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26/05/2014 | FRANCE | N°12BX01815

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 26 mai 2014, 12BX01815


Vu la requête enregistrée le 12 juillet 2012, présentée par M. B...A..., demeurant ... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803447 du 24 mai 2012 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 avril 2008 par laquelle le ministre de l'éducation nationale lui a infligé la sanction disciplinaire de révocation, ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

2°) d'annuler ces décisions ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

...

Vu la requête enregistrée le 12 juillet 2012, présentée par M. B...A..., demeurant ... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803447 du 24 mai 2012 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 avril 2008 par laquelle le ministre de l'éducation nationale lui a infligé la sanction disciplinaire de révocation, ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

2°) d'annuler ces décisions ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 modifié ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 avril 2014 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

- les observations de Me Vangel, avocat de M.A... ;

1. Considérant que M.A..., lauréat du concours externe d'accès au corps de professeur certifié dans la discipline occitan-languedocien, a été nommé professeur certifié stagiaire le 1er septembre 1998, puis titularisé le 1er septembre 1999 ; que le 10 octobre 2007, il a été informé de l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre, et à la suite de l'avis émis par le conseil de discipline, il a été révoqué par un arrêté du 7 avril 2008 du ministre de l'éducation nationale par arrêté du 7 avril 2008 ; que M. A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de cet arrêté ainsi que de la décision implicite de rejet du recours gracieux qu'il avait formé contre cette décision le 11 avril 2008 ; qu'il fait appel du jugement du 24 mai 2012 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " (...) Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagé, a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance d'un défenseur de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à la communication du dossier. (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : " L'administration doit dans le cas où une procédure disciplinaire est engagée à l'encontre d'un fonctionnaire informer l'intéressé qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de tous les documents annexes et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. (...) " ; que l'article 4 du même décret dispose : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de la réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. / Ce conseil peut décider, à la majorité des membres présents, de renvoyer à la demande du fonctionnaire ou de son ou de ses défenseurs l'examen de l'affaire à une nouvelle réunion. Un tel report n'est possible qu'une seule fois. "

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les courriers du 12 novembre 2007, 4 décembre 2007 et 19 décembre 2007 par lesquels le requérant a été informé de sa convocation devant le conseil de discipline indiquent qu'il a droit à la communication de l'intégralité de son dossier et qu'il peut se faire assister d'un ou de plusieurs défenseurs de son choix ; que M. A...a eu connaissance de la lettre du 4 décembre 2007 au plus tard le 17 décembre 2007, date à laquelle il a fait part à l'administration de ce qu'il ne pouvait se rendre au conseil de discipline en raison de son état de santé ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration de faire mention dans sa lettre de la possibilité d'obtenir un report du conseil de discipline ; que si le requérant soutient que son état de santé fortement dégradé ne lui permettait pas de se présenter devant le conseil de discipline, il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que les troubles dont il souffrait mettaient M. A...hors d'état de consulter son dossier et de présenter utilement sa défense ;

4. Considérant que si M. A...soutient que la présidente du conseil de discipline a refusé sa demande de report de ce conseil alors qu'elle n'était nullement habilitée à le faire, et qu'elle n'a pas présenté sa demande au conseil de discipline comme l'impose les dispositions précitées de l'article 4 du décret du 25 octobre 1984, il n'établit pas, même par la production de son courrier du 17 décembre 2008, avoir formulé une telle demande de report, dont le procès-verbal de la réunion du conseil de discipline ne fait d'ailleurs pas mention ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 octobre 1984 précité : " L'organisme siégeant en Conseil de discipline lorsque sa consultation est nécessaire, en application du second alinéa de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou d'un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet. / Ce rapport doit indiquer clairement les faits reprochés au fonctionnaire et préciser les circonstances dans lesquelles ils se sont produits. " ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : " Le fonctionnaire poursuivi peut présenter devant le Conseil de discipline des observations écrites ou orales, citer des témoins et se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. (...) " ; que l'article 5 dispose : " Lorsque le conseil de discipline examine l'affaire au fond, son président porte, en début de séance, à la connaissance des membres du conseil les conditions dans lesquelles le fonctionnaire poursuivi et, le cas échéant, son ou ses défenseurs ont exercé leur droit à recevoir communication intégrale du dossier individuel et des documents annexes. / Le rapport établi par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou par un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet et les observations écrites éventuellement présentées par le fonctionnaire sont lus en séance. / Le conseil de discipline entend séparément chaque témoin cité. / (...) / Le fonctionnaire et, le cas échéant, son ou ses défenseurs peuvent, à tout moment de la procédure devant le conseil de discipline, demander au président l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales. Ils doivent être invités à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne commence à délibérer. " ;

