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18/10/2016 | FRANCE | N°16BX01700

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2016, 16BX01700


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 12 avril 2016 notifié le 25 avril 2016 à 15h55 par lequel le préfet de la Creuse l'a assigné à résidence dans la commune de Guéret (Creuse) pour une durée de quarante-cinq jours à compter de sa notification et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 800 euros sur le fondement des articles 37 de la loi 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n

1600575 du 29 avril 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 12 avril 2016 notifié le 25 avril 2016 à 15h55 par lequel le préfet de la Creuse l'a assigné à résidence dans la commune de Guéret (Creuse) pour une durée de quarante-cinq jours à compter de sa notification et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 800 euros sur le fondement des articles 37 de la loi 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600575 du 29 avril 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du préfet de la Creuse en date du 12 avril 2016 et mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 800 euros à MeA..., conseil de M.B..., sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2016, le préfet de la Creuse demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1600575 du 29 avril 2016 ;

2°) de rejeter la demande de M.B....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Elisabeth Jayat a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet de la Creuse relève appel du jugement du 29 avril 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 12 avril 2016 assignant M.B..., de nationalité tunisienne, à résidence dans la commune de Guéret (Creuse) pour une durée de quarante-cinq jours à compter de sa notification et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 800 euros à MeA..., conseil de M.B..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

2. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois " ; qu'aux termes de l'article L. 551-1 de ce code : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré (...) " ;

3. Pour annuler l'arrêté du 12 avril 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges s'est fondé sur le motif que l'arrêté du 5 novembre 2015 pour l'exécution duquel il a été pris ne prononce pas une nouvelle obligation de quitter le territoire français mais se borne à confirmer une mesure d'éloignement antérieure datant du 26 mars 2015, prise plus d'un an auparavant et donc ne pouvant pas justifier légalement l'assignation à résidence de M. B...le 12 avril 2016. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 5 novembre 2015, est intitulé " refus de délivrance d'un titre de séjour " et porte simplement dans son article 2 confirmation de la précédente mesure d'éloignement prise le 26 mars 2015. Toutefois, l'arrêté du 5 novembre 2015 a été pris en réponse à une demande de titre de séjour présentée le 29 septembre 2015 et faisant état de circonstances postérieures au 26 mars 2015. Par ailleurs, il vise expressément le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant d'éloigner les étrangers lorsqu'un titre de séjour leur est refusé et mentionne que M. B...n'entre pas dans les catégories d'étrangers ne pouvant faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Ainsi, cet arrêté comporte une nouvelle mesure d'éloignement qui était susceptible d'exécution forcée le 12 avril 2016. Par suite, c'est à tort que le premier juge s'est fondé sur le motif précédemment énoncé pour annuler l'arrêté du 12 avril 2016.

4. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.B....

5. Par arrêté du 8 juin 2015, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, le préfet de la Creuse a donné à M. Rémi Recio, secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer notamment " tous les arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances, documents " à l'exception de certains actes parmi lesquels ne figurent pas les décisions de refus de titre de séjour et les mesures d'éloignement des étrangers. Une telle délégation qui n'est ni trop générale, ni trop imprécise, donnait légalement compétence à M. Rémi Recio pour signer l'arrêté du 12 avril 2016. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cet arrêté doit être écarté.

6. M. B...soutient que l'arrêté du 12 avril 2016 l'assignant à résidence dans la commune de Guéret est insuffisamment motivé et que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier. Toutefois, l'arrêté du 12 avril 2016 qui vise les textes sur lesquels le préfet s'est fondé pour prendre sa décision, fait également état d'éléments spécifiques à la situation de M. B...et notamment de ce qu'il a fait l'objet les 26 mars et 5 novembre 2015 de deux mesures d'éloignement qu'il n'a pas respectées alors que leur bien-fondé a été confirmé par le tribunal administratif de Limoges et qu'il présente des garanties de représentation effective dès lors que son domicile est connu des services de la préfecture. L'arrêté, qui n'était pas tenu de préciser de manière exhaustive l'ensemble des éléments tenant à la situation de M.B..., est suffisamment motivé en fait au regard des exigences posées par les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. De plus, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté contesté, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Creuse n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M.B....

7. Il ressort des pièces du dossier qu'ainsi qu'il vient d'être dit, M. B...a fait l'objet, les 26 mars et 5 novembre 2015, de deux mesures d'éloignement qu'il n'a pas respectées alors que le tribunal administratif de Limoges a rejeté les recours dirigés contre ces mesures et qu'il présente des garanties de représentation effective dès lors que son domicile est connu des services de la préfecture. Le préfet de la Creuse pouvait donc décider de l'assigner à résidence dès lors qu'il estimait, d'une part, qu'il présentait, en raison de sa domiciliation à Guéret, des garanties propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire dont il était l'objet et, d'autre part, que l'exécution de cette obligation demeurait une perspective raisonnable, sans entacher sa décision d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. L'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France, garantie notamment par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. En se bornant à faire valoir qu' " aucun examen n'a été fait par le préfet à ce titre " sans indiquer les motifs pour lesquels, selon lui, l'assignation à résidence dont il a fait l'objet aurait porté atteinte à la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France, M. B...n'assortit pas son moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Creuse est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 12 avril 2016 assignant M. B...à résidence dans la commune de Guéret (Creuse) pour une durée de quarante-cinq jours à compter de sa notification et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 800 euros à Me A..., conseil de M.B..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 29 avril 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges est annulé.

Article 2 : La demande de M. B...devant le tribunal administratif de Limoges est rejetée.

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No 16BX01700


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01700
Date de la décision : 18/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-04-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Restrictions apportées au séjour. Assignation à résidence.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. KATZ

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-18;16bx01700 ?
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