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28/09/2015 | FRANCE | N°15BX00786

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 28 septembre 2015, 15BX00786


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'une part, d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2014 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une période de deux ans et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quin

ze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'une part, d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2014 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une période de deux ans et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 1403836 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 mars 2015, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2014 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une période de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de quinze jours ;

4) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros au profit de son conseil, sous réserve que celui-ci renonce à la part contributive de l'Etat.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant géorgien, né le 4 décembre 1964, est entré en France, selon ses déclarations, le 20 septembre 2011. Il a été admis au séjour en qualité d'étranger malade. Son dernier titre de séjour arrivant à expiration le 5 juillet 2014, il a, le 2 juin 2014, sollicité le renouvellement de ce titre, sur le même fondement. Par un arrêté du 4 juillet 2014, le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé la Géorgie comme pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une période de deux ans. M. B... fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 décembre 2014, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du 4 juillet 2014.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) ". Aux termes des dispositions de l'article R. 313-22 du même code pris pour l'application du 11° de l'article L. 313-11 dudit code : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. (...) ". Aux termes enfin de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dispositions : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; la durée prévisible du traitement. Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. ".

3. En premier lieu, il ne résulte pas de la rédaction de la décision de refus de séjour en litige que le préfet se serait cru lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé.

4. En second lieu, M. B... fait valoir qu'il souffre d'une cirrhose post-virale résultant d'une hépatite C aujourd'hui guérie, mais aussi d'une hépatite B évolutive nécessitant de façon indispensable l'administration continue de l'antiviral " Baraclude " ainsi que d'un suivi très régulier de sa fonction hépatique, que ni cette spécialité ni même la substance active qu'il contient ne sont disponibles en Géorgie et qu'il ne pourra avoir accès à un suivi spécialisé dans ce pays. Cependant, dans le cadre du renouvellement du titre de séjour sollicité par l'intéressé le 2 juin 2014, le médecin de l'agence régionale de santé Midi Pyrénées a, dans son avis du 10 juin 2014, reconnu que la gravité de la pathologie de M. B... nécessitait un traitement dont l'absence pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais a estimé qu'il existait dans le pays dont l'intéressé était originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale. Les trois certificats médicaux produits par le requérant, en date du 4 juin, 29 juillet et 23 décembre 2014, s'ils attestent de ce que la pathologie dont il est affecté nécessite un traitement continu au long cours par le Baraclude, ne font aucunement état de l'indisponibilité de ce traitement en Géorgie. Le courrier du 3 juin 2014 du ministère du travail, de la santé et de la sécurité sociale de Géorgie, s'il fait état de ce que la spécialité pharmaceutique " Baraclude " n'a pas, à l'heure actuelle, d'autorisation de mise sur le marché dans ce pays, n'établit pas que la molécule active de ce médicament n'y serait pas disponible sous une autre forme. Par suite, les documents produits par le requérant ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en ce qui concerne la disponibilité d'un traitement dans le pays d'origine de M.B.... Si le préfet a examiné l'accessibilité effective aux soins de l'intéressé, les dispositions précitées de l'article L. 313-11, 11° ne lui font pas obligation d'examiner cette accessibilité dès lors qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine. En tout état de cause, le requérant n'établit pas, en produisant des documents d'ordre général sur le traitement des hépatites, l'impossibilité pour lui de cet accès. Par suite, le préfet de Tarn-et-Garonne, en refusant de délivrer à M. B...un titre de séjour en qualité d'étranger malade, n'a ni commis d'erreur de droit pour n'avoir pas examiné sa situation au regard de l'accessibilité aux soins, ni méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Aux termes de l'article L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...) ". Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B...n'est pas fondé à invoquer le bénéfice de ces dispositions.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

6. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

7. Ainsi qu'il a été dit au point 4, il n'est pas établi que M. B... ne pourrait bénéficier d'un traitement médical adapté en Géorgie. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans :

8. Aux termes de l'article L. 511-1, III : " III. - L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) Lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour, prenant effet à l'expiration du délai, pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ". Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux.

9. La décision contestée indique que l'intéressé constitue une menace à l'ordre public en raison des condamnations dont il avait fait l'objet, qu'il est célibataire et sans enfant et n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Elle précise également que M. B... pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, et quand bien même M. B... fait valoir qu'il a accompli les peines liées aux deux condamnations dont il a fait l'objet et qu'il n'a fait l'objet d'aucune précédente mesure d'éloignement, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire national serait entachée d'une erreur d'appréciation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. B... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent pas être accueillies.

Sur les conclusions présentées au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. B...demande le versement à son conseil sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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N° 15BX0786


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX00786
Date de la décision : 28/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : SEIGNALET MAUHOURAT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-09-28;15bx00786 ?
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