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24/10/2016 | FRANCE | N°14BX00676

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 24 octobre 2016, 14BX00676


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Villegouge a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, de condamner la société CNP Assurances à lui verser la somme de 23 253,43 euros à parfaire, en exécution du contrat d'assurance " risques statutaires " souscrit pour l'année 2009 avec cet organisme, en remboursement des indemnités versées à son agent, MmeB..., assortie des intérêts de droit, à titre subsidiaire, de condamner Groupama Centre Atlantique à lui verser cette somme sur le fondement du contrat d'ass

urance " risques statutaires " souscrit pour l'année 2010 avec cet organisme,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Villegouge a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, de condamner la société CNP Assurances à lui verser la somme de 23 253,43 euros à parfaire, en exécution du contrat d'assurance " risques statutaires " souscrit pour l'année 2009 avec cet organisme, en remboursement des indemnités versées à son agent, MmeB..., assortie des intérêts de droit, à titre subsidiaire, de condamner Groupama Centre Atlantique à lui verser cette somme sur le fondement du contrat d'assurance " risques statutaires " souscrit pour l'année 2010 avec cet organisme, et d'ordonner si nécessaire une mesure d'expertise afin de déterminer si l'arrêt de travail en litige constitue une rechute et, dans cette hypothèse, d'appeler Mme B...en déclaration de jugement commun.

Par un jugement n° 1200917 du 26 décembre 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête de la commune de Villegouge.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 février et le 3 octobre 2014, la commune de Villegouge, représentée par la MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 décembre 2013 ;

2°) à titre principal, de condamner la société CNP Assurances à lui verser la somme de 36 425,95 euros, montant de la créance arrêté au 5 avril 2013 correspondant aux indemnités versées à son agent, MmeB..., assortie des intérêts de droit à compter du 14 mars 2012, avec capitalisation des intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la société Groupama Centre Atlantique à lui verser la somme de 40 000,78 euros, correspondant, d'une part, aux indemnités versées à Mme B...jusqu'au 6 avril 2013 et, d'autre part, au traitement perçu depuis cette date jusqu'à sa mise à la retraite le 28 août 2013, assortie des intérêts de droit à compter du 14 mars 2012, avec capitalisation des intérêts ;

4°) à titre encore plus subsidiaire, d'ordonner une expertise, menée contradictoirement avec MmeB..., afin de rechercher si la pathologie survenue en 2010 peut être qualifiée de rechute de celle survenue en 2008/2009 ;

5°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les frais d'expertise et les entiers dépens.

Elle soutient que :

- le tribunal ne pouvait rejeter la garantie des deux assureurs ; l'un des deux doit nécessairement sa garantie ;

A titre principal, s'agissant de la garantie CNP :

- sinistre en cause était bien couvert par le contrat ; l'expertise diligentée à la demande de Groupama conclut clairement à une rechute, de la part de MmeB..., en 2010 ; il s'agit ainsi d'une rechute au sens de l'article 29-2 du contrat CNP, ce qui oblige cette dernière à fournir sa garantie ;

- compter du 6 avril 2010, Mme B...était en congé longue maladie et non en congé ordinaire, et il s'agissait d'une rechute ;

- le risque encouru par l'assureur est connu et évaluable, puisqu'il s'agit d'un risque découlant des dispositions statutaires fixant la durée des prestations auxquelles l'agent a droit ;

- CNP Assurances doit donc exécuter le contrat conclu avec la commune en lui remboursant l'intégralité des indemnités versées à MmeB... ;

A titre subsidiaire, s'agissant de la garantie Groupama :

- ce contrat a pris effet le 1er janvier 2010 et Mme B...a été placée en arrêt de travail pour longue maladie le 6 avril 2010 ; cet arrêt de travail entre ainsi dans le champ d'application de l'article 1 du contrat ;

- l'avis de l'expert mandaté par Groupama, qui a estimé qu'il n'agissait d'une rechute, est évidemment sujet à caution, raison pour laquelle elle sollicite depuis le début une expertise médicale ; en effet, elle n'a pas accès au dossier médical de son agent et ne peut se prononcer sur une quelconque question d'ordre médical ;

- le tribunal ne peut à la fois considérer que la pathologie de 2010 ne constitue pas une rechute pour écarter l'application de la garantie CNP et, d'autre part, que la cette même pathologie est liée à une pathologie précédente pour écarter la garantie Groupama ; si la pathologie de 2010 constitue une rechute, alors la CNP doit prendre en charge le sinistre ; inversement, s'il s'agit d'une pathologie nouvelle, alors Groupama doit la prendre en charge ;

