Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 3 septembre 2012 présentée pour M. A... B...demeurant à ...par Me Bach ;
M. B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°0902297 du 5 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 pour un montant, en droits et pénalités, de 16 268 euros ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
---------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2014 :
- le rapport de M. Philippe Cristille, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
- les observations de Me Bach, avocat de M.B... ;
1. Considérant qu'à partir de 2004, M. B...a fait construire, en extension de son habitation principale située au lieu-dit " La Vergne " à Sainte-Alvère (Dordogne), deux immeubles en bois destinés à créer un gîte rural et deux chambres d'hôtes, qui ont été livrés à la fin du mois de juillet 2007 ; qu'il a opté pour un assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée à compter du 1er janvier 2004 et a déduit la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les frais afférents à la construction desdits bâtiments ; qu'il a fait l'objet en 2007 d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ; que le vérificateur a estimé que l'activité de gîte rural relevait du régime d'exonération de taxe défini par les dispositions du 4° de l'article 261 D du code général des impôts et que les deux tiers de l'immeuble nouvellement construit étaient affectés à cette activité ; qu'il a en outre estimé que la terrasse et le local d'accueil étaient affectés à hauteur de 50% à un usage privé et à une activité agricole et, pour le restant, à l'activité de gîte rural et de chambre d'hôtes ; qu'il a, en combinant ces critères, déterminé une clef de répartition aboutissant à admettre en déduction 25% de la taxe sur la valeur ajoutée, d'un montant total de 16 936 euros, due à raison du prix de revient de la livraison à soi-même de l'immeuble nouvellement construit, soit un montant de taxe déductible ramené à ce titre à 4 234 euros et un rappel de taxe, à ce titre, d'un montant de 12 702 euros ; que ce rappel ainsi que d'autres redressements de moindre importance ont abouti à un rappel total, sur l'ensemble de la période vérifiée, de 15 974 euros ; que M. B...fait appel du jugement du 5 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions qui lui ont été ainsi assignées et des pénalités dont elles ont été assorties ; que sa contestation ne porte toutefois que sur le rappel opéré, dans les conditions qui viennent d'être précisées, au titre de la taxe due sur la livraison à soi-même ;
En ce qui concerne l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des prestations de location d'un gîte rural :
2. Considérant qu'aux termes du 4° de l'article 261 D du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 18 de la loi n°2002-1576 du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 applicable à l'espèce : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 4º Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : (...) b. Aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l'hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle " ; que pour apprécier si une activité de location saisonnière de logements meublés entre ou non dans le champ de cette exonération, il convient de rechercher si, eu égard aux caractéristiques des prestations proposées dans le cadre d'une activité de location de logements meublés, celle-ci se trouve ou non en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières ;
3. Considérant que les entreprises nouvellement constituées sont réputées commencer leur activité au regard de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'elles manifestent, par une déclaration d'existence et par l'acquisition de biens et de services nécessaires au besoin de l'exploitation, l'intention d'effectuer des opérations situées dans le champ d'application de cet impôt, même si aucune vente ou prestation n'a encore été effectuée à la date de dépôt de la déclaration d'existence ;
4. Considérant que la période au titre de laquelle ont été établies les impositions litigieuses, soit celle du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, correspond à celle de la construction des immeubles destinés à accueillir l'activité de gîte rural et de chambre d'hôtes, précédant nécessairement le début de l'exploitation ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de la lettre du contribuable en date du 1er juin 2004 adressée au service que M. B...a manifesté son intention de se livrer, dès l'achèvement des travaux de construction, à une activité de location de gîte rural comportant les quatre prestations para-hôtelières susmentionnées ; que l'intention ainsi manifestée revêtait un caractère d'autant plus vraisemblable que ces prestations devaient nécessairement pouvoir être fournies dans le cadre de l'activité de location de chambre d'hôtes, elle aussi exercée dans une extension de l'habitation principale du contribuable, et dont l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée n'a jamais été contestée ; que les divers documents produits par le requérant, notamment les copies de contrats de location, tendent au demeurant à démontrer que la fourniture du petit déjeuner et le service de ménage ont été proposés à la clientèle du gîte dès le début de l'exploitation ; que la circonstance que ces clients disposaient d'un coin cuisine équipé et d'un aspirateur ne suffit pas à exclure que ces prestations n'étaient pas destinés à leur être proposées et ne l'ont pas été ; que, dans ces conditions, M. B... doit être regardé comme ayant eu l'intention de se livrer effectivement à une activité saisonnière de location de logements meublés répondant aux critères définis par les dispositions précités du b) du 4° de l'article 261 D du code général des impôts ; qu'il en résulte que, cette activité n'étant pas exonérée de taxe sur la valeur ajoutée, c'est à tort que l'administration a refusé la déduction de la taxe ayant grevé la part des travaux de construction affectée au gîte rural ;
En ce qui concerne l'affectation de la terrasse et du local d'accueil :
5. Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu notamment des précisions fournies par le requérant sur les affectations des différentes parties de l'immeuble étayées par les plans annexés au constat d'huissier qu'il a fait établir, que la terrasse et le local d'accueil étaient destinées, même partiellement, à un usage privé et qu'elles aient d'ailleurs été affectées à un tel usage ;
6. Considérant, d'autre part, que M.B..., qui est recevable à invoquer tout moyen nouveau en appel, fait valoir devant la cour sans être sérieusement contesté que son activité de vente de produits provenant de son exploitation agricole entre dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, le fait que le local d'accueil serait partiellement destiné et affecté à cette activité n'est pas, par lui-même, de nature à exclure un droit à déduction à ce titre ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...est fondé à demander la décharge des impositions et pénalités contestées dans la mesure où elles procèdent du rappel opéré à raison de la livraison à soi-même, et la réformation en ce sens du jugement attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B...de la somme de 1 500 euros qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Il est accordé à M. B...la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 dans la mesure où ils procèdent du rappel opéré à raison de la livraison à soi-même, ainsi que des pénalités correspondantes.
Article 2 : Le jugement n°0902297 en date du 5 juillet 2012 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
''
''
''
''
2
N°12BX02383