Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Sarl Restaurant méditerranéen a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre pour la période du 1er avril 2006 au 31 mars 2008.
Par un jugement n° 1100059 du 23 mai 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juillet 2013 et 13 janvier 2015, la Sarl Restaurant méditerranéen, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 mai 2013 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 10.894,82 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Marie-Thérèse Lacau,
- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue de la vérification de la comptabilité de la Sarl Restaurant méditerranéen, qui exploite un établissement à Brive-la-Gaillarde, l'administration fiscale, écartant cette comptabilité comme non probante, a reconstitué son chiffre d'affaires pour les activités de bar, de restauration sur place et de plats à emporter au titre des exercices clos les 31 mars 2006, 2007 et 2008. La société fait appel du jugement du 23 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie de ce chef pour la période du 1er avril 2006 au 31 mars 2008.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En vertu de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales, lorsque la vérification de la comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou taxe ou d'un groupe d'impôts ou de taxes est achevée, l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période. Aux termes du I de l'article L. 52 du même livre : " Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts (...)". Il résulte de ces dispositions que c'est la dernière intervention sur place du vérificateur qui marque l'achèvement de la vérification.
3. Il résulte de l'instruction que la première intervention sur place du vérificateur en vue de l'examen critique des livres et documents comptables a eu lieu le 6 janvier 2009. La dernière intervention ayant le même objet a eu lieu le 2 avril suivant, soit avant la date du 5 avril à laquelle expirait le délai de trois mois prévu à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales. Il ne résulte pas de l'instruction que la réunion de synthèse organisée le 15 juillet 2009 dans les locaux de la brigade départementale de vérification de la Corrèze aurait eu un autre objet que la présentation des conclusions du contrôle. Ainsi, comme le confirment d'ailleurs les mentions de l'état contradictoire dressé à l'issue de cet entretien, signé par un agent assermenté, et de la proposition de rectification adressée le lendemain, les dispositions précitées des articles L. 51 et L. 52 du livre des procédures fiscales n'ont été méconnues. Au demeurant, la société requérante admet, en page 55 de son mémoire introductif d'instance, que l'état contradictoire dressé l'a été "hors vérifications sur place".
Sur le bien-fondé des impositions :
4. En vertu du deuxième alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve appartient au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. La société requérante, qui se borne à demander à la cour de retenir, pour la reconstitution des chiffres d'affaires, la régularité des états de stocks présentés, ne conteste plus en appel que compte tenu de l'ensemble des anomalies relevées par le vérificateur, celui-ci a pu à bon droit écarter comme irrégulière sa comptabilité et procéder à une reconstitution extra-comptable de ses recettes. Les impositions litigieuses ayant été établies conformément à l'avis émis le 4 février 2010 par la commission des impôts de la Corrèze, il appartient à la société, en application des dispositions précitées, de prouver l'exagération des bases d'imposition retenus par l'administration. Dès lors qu'elle n'est pas en mesure d'établir le montant exact de ses recettes en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, elle peut soit critiquer la méthode d'évaluation suivie en vue de démontrer qu'elle aboutit à une exagération des bases d'imposition, soit, aux mêmes fins, soumettre à l'appréciation du juge une nouvelle méthode permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode retenue par l'administration.
5. Pour reconstituer les recettes, le vérificateur s'est fondé sur une analyse exhaustive des factures afin de déterminer le montant des achats revendus en distinguant, d'une part, pour les recettes résultant de la consommation des boissons, les boissons vendues au verre ou au pichet, celles vendues en canettes ou en boîtes et les boissons chaudes, d'autre part, pour l'activité de restauration, les viandes, poissons et desserts. Il a appliqué aux quantités revendues les tarifs mentionnés sur la carte des prix présentée lors du contrôle, puis prévu des abattements pour tenir compte tant des consommations du personnel et des gérants que des pertes et des boissons offertes aux clients.
