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30/04/2014 | FRANCE | N°13BX03305

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 30 avril 2014, 13BX03305


Vu la requête enregistrée le 6 décembre 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me C...;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301052 du 24 octobre 2013 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2013 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'en

joindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 e...

Vu la requête enregistrée le 6 décembre 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me C...;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301052 du 24 octobre 2013 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2013 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, dans le cas où seules l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi seraient annulées, une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à défaut, de surseoir à statuer dans l'attente de la réponse de la Cour de justice de l'Union européenne aux questions préjudicielles posées par jugement du tribunal administratif de Melun n° 301686 en date du 8 mars 2013 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi que la somme de 13 euros correspondant au droit de plaidoirie en application des dispositions de l'article 43 de la même loi ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2014 :

- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...A..., de nationalité algérienne, né en 1971, est entré en France le 9 juillet 2011, muni d'un passeport algérien revêtu d'un visa de court séjour, en compagnie de son épouse et de deux de leurs enfants mineurs ; que le 31 janvier 2012, il a demandé au préfet de la Haute-Vienne, conjointement avec son épouse, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que, toutefois, par un arrêté du 29 mai 2013, le préfet a rejeté sa demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de renvoi ; que M. A...fait appel du jugement du 24 octobre 2013 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

2. Considérant que la décision contestée énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde : que cette décision, qui vise la convention internationale relative aux droits de l'enfant contrairement à ce que soutient M.A..., n'avait pas à reprendre en détail l'intégralité des éléments propres à la situation personnelle de l'intéressé ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des acte administratifs, alors même qu'elle ne mentionne pas que les enfants mineurs de la requérante seraient scolarisés ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5) Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ", et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) " ;

4. Considérant que M. A...se prévaut de la présence en France de sa mère, titulaire d'une carte de résident de dix ans, qui est veuve, isolée et dont l'état de santé nécessiterait sa présence à ses côtés, de la présence également de son frère, de sa soeur, ainsi que de son fils, confié en 1999 à ses grands-parents paternels par acte de kafala, de ce que ses deux autres enfants sont maintenant scolarisés en France et réussissent bien dans leurs études, et de sa volonté d'intégration sociale, grâce à son implication au sein de l'association culturelle franco-algérienne de Limoges et d'un collectif agissant en faveur des étrangers, ainsi que d'une volonté d'insertion professionnelle ; que, toutefois, le requérant n'établit pas que sa présence ainsi que celle de son épouse aux cotés de sa mère seraient indispensables, alors que cette dernière n'est pas isolée en France où réside notamment son frère qui avait précisément invoqué la nécessité d'être présent aux côtés de sa mère malade à l'appui de sa propre demande de titre de séjour qui a été favorablement accueillie par le préfet de la Haute-Vienne, et qu'en outre une partie de sa famille, constituée notamment de deux tantes et de nombreux cousins, vit à Limoges ; que son épouse, faisant elle-même l'objet d'une mesure d'éloignement prise le même jour, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale puisse se reconstituer en Algérie où M. A... a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans et où il n'est pas établi que ses enfants ne pourraient y poursuivre leur scolarité ; que, dans ces conditions, compte tenu du caractère récent du séjour de l'intéressé en France, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus qui lui a été opposé, et n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 6, 5) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les mêmes raisons, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d' institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

6. Considérant que M. A...et son épouse sont tous les deux en situation irrégulière sur le territoire français et ont chacun fait l'objet d'une décision de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français ; que, comme l'ont déjà relevé à bon droit les premiers juges, dès lors que, d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans le pays d'origine et que, d'autre part, il n'est pas établi que ses enfants ne pourraient y être scolarisés, la décision contestée n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11. " ; qu'il résulte de ce dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les dispositions visées par ce texte ou les stipulations de l'accord franco-algérien ayant le même objet ; qu'ainsi, eu égard à ce qui a été dit ci-dessus, M. A... n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, invoqué par voie d'exception à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire, doit être écarté ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...). / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. (...) " ;

10. Considérant qu'en vertu des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour lorsque, notamment, un refus de délivrance d'un titre de séjour a été opposé à l'étranger ; que la décision de refus de titre de séjour comporte, ainsi qu'il a été dit au point 2, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et vise les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français. " ; que M.A..., qui avait la possibilité, pendant l'instruction de sa demande, de faire connaître, de manière utile et effective, les éléments justifiant son admission au séjour, ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre une décision différente ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de ladite Cour statuant sur la question préjudicielle posée par le tribunal administratif de Melun, le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans le mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et également méconnu les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

12. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus aux points 4 et 6, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de l'atteinte disproportionnée portée au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale, de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, invoqué par voie d'exception à l'encontre de décision fixant le pays de renvoi, doit être écarté ;

14. Considérant que la décision litigieuse vise notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et indique que M. A..., de nationalité algérienne, ne démontre pas ni même n'allègue être exposé à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'elle comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ;

15. Considérant que les moyens tirés de l'erreur manifeste qu'aurait commise le préfet dans l'appréciation des conséquences de la décision litigieuse sur la vie personnelle de M. A..., de l'atteinte disproportionnée portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, et de l'atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants doivent être écartés pour les même motifs que ceux exposés aux points 4 et 6 ci-dessus ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. A...demande le versement à son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, y compris les droits de plaidoirie ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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No 13BX03305


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX03305
Date de la décision : 30/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : SELARL PREGUIMBEAU - GREZE : AEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-04-30;13bx03305 ?
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