La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/10/2016 | FRANCE | N°14BX02874

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 24 octobre 2016, 14BX02874


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Mayotte de condamner l'université de Bretagne Occidentale à lui verser, avec intérêts au taux légal et sous astreinte, la somme de 1 363,36 euros au titre de la première fraction d'indemnité d'éloignement, celle de 1 998,92 euros au titre de la seconde fraction de l'indemnité d'éloignement, et a contesté l'application sur les sommes dues au titre des deux fractions de l'indemnité d'éloignement, d'un taux de cotisations sociales de 1 %, soit les sommes

de 293,45 euros pour la première fraction, et de 314,49 euros pour la secon...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Mayotte de condamner l'université de Bretagne Occidentale à lui verser, avec intérêts au taux légal et sous astreinte, la somme de 1 363,36 euros au titre de la première fraction d'indemnité d'éloignement, celle de 1 998,92 euros au titre de la seconde fraction de l'indemnité d'éloignement, et a contesté l'application sur les sommes dues au titre des deux fractions de l'indemnité d'éloignement, d'un taux de cotisations sociales de 1 %, soit les sommes de 293,45 euros pour la première fraction, et de 314,49 euros pour la seconde fraction.

Par un jugement n° 1200649 du 10 juillet 2014, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 octobre 2014 et par un mémoire, enregistré le 29 février 2016, Mme B...C..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200649 du 10 juillet 2014 du tribunal administratif de Mayotte ;

2°) de condamner l'université de Bretagne Occidentale à lui verser la somme de 3 362,28 euros portant intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable, ces intérêts étant eux-mêmes capitalisés à compter de la date anniversaire de cet événement ;

3°) de mettre à la charge de l'université de Bretagne Occidentale la somme de 2 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le mémoire en défense du 4 juin 2014, de l'université de Bretagne Occidentale ne lui a été communiqué que le 6 juin 2014, alors que l'audience a eu lieu le 10 juin et que par ailleurs le tribunal a omis de répondre à son moyen tiré de la rupture d'égalité de traitement ;

- en excluant la prise en compte de la nouvelle bonification indiciaire dans la base de calcul de l'indemnité d'éloignement, le tribunal administratif de Mayotte a commis une erreur de droit ;

- le refus qui lui a été opposé est entaché de rupture d'égalité de traitement, dans la mesure où d'autres universités ont fait bénéficier leurs agents de l'intégration de la nouvelle bonification indiciaire pour le calcul de l'indemnité d'éloignement ;

- le tribunal administratif de Mayotte a estimé, en dénaturant les pièces du dossier, qu'elle n'apportait pas d'éléments suffisants à l'appui de sa contestation du niveau de cotisations sociales qui lui était appliqué, alors que la cotisation de 1 % est illégale pour appliquer un texte relatif aux collectivités d'outre-mer ce qui n'est pas le cas de Mayotte qui est un département d'outre-mer, et, en appliquant, à la différence d'autres universités, les règles en vigueur dans l'administration d'origine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2015, l'université de Bretagne Occidentale, représentée par le cabinet Coudray, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme C...en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les conclusions de la requête fondées sur la rupture de l'égalité de traitement invoquée en appel, alors que la responsabilité pour faute était seule invoquée en première instance, sont irrecevables ;

- la requérante ne précise pas lequel des mémoires en défense ne lui a pas été communiqué et ne peut donc invoquer l'irrégularité du jugement ;

- le Conseil d'Etat a expressément jugé que la nouvelle bonification indiciaire ne devait pas être prise en compte pour le calcul de l'indemnité d'éloignement ;

- la requérante n'établit nullement que d'autres fonctionnaires bénéficient de la prise en compte de la nouvelle bonification indiciaire.

Par un courrier du 23 juin 2016, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaitre de la contestation de Mme C...relative au taux de cotisations sociales appliquées sur les deux fractions de l'indemnité d'éloignement.

Par un mémoire enregistré le 22 juillet 2016 de Mme C...a répondu au courrier du 23 juin 2016.

Par un mémoire enregistré le 1er septembre 2016 l'université Bretagne Occidentale a répondu au courrier du 23 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 50-772 du 30 juin 1950 ;

- le décret n° 93-522 du 26 mars 1993 ;

- le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 ;

- le décret n° 2013-965 du 28 octobre 2013 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Bentolila,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant MmeC....

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., attachée principale d'administration de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, affectée au vice-rectorat de Mayotte à compter du 1er septembre 2011 après avoir exercé ses fonctions à l'université de Bretagne Occidentale, a contesté les modalités de liquidation des deux fractions de l'indemnité d'éloignement qui lui ont été versées à raison de son affectation à Mayotte. Estimant que la nouvelle bonification indiciaire (NBI) devait être prise en compte pour le calcul de son indemnité d'éloignement et que lui restaient, ainsi, dues les sommes de 1 363,36 euros au titre de la première fraction et de 1 998,92 euros au titre de la seconde fraction de cette indemnité, elle a demandé au tribunal administratif de Mayotte de condamner l'université de Bretagne Occidentale à lui verser, en principal, une indemnité correspondant à ces sommes. Elle a par ailleurs contesté l'application sur les sommes versées au titre des deux fractions de l'indemnité d'éloignement du taux de cotisations sociales de 1 % ayant pour effet selon elle, une différence à son détriment de 293,45 euros pour la première fraction de l'indemnité d'éloignement, et de 314,49 euros pour la seconde fraction de l'indemnité d'éloignement. Mme C...relève appel du jugement n° 1200649 du 10 juillet 2014 du tribunal administratif de Mayotte, qui a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, MmeC..., compte tenu de ce que les textes relatifs à la détermination de la base de calcul de l'indemnité d'éloignement, placent l'administration en situation de compétence liée, ne pouvait pas utilement invoquer devant le tribunal administratif la circonstance, que des fonctionnaires appartenant au même corps et placés dans une situation comparable à la sienne auraient bénéficié du versement d'une indemnité d'éloignement dont le montant aurait été déterminé en tenant compte de la nouvelle bonification indiciaire. Le tribunal administratif de Mayotte a donc pu s'abstenir, sans entacher son jugement d'irrégularité, de statuer sur le moyen tiré de cette atteinte alléguée au principe d'égalité, qui était inopérant. En deuxième lieu, le mémoire en défense de l'université de Bretagne Occidentale, enregistré le 4 juin 2014 au greffe du tribunal, se bornait à réitérer des observations, notamment relatives au prélèvement de cotisations sociales, déjà présentées dans les deux précédents mémoires en défense et auxquelles Mme C...avait pu répondre notamment par son mémoire enregistré le 11 avril 2014. Il ne contenait donc pas d'éléments nouveaux pour la solution du litige. Dès lors, l'article R.611-1 du code de justice administrative n'imposait pas sa communication. Dans ces conditions, la circonstance que la communication de ce mémoire a été faite le 6 juin 2014 à Mme C...alors que la date de l'audience était fixée au 10 juin 2014, n'a pas davantage affecté la régularité du jugement.