6. Considérant que s'il ressort de ces dispositions que l'organisme siégeant en conseil de discipline est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, indiquant clairement les faits reprochés au fonctionnaire, précisant les circonstances dans lesquelles ils se sont produits et que ces dispositions précisent que le fonctionnaire peut présenter des observations écrites ou orales devant le conseil de discipline, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit la communication dudit rapport avant la séance dès lors que l'intéressé a été mis à même d'avoir accès à son dossier individuel et que ce rapport ne contient aucun élément nouveau ; qu'il est constant que le rapport de saisine du conseil de discipline se borne à retracer les faits qui sont à l'origine de la procédure disciplinaire engagée et dont il avait été mis à même d'avoir connaissance ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir qu'il devait avoir communication de ce rapport préalablement à la séance du conseil de discipline ;

7. Considérant que la commission administrative paritaire compétente, siégeant en conseil discipline, était régulièrement composée, dans la mesure où la totalité de ses trente-huit membres étaient présents ; que contrairement à ce que soutient le requérant, les membres suppléants n'avaient pas à être présents ;

8. Considérant que si le requérant fait valoir que le conseil de discipline était présidé par la directrice des ressources humaines qui aurait manifesté une véritable animosité envers lui, notamment en le sanctionnant par des affectations à grande distance totalement injustifiées, par une convocation très tardive au service médical du rectorat et par un prétendu refus de report du conseil de discipline, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présidente du conseil de discipline aurait manqué à son devoir d'indépendance et d'impartialité ou qu'elle aurait manifesté une animosité particulière à l'égard de l'intéressé tant en sa qualité de directrice des ressources humaines au cours de la carrière de celui-ci que pendant la procédure disciplinaire ;

9. Considérant qu'il n'est pas établi, ainsi qu'il a été dit, que M. A...ait demandé le report de la séance du conseil de discipline ; qu'il ressort du procès-verbal de la réunion du conseil de discipline que sa présidente a informé les membres de ce conseil du déroulement de la procédure comme elle devait le faire ; qu'en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en l'espèce, eu égard à ce qui a été dit au point 3 une insuffisance d'information sur ce point du conseil de discipline aurait privé le requérant d'une garantie ou aurait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ; qu'ainsi, la circonstance, à la supposer établie, que la présidente du conseil de discipline n'aurait pas averti les membres du conseil de ce que l'intéressé était en congé de maladie à la date de réunion du conseil, et n'aurait pas exposé les conditions dans lesquelles il aurait pu consulter son dossier, est sans influence sur la régularité de la délibération de ce conseil ; qu'enfin, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration de communiquer aux membres du conseil de discipline son dossier médical ou toute autre pièce que le rapport disciplinaire, lequel lu en séance a ainsi été communiqué aux membres de ce conseil ;