- en réalité, la solution dépend exclusivement de la réponse à la qualification médicale de " rechute " et non à celle de la qualification juridique du congé ; pour cette raison, elle reste convaincue de l'utilité d'une expertise médicale, elle-même n'étant pas médicalement compétente pour le déterminer ;

S'agissant du montant dû à la commune :

- elle en a toujours justifié, versant aux débats les états récapitulatifs justifiant sa créance ; son montant n'a cessé d'augmenter, pour s'établir à 36 425,95 euros comme arrêté au 5 avril 2013, s'ils lui sont payés par CNP, ou à 40 000, 78 euros comme arrêté au 28 février 2014 s'ils lui sont payés par Groupama.

S'agissant de sa demande d'expertise :

- en réalité, la solution dépend exclusivement de la réponse à la qualification médicale de " rechute " et non à celle de la qualification juridique du congé ; pour cette raison, elle reste convaincue de l'utilité d'une expertise médicale, elle-même n'étant pas médicalement compétente pour déterminer si la pathologie de 2010 doit ou non être qualifiée de " rechute " ;

- une expertise doit donc être ordonnée pour déterminer s'il y a ou non un lien de causalité entre les arrêts de travail de Mme B...en 2008/2009 avec celui du 6 avril 2010 ;

- pour qu'une telle expertise soit ordonnée, il est nécessaire que la procédure soit contradictoire avec MmeB..., raison pour laquelle elle l'avait appelée en déclaration de jugement commun devant le tribunal administratif.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 mai et le 25 juin 2014, la société CNP Assurances, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête en ce qu'elle est dirigée contre elle et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Villegouge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le sinistre à l'origine du présent litige n'est pas au nombre de ceux couverts par la CNP ;

- l'antériorité des causes du congé de longue maladie de Mme B...survenu au cours de l'année 2010 n'est pas démontrée par la commune ;

- les autres moyens soulevés par la commune de Villegouge ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mai 2014, la société Groupama Centre Atlantique, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête en ce qu'elle est dirigée contre elle et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Villegouge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la pathologie de Mme B...est antérieure à la souscription du contrat ;

- il appartient à l'assureur qui garantissait la commune au moment où la pathologie est apparue de garantir le sinistre ;

- les autres moyens soulevés par la commune de Villegouge ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant la commune de Villegouge, et de Me A..., représentant la CNP Assurances.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., agent de la commune de Villegouge (Gironde), a été placée en congé de maladie ordinaire pour la période du 28 octobre 2008 au 30 août 2009. La commune a été indemnisée au titre de ces arrêts de travail par la société CNP Assurances, avec laquelle elle avait conclu un contrat d'assurance destiné à garantir le remboursement des indemnités statutaires qu'elle pourrait être amenée à verser à ses agents pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2009. Mme B...a à nouveau été placée en arrêt maladie à compter du 6 avril 2010, mais la société Groupama Centra Atlantique, assureur de la commune depuis le 1er janvier 2010, a refusé de prendre en charge ce congé maladie, au motif qu'il s'agissait d'une rechute du précédent arrêt maladie. La commune s'est alors tournée vers la société CNP Assurances, qui a refusé de la garantir au motif que la date de départ de l'arrêt de travail était postérieure à la fin du contrat. La commune de Villegouge fait appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 décembre 2013, qui a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la condamnation de la société CNP Assurances à lui rembourser les indemnités versées à MmeB..., à titre subsidiaire, la condamnation de la société Groupama Centre Atlantique aux mêmes fins, et à titre infiniment subsidiaire, qu'il soit ordonné une expertise afin de déterminer si l'arrêt de travail de 2010 constituait une rechute. Devant la cour, la commune réitère les mêmes conclusions en chiffrant sa demande indemnitaire à 36 425,95 euros en direction de la société CNP Assurances et à 40 000,78 euros en direction de la société Groupama Centre Atlantique.

Sur les conclusions dirigées contre la société CNP Assurances :

2. D'une part, l'article 29.1 des conditions générales du contrat conclu entre la commune de Villegouge et la société CNP Assurances stipule que : " Seules les garanties congé longue maladie, congé longue durée, accident ou maladie imputable au service et maladies professionnelles peuvent donner lieu à rechute. / Par rechute, il faut entendre l'aggravation de l'état de santé de l'agent, subite ou naturelle, liée à une affection précédente et sans intervention de cause extérieure (...). Les sinistres liés à un sinistre dont l'origine est survenue en cours d'assurance sont pris en charge même après la résiliation du contrat (...) ".