6. Si la Sarl Restaurant méditerranéen fait valoir que l'association de solidarité des Turcs de Brive s'est servie, pour régler des achats effectués en 2005 et en 2006, du numéro de compte de l'établissement auprès du fournisseur Métro, ni l'attestation du 20 décembre 2009, postérieure aux opérations de vérifications, ni les huit factures d'ailleurs libellées à son nom qu'elle produit ne suffisent à établir que ces achats auraient été réglés par l'association. Si la société soutient que pour déterminer les achats au titre de l'année 2007, le vérificateur aurait comptabilisé à tort dix-huit bouteilles de Ricard alors qu'il s'agissait de verres offerts par le fournisseur, omis cinq bouteilles de liqueur de rose et "oublié un zéro" dans le décompte des achats de whisky en 2007, le ministre fait valoir sans être sérieusement contredit que les achats de Ricard et de liqueur de rose n'ont pas été comptabilisés et que l'erreur alléguée dans le décompte des achats de whisky est favorable au contribuable. La société requérante fait en outre valoir, d'une part, que, pour l'exercice clos en 2006, le vérificateur a sous-estimé la contenance des bouteilles de porto et de liqueur de pomme et le poids de la viande, pour l'exercice clos en 2007, sous-estimé la contenance des bouteilles de whisky, le nombre de bouteilles de jus de fruit et le poids de la viande et omis des achats de volaille et une bouteille de limonade et, pour l'exercice clos en 2008, sous-estimé la contenance des bouteilles de Martini, le nombre de bouteilles de jus de pomme, coca, whisky, de Martini, cognac et jus de fruits et le poids de la viande, d'autre part, qu'il surestimé des achats de cognac, coca, Fanta et jus de fruits pour l'exercice clos en 2006, la contenance des bouteilles de Muscat pour l'exercice clos en 2007 et pour l'exercice clos en 2008 les quantités de vin et le nombre de bouteilles de Fanta et de canettes de coca. Les erreurs matérielles commises dans la détermination des achats ne suffisent pas à révéler le caractère radicalement vicié ou excessivement sommaire de la vérification. La société requérante n'établit pas que la correction de ces erreurs aurait pour effet de réduire les bases retenues par l'administration, alors que le ministre fait valoir sans être sérieusement contredit sur ce point que compte tenu de l'augmentation des recettes issues des reventes des achats omis par le vérificateur, la correction de ces erreurs, à les supposer toutes établies, serait sans incidence sur les impositions en litige.
7. En ce qui concerne les ventes, si la société requérante demande la déduction des cafés compris dans certains menus pour déterminer le nombre de cafés servis à la carte, il ne résulte pas de l'instruction que l'abattement de vingt-cinq pour cent appliqué sur les recettes issues de la vente des cafés servis à la carte n'aurait pas été déterminé en tenant compte de ce paramètre. Si elle invoque des erreurs sur les quantités d'entrecôte et de poulet servies par plat, alors que le ministre fait valoir que celles-ci ont été déterminées contradictoirement lors des opérations sur place, elle n'établit pas que les quantités respectives de deux cents grammes et de cent cinquante grammes retenues par le vérificateur seraient exagérées. Elle fait valoir que la reconstitution opérée ne tient pas compte de la réalité de l'exploitation, en particulier de la dualité carte/menu et des importantes différences de tarifs entre, d'une part, les plats proposés à la carte et ceux compris dans les menus, d'autre part, les plats à emporter et ceux à consommer sur place et propose une méthode alternative. Toutefois, cette méthode repose sur des sondages postérieurs aux exercices vérifiés et des variations de stocks que les états de stocks produits, dépourvus de date certaine et de valeur probante, ne suffisent pas à établir, alors, d'une part, que tant le vérificateur que les membres de la commission des impôts ont constaté le défaut de présentation de ces documents, d'autre part et en tout état de cause, que la société requérante ne saurait invoquer sa comptabilité, dépourvue de caractère probant. Au surplus, le ministre fait valoir sans être contredit sur ce point qu'en l'absence de détermination des chiffres d'affaires générés par les ventes d'entrées, spécialités turques et fromages, qui, en faveur du contribuable, n'ont pas été prises en compte par le vérificateur, cette méthode ne permet pas d'établir l'exagération des bases imposables. Si la société soutient qu'il n'a pas été tenu compte des tarifs antérieurs à la date du 20 septembre 2008, à laquelle elle a modifié sa carte des prix, elle se borne à produire, d'une part, des attestations de clients et de salariés postérieures à la période en litige, d'autre part, un document sans date certaine dont la facture de l'imprimerie du 10 février 2005 ne suffit pas à établir le caractère d'authenticité, alors que le ministre affirme qu'il n'avait pas été présenté au vérificateur et d'où il résulte, pour de nombreux tarifs, des augmentations peu réalistes supérieures ou égales à cinquante pour cent.
