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05/07/2016 | FRANCE | N°16BX00559

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 05 juillet 2016, 16BX00559


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2015 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1505560 du 30 novembre 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non lieu à statuer sur la demande tendant à l'annulation de la décision plaçant

M. A...en rétention administrative et a annulé l'arrêté attaqué en tant qu'il l'oblige ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2015 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1505560 du 30 novembre 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non lieu à statuer sur la demande tendant à l'annulation de la décision plaçant M. A...en rétention administrative et a annulé l'arrêté attaqué en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination.

Procédure devant la cour :

Par une requête du 8 février 2016, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse du 30 novembre 2015 en tant qu'il a annulé son arrêté du 24 novembre 2015 en tant qu'il oblige M. A... à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Robert Lalauze,

- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant syrien, né le 1er septembre 1991, a été interpellé le 24 novembre 2015 à Calais alors qu'il essayait de se rendre en Angleterre. Par un arrêté du 24 novembre 2015, le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire à destination de tout pays où il établirait être légalement admissible, à l'exclusion de la Syrie et a décidé son maintien en rétention dans les locaux de la direction départementale de la police aux frontières du Pas-de-Calais et de tout autre centre de rétention administrative durant cinq jours à compter de la notification de l'arrêté. A la demande de M. A... le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a, par jugement du 30 novembre 2015, prononcé un non lieu à statuer sur la demande tendant à l'annulation de la décision le plaçant en rétention administrative et a annulé l'arrêté attaqué en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel de ce jugement en tant qu'il annule son arrêté du 24 novembre 2015 en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination.

2. Il ressort du jugement attaqué, et il n'est pas contesté, qu'il a été mis fin à la rétention administrative de M. A... avant la tenue de l'audience. En conséquence, à la date du 30 novembre 2015, à laquelle le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse s'est prononcé les conclusions de M. A...dirigées contre l'arrêté attaqué en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination, relevaient d'une formation collégiale. Ainsi, le jugement attaqué est, sur ce point, entaché d'irrégularité et doit être annulé dans cette mesure.

3. Il y a lieu pour la cour administrative d'appel de se prononcer immédiatement, par voie d'évocation, sur la demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2015 du préfet du Pas-de-Calais en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination.

4. Par un arrêté n° 2015-10-54 du 16 février 2015, publié le même jour au recueil spécial n° 16 des actes administratifs de la préfecture du Pas-de-Calais, la préfète du Pas-de-Calais a donné délégation à M. D... B..., chef de la section éloignement, à l'effet de signer, notamment les décisions relatives aux obligations de quitter le territoire français avec ou sans délai de départ volontaire, les arrêtés fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement et les décisions de placement en rétention administrative. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Il ressort de l'examen de l'arrêté du 24 novembre 2015 qu'il fait état d'éléments spécifiques à la situation de M. A...en France, notamment de ce qu'il est démuni de tout document d'identité ou de voyage en cours de validité et a été interpellé par les services de la police aux frontières du Pas-de-Calais. Cet arrêté expose ainsi les éléments de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour prendre sa décision, laquelle est ainsi suffisamment motivée en fait au regard des exigences posées par la loi du 11 juillet 1979 susvisée. De plus, alors même que M. A... a été interpellé en même temps que d'autres personnes, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des termes de l'arrêté litigieux, que le préfet du Pas-de-Calais ne se serait pas livré à un examen particulier de sa situation.

6. Il ressort des pièces du dossier que M.A..., interpellé le 24 novembre 2015, a, au cours de son audition le même jour par les services de la police judiciaire, a été interrogé et a répondu tant au sujet de son identité, de son pays d'origine et des conditions de son entrée et de son séjour sur le territoire français. A la fin de cette audition il a répondu négativement à la question " Y a-t-il d'autres éléments de votre situation que vous souhaitez porter à la connaissance du préfet ' ". Dans ces conditions, M. A...n'a pas été privé de la possibilité d'être entendu et de présenter ses observations avant l'intervention de la décision l'obligeant à quitter le territoire français. Ainsi le moyen invoqué, tiré de ce que cette décision aurait été prise en violation du droit d'être entendu manque en fait.