10. Considérant que si M. A...se plaint de ce que des témoignages favorables et notamment celui d'une ancienne élève, n'auraient pas été communiqués aux membres du conseil de discipline, il ne ressort pas des pièces qu'il aurait demandé que ces personnes soient citées comme témoin conformément l'article 5 du décret du 25 octobre 1984 ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 25 octobre 1984 précité : " Le conseil de discipline, au vu des observations écrites produites devant lui et compte tenu, le cas échéant, des déclarations orales de l'intéressé et des témoins ainsi que des résultats de l'enquête à laquelle il a pu être procédé, émet un avis motivé sur les suites qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée. / A cette fin, le président du conseil de discipline met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées lors du délibéré. Si cette proposition ne recueille pas l'accord de la majorité des membres présents, le président met aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée, jusqu'à ce que l'une d'elles recueille un tel accord. / La proposition ayant recueilli l'accord de la majorité des membres présents doit être motivée et être transmise par le président du conseil de discipline à l'autorité ayant pouvoir disciplinaire.; qu'il résulte de ces dispositions que le président du conseil de discipline met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées lors du délibéré ; qu'il ressort du procès-verbal du conseil de discipline que la présidente de ce conseil a mis au voix la sanction de la révocation qui est la plus sévère dans l'échelle des sanctions et que c'est cette sanction qui a recueilli l'accord de la majorité des membres présents ; que rien ne permet à cet égard d'affirmer que ce n'est pas la proposition de la sanction de révocation qui aurait en l'espèce été exprimée lors du délibéré en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 8 du décret ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret du 25 octobre 1984 : " Le conseil de discipline doit se prononcer dans le délai d'un mois à compter du jour où il a été saisi par le rapport de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire (...). " ; que M. A...n'établit pas que le rapport de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, qui est daté du 9 janvier 2008, jour de réunion du conseil de discipline, aurait été rédigé en juin 2007 plus d'un mois avant que le conseil de discipline ne se prononce ; que le moyen soulevé doit par suite être écarté ;

13. Considérant qu'en vertu de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes, les sanctions les plus sévères relevant du quatrième groupe étant la mise à la retraite d'office et la révocation ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que M. A...n'a pas respecté les programmes officiels de l éducation nationale en dépit de la demande de l'inspecteur pédagogique ; qu'il a laissé le désordre s'installer dans ses classes ; qu'il a persisté dans ses nombreux retards, en dépit de deux injonctions de l'inspecteur d'académie-inspecteur pédagogique régional d'occitan, notamment en date du 14 mars 2005, et de la principale du collège " pour infléchir son attitude, et le conduire à respecter les horaires et programmes scolaires " ; qu'il a envoyé au rectorat de l'académie de Toulouse des courriers contenant des écrits gravement désobligeants à l'encontre de l'inspecteur pédagogique régional et de la directrice des ressources humaines de l'académie de Toulouse ; qu'il a enfin fait preuve d'un comportement violent et agressif tant à l'encontre des élèves que de leurs parents ; que ces faits, dont la matérialité est établie par les pièces du dossier et notamment par les différents rapports des inspecteurs d'académie produits par le ministre, de ceux des proviseurs des lycées dans lesquels le requérant a exercé, et enfin des témoignages d'élèves et de parents d'élèves, constituent des manquements aux obligations professionnelles d'obéissance hiérarchique, de correction et de dignité dans l'exercice des fonctions, de respect de la hiérarchie et de surveillance des élèves pendant le temps scolaire ; que de tels manquements, que ni l'état de santé de l'intéressé, ni son l'éloignement de son domicile ne sauraient excuser, constituent des fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

15. Considérant qu'eu égard à la gravité des faits reprochés et à leur répétition, compte tenu des fonctions d'enseignant exercées par l'intéressé et de ses responsabilités auprès des élèves, et en raison du comportement général incompatible avec la bonne marche du service dont il a fait preuve, le ministre, en lui infligeant à M. A...la sanction de la révocation n'a pas pris à son encontre une mesure disproportionnée dans l'échelle des sanctions alors même qu'il n'avait pas fait l'objet de sanction disciplinaire auparavant, et n'a donc pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

16. Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

18. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction tendant à la reconstitution de sa carrière ne peuvent être accueillies ;

19. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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No 12BX01815


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX01815
Date de la décision : 26/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Jean-Emmanuel RICHARD
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : VANGEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-05-26;12bx01815 ?
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