 du 25 mars 2016, le tribunal administratif de La Réunion a annulé cet arrêté du 7 octobre 2013 ainsi que le rejet implicite du recours hiérarchique.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 29 juin 2016 et un mémoire enregistré le 20 octobre 2016 sous le n° 16BX02123, la SELARL Pharmacie Ylang Ylang, représentée par la SCP Belot Cregut Hameroux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1400311 du 25 mars 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par le syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion devant le tribunal administratif ;
3°) de condamner ce syndicat à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il n'est pas justifié que Mme A...B..., présentée comme présidente de séance dans le PV de la réunion du conseil d'administration du syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion du 4 mars 2014 décidant de saisir le tribunal administratif, serait la présidente de ce syndicat, ni qu'elle aurait été régulièrement désignée comme présidente, ni qu'elle aurait été régulièrement habilitée à représenter ce syndicat en justice ; il n'est pas davantage justifié que le conseil d'administration aurait été régulièrement convoqué et que le quorum était réuni ;
- eu égard à son objet tel que défini par ses statuts, le syndicat ne démontre pas son intérêt à agir ;
- le mémoire en défense présenté par le syndicat est irrecevable à défaut de justification de l'habilitation donné par le syndicat à son exécutif ;
- s'agissant, comme en l'espèce, d'une demande de transfert d'officine présentée par une société d'exercice libéral, la production des pièces visées au b) du 1° du II de l'article 1er de l'arrêté du 21 mars 2000 n'était pas requise, de sorte que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu le moyen tiré de l'incomplétude du dossier ;
- l'annulation par la cour de l'autorisation de transfert délivrée le 4 décembre 2007 a entraîné la radiation à compter du 10 septembre 2013 de M. D...et de la SELARL Pharmacie Ylang Ylang du tableau de l'ordre des pharmaciens ; empêcher l'exploitant de l'officine de présenter une nouvelle demande de transfert après cette annulation revient à rendre impossible toute délivrance d'une autorisation.
Par des mémoires enregistrés les 30 septembre et 28 octobre 2016, le syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion demande à la cour de rejeter la requête et de condamner la SELARL Pharmacie Ylang Ylang à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------
II. Par une requête enregistrée le 29 juin 2016 et un mémoire enregistré le 20 octobre 2016 sous le n° 16BX02124, la SELARL " Pharmacie Ylang Ylang " demande à la cour, sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement susvisé du tribunal administratif de La Réunion et de mettre à la charge du syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion (SPIR), dans le dernier état de ses écritures, la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du même code.
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;
- l'arrêté ministériel modifié du 21 mars 2000 fixant la liste des pièces justificatives devant être jointes à une demande de création, de transfert ou de regroupement d'officines de pharmacie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Aymard de Malafosse,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant le syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 4 décembre 2007, le préfet de La Réunion a autorisé le transfert de l'officine de pharmacie exploitée au 38 rue des Bons enfants à Saint-Pierre sous l'enseigne " pharmacie Ylang Ylang " par la Selarl " Pharmacie des Alizés " dans un local situé au 149 bis avenue François Mitterrand dans la même commune. Par un arrêt n° 12BX00443 du 28 juin 2013, la présente cour a annulé ce dernier arrêté. Le 5 juillet 2013, M. D...agissant au nom de la SELARL Pharmacie Ylang Ylang a déposé une nouvelle demande de transfert de l'officine vers le 149 bis avenue François Mitterrand. Par une décision du 7 octobre 2013, la directrice générale de l'agence régionale de santé Océan indien a fait droit à cette demande. Le syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion (SPIR) a demandé au tribunal administratif de La Réunion l'annulation de cette autorisation de transfert du 7 octobre 2013, ainsi que de la décision implicite rejetant son recours hiérarchique dirigé contre cette décision. Postérieurement à l'enregistrement de cette requête, sur renvoi après cassation par le Conseil d'Etat de l'arrêt du 28 juin 2013, la présente cour a, par un arrêt n° 15BX00005 du 9 juin 2015, annulé l'arrêté du 4 décembre 2007 en se fondant sur le caractère incomplet du dossier de demande en l'absence d'attestation de non-opposition à la déclaration préalable de travaux. La SELARL Pharmacie Ylang Ylang a fait appel, par la requête enregistrée sous le n° 16BX02123, du jugement par lequel le tribunal administratif de La Réunion a fait droit à la demande du SPIR et a annulé la décision du 7 octobre 2013, ensemble la décision implicite de rejet du ministre des affaires sociales et de la santé. Par une requête enregistrée sous le n° 16BX02124, la SELARL Pharmacie Ylang Ylang demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. Il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par un même arrêt.
Sur la requête n° 16BX02123 :
En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées par la SELARL Pharmacie Ylang Ylang :
2. Le syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion, qui a pour objet, selon ses statuts, de " procéder à l'étude et à la défense des intérêts économiques, matériels et moraux de la profession de pharmacien d'officine du département de La Réunion ", justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour contester une autorisation de transfert concernant, comme en l'espèce, une officine de pharmacie située dans ce département. La première fin de non-recevoir opposée par la SELARL Pharmacie Ylang Ylang à la demande de première instance doit ainsi être écartée.
3. En l'absence, dans les statuts d'une association ou d'un syndicat, de stipulation réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif, celle-ci est régulièrement engagée par l'organe tenant des mêmes statuts le pouvoir de représenter en justice cette association ou ce syndicat.