7. Ni les dispositions des articles L. 741-2, L.741-4 et L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), ni aucune règle législative ou réglementaire ou principe applicable n'exigent de l'autorité préfectorale qu'elle se prononce sur l'admission au séjour au titre de l'asile d'un étranger qui n'a pas présenté de demande d'asile, avant de prendre à son encontre une décision l'obligeant à quitter le territoire. Il ressort des pièces du dossier qu'avant l'intervention de l'arrêté litigieux, M. A...n'a pas déposé de demande d'asile dans les pays européens qu'il a traversés avant de rejoindre la France et il n'a, au cours de son audition par les services de la police pas manifesté d'intention de solliciter l'asile en France, répondant, ainsi qu'il est dit au point 6, négativement à la question " Y a-t-il d'autres éléments de votre situation que vous souhaitez porter à la connaissance du préfet ' ". Dans ces conditions et alors que M. A...ne détenait aucun document ou titre en cours de validité l'autorisant à y séjourner ou à y circuler, le préfet du Pas-de-Calais pouvait légalement prendre une décision l'obligeant à quitter le territoire français sans se prononcer au préalable sur son admission au séjour au titre de l'asile alors même qu'il est originaire d'un pays exclu de la liste des pays d'origine sûrs. Pour les mêmes motifs doit être écarté le moyen que cette décision serai entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de l'intéressé.

8. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant la décision contestée, le préfet du Pas-de-Calais aurait poursuivi un but autre que ceux en vu desquels le pouvoir de prendre cette décision lui a été conféré par les dispositions législatives relatives à l'entrée et au séjour des étrangers. Par suite, le détournement de pouvoir et de procédure allégué n'est pas établi alors même que d'autres étrangers en situation irrégulière séjournant dans la région de Calais auraient fait l'objet de décisions analogues le même jour.

Sur la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire :

9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 8 que la décision obligeant M. A...à quitter le territoire français n'est pas entachée des illégalités invoquées. Par suite le requérant, n'est pas fondé à se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision pour demander l'annulation de celle refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.

10. La décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M.A..., qui vise les dispositions de l'article L. 511-1 II 3° a) et f) du CESEDA et indique que l'intéressé ne peut justifier être entré régulièrement en France n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et, dépourvu de document d'identité, n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective, présente un risque de se soustraire à l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français. Par suite, ne peut qu'être écarté le moyen que cette décision est insuffisamment motivée.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

11. La décision fixant le pays de renvoi, prise au visa notamment des articles 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du CESEDA, indique que M. A...sera reconduit à destination de tout pays dans lequel il serait légalement admissible et qu'il n'établit pas être personnellement et directement exposé à des peines ou traitements contraires à l'article 3 en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, cette décision, qui comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde est suffisamment motivée.

12. M. A...soutient que la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle exclut son pays d'origine. Cependant, la décision fixe également tout pays où il établirait être légalement admissible comme pays de destination. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée cette décision ne peut qu'être écarté. En outre, cette circonstance ne saurait, contrairement à ce qu'il prétend, priver de base légale l'obligation de quitter le territoire français.

13. M. A...soutient également que la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article L. 513-2 du CESEDA du fait de la généralisation des violences dans l'ensemble de ce pays qui l'ont contraint à le quitter. Toutefois, l'arrêté du 24 novembre 2015 l'obligeant à quitter le territoire français à destination de tout pays où il établirait être légalement admissible, à l'exclusion de la Syrie. Par suite, le moyen tiré des risques qu'il courrait s'il devait retourner dans son pays d'origine est inopérant.

14. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2015 du préfet du Pas-de-Calais en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination.

15. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A...présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse n° 1505560 du 30 novembre 2015 est annulé en tant qu'il annule l'arrêté du 24 novembre 2015 du préfet du Pas-de-Calais en tant qu'il oblige M. A...à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination.

Article 2 : La demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2015 du préfet du Pas-de-Calais en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français sans délai et fixe son pays de destination est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au ministre de l'intérieur et à la préfète du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2016 à laquelle siégeaient :

M. Robert Lalauze, président,

Mme Christine Mège, président-assesseur,

Mme Béatrice Molina-Andréo, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 5 juillet 2016.

Le président-assesseur,

Christine Mège

Le président-rapporteur,

Robert Lalauze

Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

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N° 16BX00559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 16BX00559
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: M. Robert LALAUZE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SEIGNALET MAUHOURAT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-07-05;16bx00559 ?
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