Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Belafont a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 26 novembre 2010 par laquelle la commune de Trélissac a exercé le droit de préemption sur la parcelle lui appartenant située "Les Bois de Maraval", cadastrée AL n° 210.
Par un jugement n° 1303553 du 13 janvier 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à sa demande en annulant la décision susmentionnée.
Procédure devant la cour :
Par une requête, des pièces et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mars 2015, 17 avril 2015 et 11 juin 2015, la commune de Trelissac, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 janvier 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société Belafont devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
3°) de mettre à la charge de la société Belafont une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la SARL Belafont.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite de la réception d'une déclaration d'intention d'aliéner un bien, le maire de Trélissac (Dordogne) a, par une décision du 26 novembre 2010 matérialisée par les renseignements apposés dans le " cadre réservé au titulaire du droit de préemption ", exercé ce droit de préemption sur la parcelle de 3 ares et 60 centiares cadastrée AL n° 210, appartenant à la société à responsabilité limitée (SARL) Belafont et située sur le territoire de la commune au lieu-dit " Les Bois de Maraval ". La commune de Trélissac interjette appel du jugement du 13 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a, sur demande de la société Belafont, annulé cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
2. D'une part, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ".
3. D'autre part, qu'aux termes de l'article R. 213-8 du code de l'urbanisme : " Lorsque l'aliénation est envisagée sous forme de vente de gré à gré ne faisant pas l'objet d'une contrepartie en nature, le titulaire du droit de préemption notifie au propriétaire : a) soit sa décision de renoncer à l'exercice du droit de préemption ; b) soit sa décision d'acquérir aux prix et conditions proposés... ; c) soit son offre d'acquérir à un prix proposé par lui et, à défaut d'acceptation de cette offre, son intention de faire fixer le prix du bien par la juridiction compétente... ".
4. Il est constant que la décision du 26 novembre 2010 par laquelle le maire de Trélissac a exercé le droit de préemption sur la parcelle appartenant à la société Belafont ne comportait pas la mention des voies et délais de recours, en méconnaissance des dispositions précitées. Si la commune fait valoir que cette décision a été notifiée à MeC..., notaire, agissant en qualité de mandataire de la société Belafont, accompagnée d'une lettre comportant la mention des voies et délais, elle ne produit pas ce document. L'attestation du maire du 14 avril 2015 certifiant que la décision en litige était " accompagnée d'un courrier [qu'il a lui]-même signé et par lequel [il] informai[t] le demandeur que cette décision pouvait faire l'objet d'un recours auprès du tribunal administratif de Bordeaux dans les deux mois de sa réception ", ne saurait, compte tenu de la contestation formelle de l'existence de ce courrier d'accompagnement par la société Belafont et de la date d'établissement de l'attestation, valablement faire foi. La circonstance que la société Belafont aurait eu connaissance de cette décision, qui a été produite lors de l'instance engagée devant le tribunal de grande instance de Périgueux à l'initiative de la commune aux fins de régularisation de l'acte de vente conclu, n'est pas de nature à établir que l'exigence de mention des voies et délais de recours aurait été respectée. A défaut d'une telle preuve, la notification de la décision de préemption ne peut être regardée comme ayant fait courir le délai de recours contentieux à l'encontre des propriétaires. Dans ces conditions, la commune de Trélissac n'est pas fondée à soutenir que la demande présentée par la société Belafont devant le tribunal administratif de Bordeaux aurait été tardive. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir ainsi opposée.
En ce qui concerne la légalité de la décision du 26 novembre 2010 du maire de Trélissac :
5. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / (...) ". Aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. / (...) ".
6. Il ressort de la décision contestée que le droit de préemption a été exercé par la commune de Trélissac " en vue de procéder à la requalification et à la sécurisation de la voirie communale n°1 ", par la " création d'accotement " et la " mise en place de glissières de sécurité ". Nonobstant l'intérêt général qui s'attache à la réalisation des travaux projetés en vue de l'amélioration de la sécurité des usagers, ces travaux ne présentent pas, compte tenu de leur objet et de leur consistance, le caractère d'une opération d'aménagement au sens de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils s'intègreraient dans une telle opération. Par suite, et ainsi que l'ont estimé à juste titre les premiers juges, en exerçant leur droit de préemption sur la parcelle de la société Belafont, le maire de la commune de Trélissac a commis une erreur de droit.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les deux fins de non-recevoir opposée en défense par la société Belafont, que la commune de Trélissac n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision de préemption prise par son maire le 26 novembre 2010.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Belafont, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Trélissac demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la collectivité requérante une somme de 2 000 euros à verser à la société Belafont sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Trélissac est rejetée.
Article 2 : La commune de Trélissac versera à la société Belafont la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 15BX00813