8. Le vérificateur a individualisé les taux de pertes et de boissons offertes, en admettant notamment un taux d'offerts de cent pour cent pour le raki et les autres liqueurs turques, vingt-cinq pour cent pour le café, dix pour cent pour les digestifs, cinq pour cent pour les apéritifs et deux pour cent pour les autres boissons vendues au verre ou en pichet ainsi qu'un taux de perte et d'offerts de quinze pour cent pour la bière. Il a, enfin, appliqué des abattements respectifs de dix et quinze pour cent pour tenir compte des sandwichs kebabs consommés sur place et à emporter offerts aux clients. Si la société requérante fait valoir que le vérificateur n'a pas tenu compte de la casse et qu'il a "appliqué des pourcentages globaux de perte et d'offerts sans les ventiler entre les deux faits générateurs de produits invendus", il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait omis de prendre en compte en compte les pertes liées à la casse. Il n'était pas tenu d'individualiser des taux de perte, de casse et d'offerts. Si la société requérante fait valoir que pour la bière pression, le taux de freinte admis dans la profession s'élève à quinze pour cent, que les grandes bouteilles de soda et jus de fruits sont servies gratuitement avec les boissons alcoolisées et qu'il y a lieu de retenir le taux de vingt-cinq pour cent admis pour les cafés, pour l'ensemble des boissons servies au verre et au pichet, elle se borne à produire des attestations de salariés et de clients postérieures aux années d'imposition en litige. Si, en s'appuyant sur le taux de trente-six pour cent résultant du constat d'huissier dressé en juin 2006 dans un autre établissement, elle demande que le taux de pertes de viande de kebab à la cuisson et à la découpe, fixé à vingt pour cent par le vérificateur suite aux constatations effectuées sur place, soit porté à trente pour cent, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il n'est pas établi que ce restaurant avait des conditions d'exploitation similaires, en particulier que la qualité de la viande était comparable. Si pour prendre en compte les usages de la profession, l'administration fiscale a retenu un taux de trente pour cent pour un autre établissement, cette circonstance ne lui est, en tout état de cause, pas opposable dans le présent litige. Si la société requérante demande l'application d'un abattement de cinquante pour cent pour tenir compte des pertes à la cuisson des gésiers confits, il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur aurait pris en compte ce produit pour déterminer les achats revendus.
9. Enfin, le vérificateur a estimé les consommations des gérants, des employés et des stagiaires à cent pour cent des achats de grandes bouteilles d'eau, cinquante pour cent des achats de bouteilles de jus et sodas, dix pour cent des kebabs à consommer sur place et quinze pour cent des kebabs à emporter. Comme le fait valoir le ministre, l'évaluation proposée par la société requérante, qui repose sur un prix unitaire de dix euros, excessif au regard des tarifs pratiqués pour la restauration rapide, ne permet pas de remettre en cause celle retenue par l'administration.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'établit ni le caractère excessivement sommaire ou radicalement vicié de la méthode utilisée par le vérificateur, ni l'exagération de ses bases d'imposition. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies.
DECIDE
Article 1er : La requête de la Sarl Restaurant méditerranéen est rejetée.
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N° 13BX02068