4. Aux termes de l'article 13 des statuts du syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion : " Le Président (...) représente le syndicat vis-à-vis des tiers, des autorités et en justice ". Aucune autre stipulation ne réserve à un autre organe le pouvoir de décider d'engager une action en justice au nom du syndicat. Ainsi, le président de ce syndicat avait qualité pour former, au nom de ce dernier, un recours pour excès de pouvoir contre l'autorisation litigieuse du 7 octobre 2013, de sorte que la SELARL Pharmacie Ylang Ylang ne peut, en tout état de cause, utilement contester la régularité de la délibération du conseil d'administration du 4 mars 2014 décidant l'introduction d'un recours pour excès de pouvoir contre cette autorisation. Si la SELARL Pharmacie Ylang Ylang fait valoir qu'il n'est pas justifié que Mme A...B..., signataire de la requête introduite devant le tribunal administratif, avait bien la qualité de présidente, le syndicat a produit la délibération de son conseil d'administration du 3 juin 2013 justifiant de l'élection de Mme A...B...en qualité de présidente. La production de cette délibération suffit à justifier la qualité pour agir de cette dernière, sans que la SELARL Pharmacie Ylang Ylang puisse utilement faire valoir que son élection serait intervenue en méconnaissance des règles fixées par les statuts du syndicat. La seconde fin de non-recevoir opposée par la SELARL Pharmacie Ylang Ylang à la demande de première instance doit ainsi être, elle aussi, écartée.
5. Enfin, dès lors que, ainsi qu'il a été dit, le président du syndicat a, en vertu des statuts, qualité pour le représenter en justice, le mémoire en défense qui a été présenté devant la cour pour le syndicat représenté par son président n'est pas entaché d'irrecevabilité.
En ce qui concerne le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de demande :
6. Aux termes de l'article R. 5125-1 du code de la santé publique : " L'autorisation de création ou de transfert d'une officine de pharmacie ou de regroupement d'officines, sauf pour celles mentionnées à l'article L. 5125-19, est demandée au directeur général de l'agence régionale de santé où l'exploitation est envisagée par la personne responsable du projet, ou son représentant s'il s'agit d'une personne morale. (...) / La liste des pièces justificatives correspondantes est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé. ". L'article 2 de l'arrêté du 21 mars 2000 fixant la liste des pièces justificatives devant être jointes à une demande de création, de transfert ou de regroupement d'officines de pharmacie dispose que : " Le dossier joint à toute demande de transfert ou de regroupement d'officines de pharmacie comporte les documents mentionnés au II de l'article 1er du présent arrêté (...) ". Le b) du 1° du II de l'article 1er du même arrêté précise que : " Pour toute demande de création d'officine de pharmacie, le dossier prévu à l'article R. 5089-1 du code de la santé publique comporte : (...) / Les éléments suivants : (...) / (...) lorsqu'il est envisagé d'exploiter l'officine sous forme de société d'exercice libéral, tout élément permettant de vérifier que les associés, qu'ils exercent ou non au sein de l'officine, remplissent les conditions prévues par les articles 5 et 6 de la loi du 31 décembre 1999 susvisée ". En vertu des articles 5 et 6 de la loi du 31 décembre 1999 auxquels il est ainsi renvoyé, plus de la moitié du capital social et plus de la moitié des droits de vote d'une société constituée pour l'exercice de la profession de pharmacien doivent être détenues par des pharmaciens en exercice au sein de la société, sauf dérogations prévues au 2° du I de l'article 6.
7. Contrairement à ce que soutient la SELARL Pharmacie Ylang Ylang, il résulte des dispositions précitées que l'obligation de verser au dossier les éléments permettant de vérifier si la société satisfait aux conditions prévues par les articles 5 et 6 de la loi du 31 décembre 1999 trouve à s'appliquer non seulement en cas de création d'officine, mais aussi en cas de transfert.
8. Si la SELARL Pharmacie Ylang Ylang soutient que son capital est détenu, pour moitié, par Mme C...qui a la qualité de pharmacienne, ni l'extrait K-bis joint à la demande d'autorisation de transfert ni aucune autre pièce jointe à cette demande n'était de nature à justifier de cette qualité, ni, de manière générale, de ce que la société remplissait les conditions fixées aux articles 5 et 6 de la loi du 31 décembre 1999. Dès lors, le dossier de demande était incomplet.
9. Cette incomplétude du dossier, qui affecte la légalité interne de l'autorisation de transfert litigieuse, justifie l'annulation qui en a été prononcée par les premiers juges. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner le second motif d'illégalité retenu par ces derniers, la SELARL Pharmacie Ylang Ylang n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision du 7 octobre 2013, ensemble la décision implicite de rejet du ministre des affaires sociales et de la santé.
Sur le recours n° 16BX02124 :
10. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 25 mars 2016, les conclusions du recours n° 16BX02124 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement sont devenues sans objet.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Le syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées à son encontre sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SELARL " Pharmacie Ylang Ylang ", au titre de ces mêmes dispositions, le versement à ce syndicat de la somme de 1 500 euros.
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 16BX02123 de la SELARL " Pharmacie Ylang Ylang " est rejetée.
Article 2 : La SELARL " Pharmacie Ylang Ylang " versera la somme de 1 500 euros au syndicat des pharmaciens indépendants de La Réunion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du recours n° 16BX002124 à fin de sursis à exécution.
6
N°s 16BX02123, 16BX02124