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03/12/2015 | FRANCE | N°13BX01515

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 03 décembre 2015, 13BX01515


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest (Apfelso), venant aux droits du comité économique agricole fruits et légumes du bassin grand sud-ouest (Ceafl), a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler deux titres de recettes émis le 14 décembre 2010 par le directeur général de l'établissement FranceAgriMer d'un montant de 79 749,89 euros et de 26 583,30 euros, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux dirigé contre ces titres, et de

prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 106 333,19 euro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest (Apfelso), venant aux droits du comité économique agricole fruits et légumes du bassin grand sud-ouest (Ceafl), a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler deux titres de recettes émis le 14 décembre 2010 par le directeur général de l'établissement FranceAgriMer d'un montant de 79 749,89 euros et de 26 583,30 euros, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux dirigé contre ces titres, et de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 106 333,19 euros.

Par un jugement n° 1101613 du 9 avril 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 juin 2013, et des mémoires enregistrés les 5 mars et 3 avril 2014, l'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud ouest (Apfelso), représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 9 avril 2013 ;

2°) d'annuler les titres de recettes en litige ainsi que la décision implicite portant rejet de son recours gracieux et de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 106 333,19 euros résultant des titres de recettes ;

4°) de suspendre l'exécution forcée de ces titres de recettes ;

5°) de mettre à la charge de FranceAgriMer la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CEE) n° 3816/92 du Conseil du 28 décembre 1992 prévoyant, dans le secteur des fruits et légumes, la suppression du mécanisme de compensation dans les échanges entre l'Espagne et les autres Etats membres ainsi que des mesures connexes ;

- le règlement (CEE) n° 4045/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif aux contrôles, par les Etats membres, des opérations faisant partie du système de financement par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, section " garantie ", et abrogeant la directive 77/435/CEE ;

- le règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;

- la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, notamment ses articles 1 et 26 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue ;

- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., pour l'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest.

Une note en délibéré, enregistrée le 11 novembre 2015, a été présentée pour l'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle réalisé en octobre 2001 par l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole (Acofa) sur le fondement du règlement (CEE) n° 4045/89 du Conseil du 21 décembre 1989, et de l'annulation par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 27 octobre 2009 de deux titres exécutoires émis le 16 mars 2004 par l'office national interprofessionnel des fruits, des légumes, des vins et de l'horticulture pour avoir reversement d'une somme de 79 749,89 euros et d'une somme de 26 583,30 euros perçues par le comité économique agricole fruits et légumes du bassin grand sud-ouest (Ceafl) en application d'une convention du 29 octobre 1997 relative à un programme d'expérimentation de filets paragrêles, le directeur général de l'établissement FranceAgriMer, venant aux droits du précédent organisme interprofessionnel, a émis le 14 décembre 2010 à l'encontre de l'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest (Apfelso), qui a succédé dans les droits et obligations du Ceafl, deux titres de même montant. L'Apfelso relève appel du jugement du 9 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des titres de recettes précités, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux dirigé contre ces titres.

2. En application du règlement (CEE) n° 3816/92 du Conseil du 28 décembre 1992 prévoyant, dans le secteur des fruits et légumes, la suppression du mécanisme de compensation dans les échanges entre l'Espagne et les autres Etats membres, ainsi que des mesures connexes, la communauté européenne a participé au financement de programmes d'action nationaux en vue de la restructuration des secteurs des fruits et légumes les plus touchés par la suppression du mécanisme de compensation dans les échanges entre l'Espagne et les autres Etats membres. L'expérimentation concernant les filets paragrêles en région Aquitaine prévue par la convention du 29 octobre 1997 constitue une des actions du programme national français qui a été approuvé par la Commission européenne par une décision du 13 mars 1995. Conformément à l'article 2 du règlement (CEE) n° 3816/92 du Conseil, le CEAFL d'Aquitaine a perçu une aide financée à hauteur de 75 % par des fonds communautaires. L'expérimentation a été financée à hauteur de 25 % par des fonds nationaux. La méconnaissance de l'expérimentation prévue par la convention du 29 octobre 1997 a donné lieu à l'émission des deux titres de recettes en litige relatifs à l'indu communautaire et à l'indu national de la subvention. Dès lors que l'expérimentation en cause concerne un programme national approuvé par la communauté européenne et auquel cette dernière apporte un soutien à hauteur de 75 %, il y a lieu d'appliquer les règles de prescription européennes en ce qui concerne le titre de recettes n° 212 d'un montant de 79 749,89 euros, et les règles de prescription applicables en droit français au titre de recettes n° 700 d'un montant de 26 583,30 euros correspondant à la part nationale égale à 25 % de la subvention.

