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06/05/2014 | FRANCE | N°13BX01202

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 06 mai 2014, 13BX01202


Vu le mémoire enregistré le 30 janvier 2014, présenté pour la société SGI, société à responsabilité limitée, ayant son siège social 20 rue de la Compagnie à Saint Denis (97400), par Me A... ;

La société demande à la cour, dans le litige qui l'oppose à l'administration fiscale, de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 1740 du code général des impôts dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2005-1512 du 7 décembre 2005 co

mme dans sa rédaction désormais en vigueur ;

Elle soutient que :

- ces disposit...

Vu le mémoire enregistré le 30 janvier 2014, présenté pour la société SGI, société à responsabilité limitée, ayant son siège social 20 rue de la Compagnie à Saint Denis (97400), par Me A... ;

La société demande à la cour, dans le litige qui l'oppose à l'administration fiscale, de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 1740 du code général des impôts dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2005-1512 du 7 décembre 2005 comme dans sa rédaction désormais en vigueur ;

Elle soutient que :

- ces dispositions, applicables au litige, n'ont pas fait l'objet d'une décision du Conseil constitutionnel les déclarant conformes à la Constitution ;

- elles méconnaissent le droit de propriété protégé par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 si l'amende instaurée n'est pas regardée comme une sanction à but répressif : les sommes réclamées peuvent atteindre des montants très importants, sans rapport avec l'avantage fiscal escompté ou la gravité du comportement réprimé et aucune graduation de la sanction n'est prévue ;

- elles méconnaissent l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 qui pose le principe de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines si l'amende instituée par l'article 1740 du code général des impôts est une sanction présentant le caractère d'une punition ; il n'existe pas de possibilité de modulation de la peine en fonction de la gravité des comportements reprochés alors que la sanction peut atteindre des montants exorbitants et que le lien entre la peine et le comportement réprimé peut être distendu ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2014, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui demande à la cour de ne pas transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité ; il soutient que l'amende litigieuse doit être regardée comme une sanction ayant le caractère d'une punition ; que le moyen tiré de l'atteinte au droit de propriété doit dès lors être écarté ; le moyen tiré de la violation du principe de nécessité des peines ne présente pas de caractère sérieux ; que l'application de cette amende n'implique pas d'appréciation subjective du comportement du contribuable mais seulement la constatation de la fourniture de fausses informations ou le non respect des engagements pris pour obtenir un avantage fiscal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 ;

Vu l'article 1736 du code général des impôts ;

Vu l'article 13 de l'ordonnance n°2005-594 du 7 décembre 2005 ;

Vu l'article 23 de la loi n°2009-594 du 27 mai 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine des conditions d'application du présent article. " ; que selon l'article 23-2 de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : " (...) La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat (...) Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 771-7 du code de justice administrative : " (...) Les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours ou les magistrats désignés à cet effet par le chef de juridiction peuvent, par ordonnance, statuer sur la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité " ;

2. Considérant que l'article 1740 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005, est applicable aux impositions en litige et constitue le fondement de la pénalité contestée par la société SGI ; que ces dispositions n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce que ces dispositions, qui prévoient que le fait de fournir de fausses informations ou de ne pas respecter les engagements pris pour obtenir une réduction d'impôt sur le revenu en contrepartie d'investissements outre- mer, entraîne l'application d'une amende égale au montant de l'avantage fiscal indûment obtenu, sans préjudice des sanctions de droit commun et qui pourraient être regardées comme une sanction, portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, en ce qu'elles méconnaissent les principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines découlant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de transmettre la question soumise par la société SGI au Conseil d'Etat ;

ORDONNE :

Article 1er : La question prioritaire de constitutionnalité visant les dispositions de l'article 1740 du code général des impôts est transmise au Conseil d'Etat.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête n° 13BX01202 jusqu'à ce qu'il ait été statué par le Conseil d'Etat, ou s'il a été saisi par le Conseil constitutionnel, sur la question de constitutionnalité ainsi soulevée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société SGI et au ministre des finances et des comptes publics.

Fait à Bordeaux, le 6 mai 2014.

Le président de chambre,

Michèle RICHER

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Florence DELIGEY

N° 13BX01202 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13BX01202
Date de la décision : 06/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-02-02-01 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Rectification (ou redressement). Proposition de rectification (ou notification de redressement). Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Marianne POUGET M.
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : COSICH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-05-06;13bx01202 ?
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