3. Il est constant que l'arrêt de travail de Mme B...du 28 octobre 2008 au 30 août 2009, pour lequel la commune a été indemnisée par la société CNP Assurances, était un congé de maladie ordinaire. Par suite, en application des stipulations précitées, que Mme B... ait ou non été victime d'une rechute en 2010, la société CNP Assurances était fondée à refuser de rembourser à la commune les indemnités versées à Mme B...lors de l'arrêt de travail intervenu le 6 avril 2010.

4. D'autre part, les principes applicables aux contrats administratifs passés en matière d'assurance impliquent que les prestations liées à la réalisation d'un sinistre survenu pendant la période de validité d'un contrat d'assurance de la nature de celui en litige ne peuvent être remises en cause par la résiliation ultérieure de celui-ci. Par suite, doivent, être réputées non écrites les clauses prévoyant l'interruption des prestations en cours à la date de résiliation du contrat. Ces principes n'impliquent pas, en revanche, que soit réputée non écrite une clause comme celle convenue par les parties à l'article 29.1 des conditions générales du contrat litigieux et selon laquelle les rechutes d'arrêt de travail relevant initialement de la maladie ordinaire intervenues postérieurement à la date de la résiliation du contrat ne sont pas prises en charge par l'assureur. Dès lors, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 29.1 précité ne s'appliqueraient pas à l'arrêt de travail débuté le 6 avril 2010 doit être écarté.

5. Dans ces conditions, le tribunal administratif a, à juste titre, rejeté les conclusions indemnitaires de la commune de Villegouge à l'encontre de la société CNP Assurances.

Sur les conclusions dirigées contre la société Groupama Centre Atlantique :

6. Les stipulations des articles 1.4 des conditions générales et l'article 2 de la garantie " maladie-accident de la vie privée " du contrat conclu entre la commune de Villegouge et la société Groupama Centre Atlantique excluent la pris en charge des " maladies et accidents médicalement constatés qui sont antérieurs à la souscription du contrat " et des " rechutes d'une maladie ou d'un accident dont le premier jour d'arrêt de travail se situe antérieurement à la prise d'effet du contrat ".

7. La société Groupama Centre Atlantique a motivé son refus de prise en charge des indemnités versées par la commune à Mme B...au titre de son arrêt de travail débuté le 6 mai 2010 en se fondant sur les conclusions de l'expertise réalisée, à sa demande, le 14 juin 2010, en présence de MmeB..., et selon lesquelles l'arrêt de travail en cause était en rapport avec son état de santé antérieur. La commune de Villegouge, qui a été informée de la réalisation de cette expertise n'apporte, pas plus en appel qu'en première instance, d'élément de nature à remettre en cause les conclusions de l'expert. Par suite, l'arrêt de travail du 6 mai 2010 ne peut qu'être regardé que comme une rechute liée à une pathologie antérieure à la prise d'effet du contrat et ayant déjà donné lieu à deux interventions chirurgicales. Les premiers juges, qui n'ont à cet égard pas entaché leur jugement d'une contradiction de motifs, ont donc à bon droit considéré que, dans ces conditions, la société Groupama Centre Atlantique était fondée à refuser le remboursement à la commune des indemnités qu'elle a versées à Mme B...à compter du 6 avril 2010.

8. Par voie de conséquence, le tribunal administratif a, à juste titre, rejeté les conclusions indemnitaires de la commune de Villegouge à l'encontre de la société Groupama Centre Atlantique.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que la commune de Villegouge n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Villegouge, ainsi que les conclusions présentées par la société CNP Assurances et par la société Groupama Centre Atlantique sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Villegouge, à la société CNP Assurances et à la société Groupama Centre Atlantique.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Antoine Bec, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 octobre 2016.

Le rapporteur,

Florence Rey-GabriacLe président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de la fonction publique, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

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N° 14BX00676


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00676
Date de la décision : 24/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-01-02-02-04 Marchés et contrats administratifs. Notion de contrat administratif. Nature du contrat. Contrats n'ayant pas un caractère administratif. Contrats ne se rattachant pas à une opération de travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS JOUSSE CAUMETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-24;14bx00676 ?
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