Sur le titre de recettes n° 212 du 14 décembre 2010 correspondant au reversement de la part européenne de la subvention en litige et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

3. Aux termes de l'article 1er du règlement (CE) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes : " 1. Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire. / 2. Est constitutive d'une irrégularité toute violation d'une disposition du droit communautaire résultant d'un acte ou d'une omission d'un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue. ". Aux termes de l'article 3 du même règlement : " 1. Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l'irrégularité (...). / Pour les irrégularités continues ou répétées, le délai de prescription court à compter du jour où l'irrégularité a pris fin. Pour les programmes pluriannuels, le délai de prescription s'étend en tout cas jusqu'à la clôture définitive du programme. / La prescription des poursuites est interrompue par tout acte, porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l'autorité compétente et visant à l'instruction ou à la poursuite de l'irrégularité. Le délai de prescription court à nouveau à partir de chaque acte interruptif. / Toutefois, la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que l'autorité compétente ait prononcé une sanction (...). / 2. (...) Les cas d'interruption et de suspension sont réglés par les dispositions pertinentes du droit national. / 3. Les Etats membres conservent la possibilité d'appliquer un délai plus long que celui prévu respectivement au paragraphe 1 et au paragraphe 2. ". Aux termes de l'article 4 de ce règlement : " 1. Toute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l'avantage indûment obtenu : - par l'obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus, / - par la perte totale ou partielle de la garantie constituée à l'appui de la demande d'un avantage octroyé ou lors de la perception d'une avance. / (...) ".

4. L'article 2262 du code civil dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 19 juin 2008 prévoyait : " Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans ". Aux termes de l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi susvisée du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008 : " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. ". L'article 26 de cette loi dispose que : " I. - Les dispositions de la présente loi qui allongent la durée d'une prescription s'appliquent lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé. II. - Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. III. - Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation. / La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat. ".

5. Il résulte de l'arrêt du 5 mai 2011 Ze Fu Fleischhandel GmbH et Vion Trading GmbH de la Cour de justice de l'Union européenne (affaires C-201/10 et C-202/10) que le principe de sécurité juridique s'oppose à ce qu'un délai de prescription tel que le délai de la prescription trentenaire fixé par l'article 2262 du code civil puisse être appliqué aux actions des organismes d'intervention agricole lorsqu'ils réclament le reversement d'une aide indûment versée. Par suite, seul le délai de prescription de quatre années prévu par l'article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement précité était applicable jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions de la loi du 19 juin 2008 ayant ramené le délai de prescription à cinq ans.

6. Il résulte de l'instruction que, après le contrôle opéré en octobre 2001 par l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole, l'Oniflhor a estimé que le Ceafl avait manqué à ses obligations contractuelles concernant l'expérimentation prévue par la convention du 29 octobre 1997. Les manquements dans l'application du programme d'expérimentation des filets anti-grêle doivent être regardés comme continus au cours du programme d'expérimentation qui stipulait un déploiement des filets paragrêles au cours des années 1996 et 1997 et le suivi technique de l'expérimentation sur une période de cinq années comme s'étant achevé à la fin de l'année 2000. Par suite, le délai de prescription a commencé à courir le 1er janvier 2001, date à laquelle le programme avait pris fin, et non le 20 juin 2002, date à laquelle la commission technique du Ceafl s'est réunie pour établir le bilan quinquennal de l'expérimentation. Le délai de prescription a été interrompu une première fois par la lettre de l'Oniflhor en date du 15 avril 2003 adressée au Ceafl pour lui signifier que l'aide reçue était susceptible d'être remise en cause en raison des irrégularités détectées dans la mise en oeuvre du programme d'expérimentation et invitant le Ceafl à faire connaître ses observations sur le reversement de la subvention. En revanche, l'annulation par la cour, le 27 octobre 2009, du titre de recettes émis le 16 mars 2004 a pour conséquence que ce dernier est réputé n'avoir jamais existé et fait, dès lors, obstacle à ce que lui soit attaché un effet interruptif de prescription. Il n'est ni allégué ni a fortiori établi que l'organisme compétent pour obtenir le reversement de l'aide aurait accompli un acte visant à l'instruction ou à la poursuite de l'irrégularité avant l'émission d'un nouveau titre de recettes par FranceAgriMer le 14 décembre 2010. En particulier, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le mémoire en défense produit le 22 août 2006 par l'administration dans le cadre du recours contentieux formé par le comité contre le titre exécutoire initialement émis le 16 mars 2004 n'a pas le caractère d'un acte de nature à interrompre le délai de prescription de quatre ans. Ainsi, la poursuite du reversement de la part européenne de la subvention par FranceAgriMer était prescrite dès le 15 avril 2007 et a fortiori lorsque le directeur général de cet établissement a émis le 14 décembre 2010 le titre de recettes n° 212 en litige. L'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 n'a pu avoir pour effet de relever l'action en recouvrement de la prescription acquise antérieurement en vertu du règlement communautaire.

