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15/03/2016 | FRANCE | N°15BX02950

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 15 mars 2016, 15BX02950


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite de rejet, née du silence gardé sur son recours gracieux du 28 juillet 2014, du préfet de la Haute-Garonne confirmant l'arrêté préfectoral du 27 mai 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi.

Par une ordonnance n° 1500667 du 3 juillet 2015, le président de la 4ème chambre du tribuna

l administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite de rejet, née du silence gardé sur son recours gracieux du 28 juillet 2014, du préfet de la Haute-Garonne confirmant l'arrêté préfectoral du 27 mai 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi.

Par une ordonnance n° 1500667 du 3 juillet 2015, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à fin d'annulation de la décision implicite rejetant son recours gracieux ainsi que sur ses conclusions à fin d'injonction, et a rejeté le surplus de ses conclusions qui tendaient à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er septembre 2015, Mme A...B..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 3 juillet 2015 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision implicite contestée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New York le 22 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aymard de Malafosse,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., de nationalité gabonaise, née le 11 juin 1986, est entrée en France le 10 septembre 2007 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour " étudiant ". Elle a bénéficié d'une carte de séjour " étudiant " régulièrement renouvelée entre le 10 septembre 2007 et le 30 septembre 2013. Le 2 janvier 2014, elle a demandé son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 27 mai 2014, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Cet arrêté ainsi que le jugement du tribunal administratif de Toulouse qui rejetait le recours formé contre lui ont été annulés par un arrêt de la cour du 13 avril 2015. Cette annulation a été prononcée au motif que l'arrêté était entaché d'erreurs sur la situation de Mme B...qui révélaient un défaut d'examen particulier de la situation de celle-ci. Le 28 juillet 2014, l'intéressée a formé un recours gracieux contre l'arrêté du 27 mai 2014. A défaut de réponse du préfet, elle a saisi le tribunal administratif de Toulouse, le 10 février 2005, d'une demande d'annulation de la décision implicite de rejet de ce recours gracieux. Mme B...relève appel de l'ordonnance du 3 juillet 2015 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur ces conclusions ainsi que sur les conclusions à fin d'injonction dont elles étaient assorties.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. L'arrêt de la cour du 13 avril 2015 n'a pas eu pour effet de faire rétroactivement disparaître la décision prise sur le recours gracieux de la requérante. Par suite, les conclusions présentées devant le premier juge et tendant à l'annulation de cette décision conservaient un objet. Dès lors, c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, il a été prononcé un non-lieu sur ces conclusions. Cette ordonnance, qui est donc entachée d'irrégularité, doit être annulée. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Mme B...devant le tribunal administratif.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

3. Il ressort des pièces du dossier qu'au cours de la première instance, le préfet a pris, le 3 avril 2015, une décision expresse de rejet du recours gracieux. Les conclusions de la requête, dirigées contre la décision implicite de rejet de ce recours, doivent être regardées comme dirigées contre cette décision du 3 avril 2015, qui s'est substituée à la décision implicite.

4. La décision explicite du 3 avril 2015 se prononce à nouveau sur la situation de Mme B... sans commettre, sur la situation de celle-ci, les erreurs qui ont conduit la cour, par son arrêt du 13 avril 2015, à relever que le préfet n'avait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée. Dans ces conditions, l'annulation prononcée par l'arrêt de la cour est sans incidence sur la légalité de la décision explicite du 3 avril 2015.

5. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

6. Il ressort des pièces du dossier que la requérante a donné naissance à une fille le 10 novembre 2012. Le père de l'enfant est un ressortissant guinéen qui était titulaire, à la date de la décision contestée, d'un titre de séjour en qualité d'étudiant. Il ne vit plus avec l'enfant et la mère de celle-ci. Néanmoins, les deux parents ont saisi le tribunal de grande instance aux fins de fixer les modalités de vie de l'enfant en faisant état de leur accord sur les mesures à prévoir dans l'intérêt de celui-ci. Dans son jugement rendu le 22 juillet 2014, le juge aux affaires familiales a relevé qu'ils étaient d'accord sur l'exercice en commun de l'autorité parentale, la fixation de la résidence principale de l'enfant au domicile de la mère, les modalités du droit de visite et d'hébergement du père et le montant de la contribution de ce dernier à l'entretien et l'éducation de l'enfant. Le juge a notamment décidé que les parents exerceront en commun l'autorité parentale, que la fréquence et la durée des périodes au cours desquelles le père peut accueillir l'enfant seront déterminées à l'amiable entre les parties, que le père versera une contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant d'un montant de 150 euros par mois, et que la sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation écrite des deux parents était interdite. Les pièces du dossier font ressortir que le père acquitte la contribution ainsi prévue et que l'enfant est rattaché tant à son régime de sécurité sociale qu'à sa mutuelle. Les attestations versées au dossier, notamment celle du pédiatre qui suit l'enfant, tendent à montrer que le père de ce dernier s'occupe effectivement d'elle. Le préfet, qui s'est borné tant devant le tribunal administratif que devant la cour à conclure au non-lieu, n'apporte aucun élément au soutien de son allégation, contenue dans la décision explicite contestée du 3 avril 2015, selon laquelle le père de l'enfant s'en désintéresserait. Dans ces conditions, la décision contestée, qui a pour effet de séparer l'enfant d'un de ses parents, est de nature à porter atteinte à l'intérêt supérieur de cette enfant et méconnaît, par suite, les stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à demander l'annulation de la décision du 3 avril 2015.

8. L'annulation de la décision du 3 avril 2015 implique que le préfet de la Haute-Garonne procède au réexamen de la situation de Mme B...en tenant compte notamment de la situation du père de l'enfant à la date de ce réexamen. Il y a lieu de lui enjoindre de procéder à ce réexamen dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

9. Dans les circonstances de l'espèce, l'Etat versera la somme de 1 300 euros à Me C...au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet1991.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1500667 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse, en date du 3 juillet 2015, est annulée.

Article 2 : La décision du préfet de la Haute-Garonne du 3 avril 2015 est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de procéder au réexamen de la situation de Mme B...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : l'Etat versera la somme de 1 300 euros à Me C...au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.

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N° 15BX02950


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX02950
Date de la décision : 15/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Aymard DE MALAFOSSE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : DE BOYER MONTEGUT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-03-15;15bx02950 ?
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