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07/04/2016 | FRANCE | N°15BX03712

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 07 avril 2016, 15BX03712


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 mars 2015 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1501893 du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 novemb

re 2015 et 11 janvier 2016, M.A..., représenté par Me de Courréges, avocat, demande à la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 mars 2015 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1501893 du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 novembre 2015 et 11 janvier 2016, M.A..., représenté par Me de Courréges, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 20 octobre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2015 ou, à défaut la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 400 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- pour écarter les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le tribunal administratif n'a pas procédé à une étude sérieuse de sa situation et a commis une erreur de fait ;

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- la décision contestée est entachée d'un défaut d'étude sérieuse de ses conséquences en rapport avec les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il pouvait se voir délivrer une carte de séjour en vertu de considérations humanitaires en application des dispositions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

- le préfet ne démontre pas que la pathologie dont il souffre serait en voie de rémission ou de guérison, puisque l'avis du médecin de l'agence régionale de santé mentionne que son état de santé nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que le traitement dont il bénéficie doit, en l'état actuel, être poursuivi pendant une durée indéterminée ; alors que, l'année précédente, le médecin de l'agence régionale de santé reconnaissait qu'il n'avait pas accès aux soins en Côte d'Ivoire, et qu'il avait été admis au séjour sur ce fondement, le préfet ne démontre pas non plus que cette situation factuelle concernant son pays d'origine aurait changé en un an ; il produit un certificat médical démontrant que les soins qui lui sont nécessaires sont indisponibles dans son pays d'origine ;

- compte tenu de sa résidence en France depuis 2008 et des différents titres de séjour temporaires obtenus, le préfet a commis une erreur de droit en ne lui délivrant pas une carte de résident ;

- la décision contestée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale tel que protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il réside en France depuis février 2008, il travaille et a noué une relation avec une étudiante ivoirienne, qui attend un enfant et entend terminer son cursus universitaire ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision contestée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale tel que protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- cette décision porte atteinte au droit au respect de ses biens tel que protégé par le 1er article du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2015, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés

fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bernard Leplat.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., né le 17 janvier 1971, de nationalité ivoirienne, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 26 février 2008. Il a bénéficié d'un titre de séjour pour motif de santé régulièrement renouvelé du 3 septembre 2012 au 2 septembre 2014. Le 28 juillet 2014, il a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre le 30 mars 2015, un arrêté refusant de renouveler son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi. M. A...relève appel du jugement n° 1501893 du 20 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. A...n'a pas soulevé devant le tribunal administratif le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. D'autre part, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que cette même décision n'était pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation par renvoi au point 10 dudit jugement. Le tribunal administratif y examine de manière suffisamment précise la situation personnelle et familiale de M.A.... Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'un défaut d'examen de sa situation. Enfin la circonstance que les premiers juges auraient entaché leur décision d'une erreur de fait serait sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. La décision de refus de titre de séjour vise l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquels le préfet s'est fondé. Elle rappelle les conditions d'entrée en France de M.A..., la délivrance d'un titre de séjour pour motif de santé régulièrement renouvelé du 3 septembre 2012 au 2 septembre 2014, l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, sa situation professionnelle et sa vie privée et familiale. Dès lors, la décision est suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979. Il ressort de cette motivation que le préfet a procédé à un examen réel et sérieux de la situation de l'intéressé.

4. M. A...ne peut pas utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 qui est dépourvue de caractère réglementaire.

5. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Il est constant que M. A...n'a pas présenté de demande de carte de résident sur le fondement de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de sorte qu'il ne peut utilement soutenir que le refus de lui délivrer un titre de séjour méconnaît ces dispositions.

6. Il résulte des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur ce fondement, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du même code, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine.

7. La décision attaquée a été prise au vu de l'avis émis le 21 octobre 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé de Midi-Pyrénées. Cet avis mentionne que l'état de santé de M. A...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut risque d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine pour sa prise en charge médicale. M. A...soutient qu'il ne peut effectivement bénéficier de soins appropriés en Côte d'Ivoire, en se prévalant d'un certificat médical du 10 avril 2015 établi par un médecin généraliste et postérieur à l'arrêté attaqué, selon lequel le suivi nécessité par sa maladie chronique " n'est pas, à [sa] connaissance, disponible en Côte d'Ivoire ". Ce seul élément ne permet pas de conclure à une indisponibilité du traitement médical approprié à M. A...dans son pays. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a entaché sa décision ni d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation.

8. L'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France, garantie notamment par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

9. M. A...soutient qu'il réside en France depuis février 2008, qu'il travaille et a noué une relation avec une étudiante ivoirienne, qui attend un enfant et entend terminer son cursus universitaire. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il ne justifie pas de l'ancienneté et de la stabilité de sa relation avec sa compagne, l'état de grossesse de cette dernière étant postérieur à l'arrêté attaqué. La relation avec sa compagne, de nationalité ivoirienne, peut se poursuivre en Côte d'Ivoire. Il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans et où réside sa fille mineure. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9, en prenant à l'encontre du requérant la décision l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A....

11. Au soutien du moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M. A...ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué. Par suite, les conclusions de sa requête, y compris celles tendant à ce que des injonctions soient adressées au préfet de la Haute-Garonne et celles tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2016 à laquelle siégeaient :

M. Didier Péano, président,

M. Laurent Pouget, président assesseur,

M. Bernard Leplat, faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 avril 2016.

Le rapporteur,

Bernard Leplat Le président,

Didier Péano

Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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No 15BX03712


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX03712
Date de la décision : 07/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Bernard LEPLAT
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : DE COURREGES D'AGNOS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-04-07;15bx03712 ?
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