Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner La Poste à lui verser la somme totale de 505 400 euros en réparation des préjudices subis du fait du harcèlement moral et de la maladie imputable au service dont il a été victime.
Par un jugement n° 1301100 du 5 mars 2015, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 août 2015, M. B...A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 5 mars 2015 ;
2°) de reconnaître sa maladie professionnelle comme imputable au service ;
3°) de condamner La Poste à lui verser la somme de 475 400 euro au titre de ses préjudices directs et la somme de 30 000 euros au titre de ses préjudices par ricochet ;
4°) de déclarer le jugement commun à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion ;
5°) de mettre à la charge de La Poste, outre les entiers dépens comprenant le coût de l'expertise, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa demande de première instance était bien recevable, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, dès lors qu'il avait, par une lettre du 30 mars 2011, sollicité l'indemnisation de son préjudice et l'imputabilité de sa maladie au service ; en outre, le contentieux pouvant être lié en cours d'instance, une nouvelle demande indemnitaire préalable a été adressée à l'administration ;
- sa maladie, à savoir un syndrome dépressif sévère, doit être reconnue comme imputable au service ; tous les examens médicaux et psychologiques qu'il produit vont dans le sens d'une telle imputabilité ;
- il est donc bien fondé à demander à être indemnisé de ses préjudices ; il réclame 475 400 euros au titre de ses préjudices directs et 30 000 euros concernant ses préjudices indirects.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2016, La Poste, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le jugement est régulier ;
- le recours est irrecevable faute de demande indemnitaire préalable ;
- à titre subsidiaire, les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté par la caisse générale de sécurité sociale de La réunion a été enregistré le 3 novembre 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant La Poste.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...A..., fonctionnaire de La Poste depuis 1987, exerçant en dernier lieu ses fonctions à La Réunion, souffrant d'un état dépressif reconnu comme sévère, a été, à compter de septembre 2009, placé en congé de longue maladie, renouvelé plusieurs fois après avis du comité médical. Par un courrier du 2 mars 2010 adressé au directeur des ressources humaines de La Poste, il a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie, reconnaissance qui ne lui a pas été accordée par l'administration. Il fait appel du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 5 mars 2015, qui a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison des agissements de ses supérieurs hiérarchiques qui ont directement conduit, selon lui, à la dégradation de son état de santé.
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision (...) ".
3. Pour rejeter comme irrecevable la demande indemnitaire présentée par M.A..., le tribunal administratif, se saisissant de la fin de non-recevoir opposée à titre principal en défense par La Poste, a relevé qu'il ne résultait pas de l'instruction que sa demande au fond ait été précédée d'une demande ayant le même objet directement adressée à La Poste, ni que le contentieux ait été lié en cours d'instance.
4. Si aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date où il n'avait présenté aucune demande en ce sens devant l'administration lorsqu'il a formé, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, et ce quelles que soient les conclusions du mémoire en défense de l'administration, en revanche, une telle fin de non-recevoir peut être opposée lorsque, à la date à laquelle le juge statue, le requérant s'est borné à l'informer qu'il avait saisi l'administration d'une demande mais qu'aucune décision de l'administration, ni explicite ni implicite, n'était encore née.
5. En appel, M. A...fait valoir, d'une part, que son avocat a, le 6 mars 2011, adressé à La Poste une lettre recommandée avec accusé de réception qui a lié le contentieux. Si M. A...produit effectivement l'accusé de réception de ce courrier, reçu par l'administration le 29 mars 2011, il résulte cependant des termes dudit courrier que celui-ci ne contenait aucune demande indemnitaire et se bornait à dénoncer les faits de harcèlement moral dont le requérant dit avoir été victime et à rappeler la législation applicable à cet égard. D'autre part, si M. A...fait valoir qu'il est toujours possible de régulariser l'absence de liaison préalable du contentieux en cours d'instance, il se borne à mentionner qu' " une nouvelle demande indemnitaire préalable a été adressée à l'administration ", sans même en donner la date et sans l'établir ni par la production de ladite demande ni de la notification qui en aurait été faite à La Poste. Au surplus, l'administration a toujours opposé à M.A..., à titre principal, en première instance, comme en appel, l'irrecevabilité pour défaut de liaison du contentieux. Dans ces conditions, M. A...ne démontre pas que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire comme irrecevable.
6. En second lieu, à supposer qu'en appel, M. A...ait entendu demander l'annulation de la décision par laquelle l'imputabilité au service lui a été refusée, une telle conclusion serait, en tout état de cause, également irrecevable, dès lors, d'une part, qu'il n'a présenté en première instance que des conclusions indemnitaires et, d'autre part, qu'il n'invoque aucune décision précise.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué (ou à se plaindre ''), le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... sur ce fondement. Il n'y a pas non plus lieu de condamner La Poste aux dépens ni de réformer l'article 2 du jugement ayant mis à la charge de M. A...les frais d'expertise, ni de mettre à la charge de M. A... la somme que demande La Poste sur le fondement de l'article L. 761-1 précité.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...et les conclusions présentées par La Poste sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à La Poste et à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Antoine Bec, président-assesseur,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 5 décembre 2016.
Le rapporteur,
Florence Rey-GabriacLe président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 15BX01329