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01/12/2014 | FRANCE | N°14BX01437

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 01 décembre 2014, 14BX01437


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2014, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par MeB... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305789 du 3 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 novembre 2013 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de satisfaire à cette obligatio

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2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de l...

Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2014, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par MeB... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305789 du 3 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 novembre 2013 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de satisfaire à cette obligation ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer une carte de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 600 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 pris pour l'application du chapitre II du titre II de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif à l'accusé de réception des demandes présentées aux autorités administratives ;

Vu la circulaire INTK1229185C du 28 novembre 2012 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2014 :

- le rapport de M. Aymard de Malafosse, président de chambre ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité centrafricaine, relève appel du jugement du 3 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Tarn-et-Garonne du 25 novembre 2013 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

S'agissant de la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, que le requérant a saisi le préfet d'une demande datée du 10 juillet 2013 dans laquelle il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour par le travail sur le fondement de l'article L 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de la circulaire du 28 novembre 2012 ; que s'il soutient que la décision attaquée est insuffisamment motivée faute pour le préfet d'avoir examiné si ses qualifications, expériences et diplômes, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, peuvent constituer des motifs d'admission exceptionnelles au séjour, sa propre demande ne faisait pas état de la promesse d'embauche dont il se prévaut, laquelle est au demeurant postérieure à son courrier du 10 juillet 2013, mais mentionnait uniquement sa présence en France depuis plus de dix ans et l'exercice de " diverses activités salariales pendant plus de sept ans " ; que, par suite, en relevant, notamment, que l'intéressé " ne peut (...) établir une présence en France de manière ininterrompue depuis plus de dix ans ", qu'il " ne produit aucune promesse d'embauche et ne présente donc aucune garantie d'insertion professionnelle " et ne fait valoir aucune considération humanitaire ni motifs exceptionnel, le préfet a suffisamment motivé la décision de refus de titre ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 6 juin 2001 susvisé : " Lorsque la demande est incomplète, l'autorité administrative indique au demandeur les pièces manquantes dont la production est indispensable à l'instruction de la demande et celles des pièces rédigées dans une langue autre que le français dont la traduction et, le cas échéant, la légalisation sont requises. Elle fixe un délai pour la réception de ces pièces. " ; que M.A..., dont la demande de titre de séjour n'a pas été rejetée au motif qu'il manquait des pièces indispensables à son instruction, ne peut utilement soutenir que le préfet aurait dû lui demander la communication des pièces attestant de ses allégations ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; que si le requérant établit sa présence en France, pour y suivre des études, du 26 décembre 2002 au 27 décembre 2007, il ne produit, pour les années 2008, 2009 et 2010, qu'un certificat de scolarité pour l'année universitaire 2008-2009 du 5 juin 2009 relatif à une inscription en doctorat de sociologie et un " dossier de l'étudiant " confirmant cette inscription ; qu'il ne produit aucun justificatif pour l'année 2011 ; que, dès lors, il n'établit pas une résidence habituelle en France depuis dix ans ; qu'il s'ensuit que le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ;

S'agissant de la légalité interne :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;

6. Considérant que, si M. A...se prévaut de l'ancienneté de son séjour en France et d'une promesse d'embauche du 17 juillet 2013 pour un emploi d'agent de nettoyage industriel, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que l'intéressé ne justifiait pas ainsi d'un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, c'est à bon droit que le préfet, qui n'avait pas à saisir la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en application de l'article L. 5221-2 du code du travail, lui a refusé la délivrance d'un titre " salarié " sur le fondement de ces dispositions ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que M.A..., qui a demandé sa régularisation exceptionnelle sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut utilement soutenir que le préfet aurait dû lui faire application de l'article L. 313-10 du même code, relatif à la délivrance de la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle ;

8. Considérant, en troisième lieu, que si M. A...se prévaut des lignes directrices fixées par la circulaire INTK1229185C du 28 novembre 2012, relatives aux demandes d'admission exceptionnelle au séjour par le travail, qui invitent les préfets à apprécier favorablement de telles demandes lorsque l'étranger justifie d'un contrat de travail ou d'une promesse d'embauche et de l'engagement de versement de la taxe au profit de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, ainsi que d'une certaine ancienneté de travail et d'une ancienneté de séjour, il ne soutient pas, de toute façon, satisfaire aux critères d'ancienneté du travail précisés par cette circulaire ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant que le requérant fait valoir qu'il réside en France depuis plus de dix ans, et qu'il y a l'essentiel de ses attaches matérielles et professionnelles ; que, cependant, et comme il a été dit au point 4, si le requérant établit sa présence en France, pour y suivre des études, du 26 décembre 2002 au 27 décembre 2007, il ne produit en revanche aucune pièce probante relative aux années ultérieures ; qu'il est célibataire et sans enfant, et ne démontre pas être dépourvu d'attache en République centrafricaine, où résident sa mère et quatre soeurs ; que dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré, par M.A..., de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté ;

12. Considérant que si M. A...soutient que la décision litigieuse serait entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, dès lors qu'elle l'obligerait à interrompre son travail, il n'établit pas exercer une activité professionnelle ; qu'en tout état de cause, ce moyen doit être écarté :

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ;

14. Considérant qu'à la date à laquelle a été pris l'arrêté contesté, la situation en République centrafricaine se caractérisait par un climat de violence extrême marqué par de très graves exactions commises contre la population civile par des groupes armés ; que, dès lors, en tant qu'il fixe la République centrafricaine comme pays à destination duquel sera renvoyé M. A...en cas de non-exécution de la mesure d'éloignement, l'arrêté contesté méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision litigieuse doit être annulée ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Considérant que le présent arrêt, qui prononce l'annulation de la seule décision fixant le pays de destination, n'implique pas nécessairement que le préfet délivre à l'intéressé un titre de séjour, ni qu'il réexamine sa situation ; que les conclusions à fin d'injonction doivent, par suite, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

17. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A...au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 avril 2014 est annulé en tant qu'il rejette la demande de M. A...tendant à l'annulation de la décision du préfet de Tarn-et-Garonne du 25 novembre 2013 désignant la République centrafricaine comme pays à destination duquel il peut être éloigné.

Article 2 : La décision du préfet de Tarn-et-Garonne du 25 novembre 2013 désignant la République centrafricaine comme pays à destination duquel M. A...peut être éloigné est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

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N° 14BX01437


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX01437
Date de la décision : 01/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Aymard DE MALAFOSSE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : OUAYOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-12-01;14bx01437 ?
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