7. Il résulte de ce qui précède que l'Apfelso est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes litigieux et à la décharge du paiement de la somme de 79 749,89 euros qu'elle n'avait plus l'obligation de payer.

Sur le titre de recettes n° 700 du 14 décembre 2010 correspondant au reversement de la part nationale de la subvention :

En ce qui concerne la régularité du contrôle :

8. Aucun texte de droit communautaire ou de droit interne, ni aucun principe général du droit n'impose à l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole d'informer la personne physique ou morale des droits qui sont les siens dans le cadre du contrôle dont elle fait l'objet et de respecter un délai minimum entre la date de réception de l'avis de contrôle et le début du contrôle. Au demeurant, le Ceafl a disposé d'un délai de six jours entre la notification de l'avis de contrôle et le début du contrôle pour préparer celui-ci. En tout état de cause, il résulte de l'instruction que, conformément au principe général des droits de la défense, le Ceafl a été mis à même de contester l'ensemble des éléments sur le fondement desquels le reversement de la subvention en litige a été réclamé, à la suite de la lettre du 6 juin 2002 par laquelle l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole l'a informé des conclusions de ce contrôle et l'a invité à présenter ses observations. Le Ceafl a ainsi pu présenter ses observations le 16 juillet 2002, auxquelles il a été répondu le 2 août 2002. Le fait que le rapport de contrôle opéré en 2001 ne préciserait pas les droits dont dispose la personne contrôlée est sans incidence sur la régularité de ladite procédure. Ainsi, l'Apfelso n'est pas fondée à soutenir que les droits de la défense auraient été méconnus.

En ce qui concerne la motivation du titre exécutoire :

9. Un état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat, pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 81 du décret du 29 décembre 1962. En application de ce principe, FranceAgriMer ne pouvait mettre en recouvrement un prélèvement supplémentaire sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fondait pour demander le reversement des sommes en cause.

10. En l'espèce, l'état exécutoire adressé à l'Apfelso fait tout d'abord référence au contrôle de l'Acofa concernant un programme de modernisation campagne 96/98 et mentionne un " indu national ". L'Apfelso soutient que le titre exécutoire émis à son encontre est insuffisamment motivé car il ne fait pas référence à la lettre du 20 décembre 2010 qui l'accompagne, et que l'annexe qui précise les bases et les éléments de calcul du montant visé par le titre fait partie intégrante de cette décision du 20 décembre 2010 qui a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1100585 en date du 9 avril 2013. Toutefois, alors même que le titre litigieux ne fait pas référence expressément à la lettre du 20 décembre 2010, il n'est pas contesté qu'il a été notifié en même temps que cette lettre qui détaille chaque irrégularité et ses conséquences financières et à laquelle était joint un décompte précis. Ainsi, et contrairement à ce que soutient l'association requérante, les documents qui lui avaient été notifiés lui permettaient d'avoir une connaissance précise des bases de liquidation de l'indu dont FranceAgriMer lui demandait le reversement. La circonstance que la décision contenue dans la lettre du 20 décembre 2010 a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 9 avril 2013 est à cet égard sans incidence. Par suite, le titre de recettes en litige comporte, régulièrement l'indication des bases de liquidation des sommes réclamées.

En ce qui concerne le bien-fondé de la créance :

11. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article 2224 du code civil dans leur rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 et de celles du II de l'article 26 de cette loi précitées au point 4 ci-dessus, et dès lors que la durée de la prescription ainsi fixée n'entraîne pas le dépassement de la prescription trentenaire antérieurement applicable, que la répétition de la part nationale indue de la subvention en litige est prescrite au terme d'un délai de cinq ans qui commence à courir le 19 juin 2008. Par suite, à la date du 20 décembre 2010 à laquelle FranceAgriMer a fait de nouveau valoir sa créance auprès de l'Apfelso, la prescription quinquennale n'était pas acquise. L'exception de prescription soulevée par l'Apfelso doit être écartée.

