La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/09/2015 | FRANCE | N°15BX00820

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 28 septembre 2015, 15BX00820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé le 22 avril 2014 au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 17 mars 2014 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761 1 du code de justice administrative et 37 de la lo

i du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1402080 du 2 décembre 2014, le trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé le 22 avril 2014 au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 17 mars 2014 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761 1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1402080 du 2 décembre 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 mars 2015, MmeA..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 décembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 mars 2015 du préfet de Tarn-et-Garonne ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 11 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de séjour contesté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que l'avis émis le 5 février 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé n'est pas conforme aux prescriptions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 et de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de séjour contestée méconnaît le 11 ° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle souffre de gonarthrose bilatérale, aggravée par une obésité morbide en lien avec un manque de mobilité et une baisse de l'acuité visuelle ; le traitement nécessaire à son état de santé n'est pas disponible au Maroc alors même qu'il existe un accès au système de santé pour les plus démunis ; la preuve que des médicaments génériques pourraient être substitués à son traitement n'est pas établie ; la circonstance que son état de santé nécessite l'assistance de son fils vivant en France pour les actes de la vie quotidienne constitue une circonstance humanitaire exceptionnelle ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi sont entachées d'erreur de droit, dès lors que sa situation personnelle et médicale justifie la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ;

- ces décisions méconnaissent le 10 ° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du fait de l'absence de traitement approprié à son état de santé au Maroc.

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2015, présenté par le préfet de Tarn-et-Garonne qui conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 avril 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 juin 2015.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pierre Larroumec, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., ressortissante marocaine, est entrée en France le 8 février 2010, selon ses dires, et a bénéficié de cartes de séjour temporaires portant la mention " vie privée et familiale " en qualité d'étranger malade. Elle a demandé au préfet de Tarn-et-Garonne, le 23 janvier 2014, le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A la suite de l'avis rendu le 5 février 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé, le préfet, par un arrêté du 17 mars 2014, a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A...fait appel du jugement du 2 décembre 2014 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité du refus de séjour :

2. En vertu de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi, " les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). ". L'article R. 313-22 du même code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). ". Selon l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dernières dispositions : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. ".

3. Si Mme A...soutient que le préfet de Tarn-et-Garonne a méconnu les prescriptions de l'article 4 précité de l'arrêté du 9 novembre 2011 et celles de l'article R. 313 22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision et ne met donc pas la cour en mesure d'en apprécier le bien-fondé.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...souffre de gonarthrose bilatérale, ayant nécessité la pose d'une prothèse du genou droit en juillet 2010 puis d'une prothèse du genou gauche en février 2011, aggravée par une obésité morbide en lien avec un manque de mobilité et une baisse de l'acuité visuelle. Le médecin de l'agence régionale de santé de Midi-Pyrénées, consulté par le préfet de Tarn-et-Garonne sur la demande de renouvellement de titre de séjour de MmeA..., a précisé, dans son avis du 5 février 2014, que l'état de santé de celle-ci nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existe une offre de soins dans son pays d'origine pour sa prise en charge médicale en précisant que les soins nécessités par son état de santé doivent, en l'état actuel, être poursuivis pendant une période indéterminée. Pour contester cet avis, Mme A... soutient que le traitement nécessaire à son état de santé n'est pas disponible dans son pays d'origine, alors même qu'il existe au Maroc un accès au système de santé pour les plus démunis. Elle produit, à ce titre, plusieurs certificats médicaux décrivant ses pathologies, attestant de son suivi médical ainsi que des prescriptions médicamenteuses. Toutefois, ces certificats, dont les deux derniers sont au demeurant postérieurs à la décision contestée, n'indiquent pas que Mme A...ne pourrait pas recevoir les soins qui lui sont nécessaires au Maroc. Si le certificat établi le 14 avril 2014 par le Dr D..., responsable de la Mission France Toulouse de l'association Médecins du monde mentionne que " la prise en charge de l'état de santé de Mme A...risque de faire défaut dans son pays d'origine étant donnée la complexité et la sévérité de ses pathologies ", il ne se prononce pas sur la disponibilité du traitement nécessaire à l'état de santé de Mme A...au Maroc. Enfin, si Mme A...fait valoir que le médicament Dafalgan codéiné, dont les principes actifs sont le paracétamol et la codéine, et que le médicament Inexium, dont le principe actif est l'esomeprazole, ne sont pas disponibles au Maroc, cette affirmation, fondée sur une liste des " médicaments essentiels " établie par le ministère de la santé marocain, ne saurait suffire par elle-même et à elle seule à infirmer l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et à établir que l'intéressée ne pourrait poursuivre un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, sous sa forme actuelle ou sous une forme équivalente alors que le traitement médicamenteux de Mme A...figure sur la liste des médicaments remboursés par l'Agence nationale de l'Assurance Maladie au Maroc. Les éléments particuliers relatifs à la situation personnelle de Mme A...ne peuvent être qualifiés de circonstance humanitaire exceptionnelle au sens des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, en refusant à Mme A...de renouveler son titre de séjour en qualité d'étranger malade au motif que cette dernière peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, le préfet de Tarn-et-Garonne n'a pas méconnu ces dispositions.

En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi :

5. Si Mme A...soutient que le préfet de Tarn-de-Garonne a entaché sa décision d'erreur de droit dès lors qu'elle doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision et ne met donc pas la cour en mesure d'en apprécier le bien-fondé.

6. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l' objet d'une obligation de quitter le territoire français: (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...). ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante se serait prévalue devant le préfet de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens de ces dispositions qui auraient dû être appréciées par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé. Dans ces conditions, et pour les mêmes raisons que celles mentionnées plus haut au point 4, le préfet de Tarn-et-Garonne n'a pas méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A...au profit de son conseil, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de Tarn-et-Garonne

Délibéré après l'audience du à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Antoine Bec, président-assesseur,

M. Philippe Delvolvé, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 septembre 2015.

Le président-assesseur,

Antoine Bec

Le président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

''

''

''

''

2

N° 15BX00820


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX00820
Date de la décision : 28/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre LARROUMEC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : PEPIN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-09-28;15bx00820 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award