3. En revanche, en troisième lieu, c'est à tort que le tribunal a statué sur les conclusions de Mme C...tendant à la contestation de l'application sur les sommes versées au titre des deux fractions de l'indemnité d'éloignement du taux de cotisations sociales de 1 %. En effet, les articles L. 142-1 à L.142-3 du code de la sécurité sociale attribuent compétence au tribunal des affaires de sécurité sociale pour connaître des "litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale". Le critère de la compétence des organismes du contentieux de la sécurité sociale est lié, non à la qualité des personnes en cause, mais à la nature même du différend. C'est donc à tort que le tribunal administratif de Mayotte n'a pas rejeté sur ce point pour incompétence de la juridiction administrative les conclusions de la demande qui ne se fondaient pas sur une faute commise par la personne publique mais sur l'applicabilité du taux de cotisations sociales de 1 % sur les sommes dues à Mme C...au titre de l'indemnité d'éloignement. Il convient d'annuler à cet égard le jugement attaqué, de statuer par voie d'évocation sur la demande de Mme C...et de rejeter les conclusions tendant à la contestation de l'application sur les sommes versées au titre des deux fractions de l'indemnité d'éloignement du taux de cotisations sociales de 1 %, comme étant portées devant une juridiction incompétente pour en connaitre.

Sur le surplus des conclusions de la requête :

4. L'article 4 du décret du 26 mars 1993 relatif aux conditions de mise en oeuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique de l'Etat prévoit que la nouvelle bonification indiciaire s'ajoute au traitement indiciaire de l'agent pour le calcul des différentes primes ou indemnités fixées en pourcentage du traitement indiciaire de l'agent et, le cas échéant, pour le calcul des majorations accordées aux agents en service outre-mer. En vertu de l'article 3 du décret du 27 novembre 1996 relatif à l'attribution de l'indemnité d'éloignement aux magistrats et aux fonctionnaires titulaires et stagiaires de l'Etat, alors applicable à ces fonctionnaires et magistrats en service à Mayotte, l'agent qui reçoit une affectation pour aller servir à Mayotte a droit à une fraction d'indemnité égale à onze mois et quinze jours du traitement indiciaire net qu'il perçoit à l'échéance de la fraction d'indemnité.

5. L'indemnité d'éloignement, eu égard à son caractère exceptionnel, n'est pas de celles, fixées en pourcentage du traitement, et versées de façon régulière, en relation avec ledit traitement, pour le calcul desquelles, en application de l'article 3 du décret du 27 novembre 1996, la nouvelle bonification indiciaire s'ajoute au traitement indiciaire. Ainsi, MmeC..., n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif de Mayotte aurait fait une inexacte application, en ajoutant des conditions non prévues par les dispositions réglementaires mentionnées au point 4, en jugeant que le montant des deux fractions de son indemnité d'éloignement devait être déterminé sans ajouter la nouvelle bonification indiciaire à son traitement indiciaire.

6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée en défense, Mme C...n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 10 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande afférente à l'absence de prise en compte de la nouvelle bonification indiciaire pour le calcul de l'indemnité d'éloignement.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. L'article L. 761-1 du code de justice administrative fait obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme C...tendant à son application. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner, en application de cet article, Mme C...à verser une somme quelconque à l'université de Bretagne Occidentale au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1200649 du tribunal administratif de Mayotte du 10 juillet 2014 est annulé en tant qu'il n'a pas rejeté comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaitre, les conclusions présentées par Mme C...relatives à l'application du taux de cotisations sociales de 1 %, sur les sommes dues au titre des deux fractions de l'indemnité d'éloignement.

Article 2 : Les conclusions de la demande de Mme C...relatives à l'application du taux de cotisations sociales de 1%, sur les sommes dues au titre des deux fractions de l'indemnité d'éloignement sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaitre.

Article 3 : Le surplus de la requête de Mme C...est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de l'université de Bretagne Occidentale tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C..., à l'université de Bretagne Occidentale et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, premier conseiller,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller

Lu en audience publique, le 24 octobre 2016

Le rapporteur,

Pierre BentolilaLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

''

''

''

''

2

N° 14BX02874


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX02874
Date de la décision : 24/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

46-01-09-06-04 Outre-mer. Droit applicable. Droit applicable aux fonctionnaires servant outre-mer. Rémunération. Indemnité d'éloignement des fonctionnaires servant outre-mer.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP ARVIS et KOMLY NALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-24;14bx02874 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award