12. En deuxième lieu, le titre exécutoire du 16 mars 2004 relatif à la part nationale de l'aide a été annulé par la cour le 27 octobre 2009 pour un vice de forme relatif au défaut de motivation. Par suite, l'autorité de la chose jugée attachée à cet arrêt, qui, ne s'est pas prononcé sur le bien-fondé de la créance en litige, ne faisait pas obstacle à ce que FranceAgriMer émette un nouveau titre exécutoire motivant dûment les bases de liquidation et portant sur la même somme.

13. En troisième lieu, il ressort des observations consécutives au contrôle du programme réalisé en octobre 2001, consignées dans la lettre du 20 décembre 2010 motivant la demande de reversement de l'aide, que le suivi de l'expérimentation des filets paragrêles devait être assuré par la station du centre interrégional d'expérimentation arboricole (Cirea). Alors que la validité des résultats scientifiques du programme dépendait de la mise au point d'un protocole technique précis, aucun protocole de ce type n'a été élaboré, le Cirea se bornant à renvoyer aux annexes à la convention, qui ne peuvent être regardées comme instituant un protocole d'expérimentation, alors que celui-ci était indispensable pour préciser notamment le matériel à utiliser, identifier les parcelles concernées et les critères de sélection de ces parcelles, les variétés prises en compte, la localisation et la consistance des surfaces témoins non couvertes, la méthode du suivi des contrôles en fréquence, les données mesurées et les consignations des résultats. L'Apfelso n'établit pas l'agrément préalable des sites de l'expérimentation et des projets d'installation des filets prévu par l'article 2 de la convention en se bornant à renvoyer à une liste d'exploitants et des surfaces concernées par l'expérimentation sans autre précision. Si l'Afpelso affirme que les filets installés par la société Valbuzzi ont été agréés, l'attestation qu'elle produit est dépourvue de toute précision technique au regard des exigences du programme. Sept exploitations ont bénéficié de l'aide alors qu'elles présentaient des installations non conformes. Les parcelles témoins n'ont pas pu être localisées et l'état récapitulatif auquel renvoie l'Apfelso est dépourvu de toute précision démontrant le contraire. L'absence de références cadastrales permettant de vérifier les surfaces incluses dans l'expérimentation a fait obstacle à la vérification du plafonnement de l'aide par exploitation. Moins de la moitié des 24 arboriculteurs contrôlés avaient retourné au Ceafl les fiches de suivi de l'expérimentation dont le compte-rendu n'a pas été établi conformément à l'article 3 de la convention. Les fiches de suivi produites par l'Apfelso, qui se bornent à un descriptif du matériel mis en place, sont dépourvues de toute précision sur le déroulement même de l'expérimentation et ses résultats précis. Enfin une partie des résultats de l'expérimentation concerne des parcelles recouvertes de filets posés antérieurement à celle-ci. Si l'Apfelso conteste l'existence de telles irrégularités, elle n'apporte pas plus en appel que devant les premiers juges d'élément de nature à établir que les constatations ainsi faites sont matériellement inexactes. Les manquements ainsi établis ont, par leur effet cumulé, entaché substantiellement le bon déroulement de l'expérimentation dans son ensemble au point de la priver de toute fiabilité. Par suite, FranceAgriMer était fondé à demander le reversement intégral de l'aide prévue par la convention du 29 octobre 1997, sans que soit méconnu le principe de proportionnalité.

14. Il résulte de ce tout ce qui précède que l'Apfelso est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes n°212 du 14 décembre 2010 et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux dirigé contre ce titre.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

15. L'association requérante n'est pas la partie perdante à l'instance. Par suite, les conclusions de FranceAgriMer tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'association tendant à l'application des mêmes dispositions.

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 9 avril 2013, en tant qu'il a rejeté la demande de l'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest tendant à l'annulation du titre de recettes n° 212 du 14 décembre 2010 émis par FranceAgriMer, ainsi que le titre lui-même et le rejet du recours gracieux contre le titre sont annulés. L'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest est déchargée du paiement de la somme de 79 749,89 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de l'association des producteurs de fruits et légumes du bassin du grand sud-ouest et les conclusions présentées par FranceAgriMer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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N° 13BX01515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX01515
Date de la décision : 03/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Agriculture et forêts - Produits agricoles - Généralités - Organisation des marchés.

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : PAGNOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-12-03;13bx01515 ?
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