Vu I° sous le n°12BX02257 la requête enregistrée au greffe le 22 août 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 30 août 2012 présentée pour la commune de Saint-Leu (97436), par Me C...;
La commune de Saint-Leu demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°0900821 du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis l'a condamnée à verser à la compagnie d'assurance SA Prudence Créole la somme de 411 504 euros au titre des sommes qu'elle a versées aux ayants droit de M.B..., victime d'un accident mortel de la circulation le 2 novembre 2006, en sa qualité d'assureur de la conductrice du véhicule heurté par la victime ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif par la SA Prudence Créole ;
3°) de mettre à la charge de ladite société le paiement de la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu II° sous le n°13BX01867, la requête enregistrée par télécopie le 8 juillet 2013 et régularisée par courrier le 23 août 2013, présentée pour la commune de Saint-Leu (97436) par Me C...qui demande à la cour d'ordonner en application de l'article R. 811-16 du code de justice administrative qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n°0900821 du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis l'a condamnée à verser à la compagnie d'assurance SA Prudence Créole la somme de 411 504 euros et a mis à sa charge le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2014 :
- le rapport de M. Philippe Cristille, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
- et les observations de Me Segala, avocat de la SA Prudence Créole ;
1. Considérant que le 2 novembre 2006, vers 20h30, le véhicule conduit par Mme A...est entré en collision avec la motocyclette pilotée par M. B...dans l'agglomération de Saint-Leu (Réunion) au niveau de l'intersection du boulevard Bonnier et de la rue du général Lambert ; que M. B...est décédé lors de l'accident ; que la compagnie SA Prudence Créole, assureur de MmeA..., après avoir indemnisé les ayants droit de la victime de leurs préjudices patrimoniaux et personnels, a demandé au tribunal administratif de Saint-Denis de condamner la commune de Saint-Leu et l'Etat à lui rembourser ses débours en invoquant le défaut d'entretien normal de la voie publique ; que, par un jugement du 7 juin 2012, le tribunal administratif de Saint-Denis a retenu la responsabilité exclusive de la commune de Saint-Leu pour défaut d'entretien normal de la voie publique et l'a condamnée à verser à la société Prudence Créole la somme de 411 504 euros ; que la commune de Saint-Leu a fait appel de ce jugement par sa requête enregistrée sous le n° 12BX02257 et en a demandé le sursis à exécution par sa requête enregistrée sous le n° 13BX01867 ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la requête n° 12BX02257 :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
2. Considérant que si la commune de Saint-Leu soutient que les premiers juges n'ont pu régulièrement lui opposer un rapport d'expertise établi de façon non contradictoire à la demande de la société Prudence Créole, d'une part, il ne ressort pas des énonciations du jugement attaqué que le tribunal se serait fondé sur ce rapport, d'autre part, et en tout état de cause, dès lors qu'il a été communiqué dans le cadre de l'instruction et a été ainsi soumis au débat contradictoire, un tel rapport peut être retenu par le juge à titre d'élément d'information ;
3. Considérant que ni la motivation du jugement, ni aucun élément du dossier ne font ressortir que les premiers juges auraient, dans leur analyse des causes de l'accident, méconnu l'exigence d'impartialité nécessaire à un procès équitable ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait porté atteinte au principe du droit à un procès équitable ne saurait être accueilli ;
En ce qui concerne la responsabilité :
4. Considérant que la moto pilotée par M.B..., qui circulait rue du Général Lambert, a heurté sur sa gauche le véhicule conduit par Mme A...alors que ce véhicule, en provenance du boulevard Bonnier, venait de s'engager sur la rue où se trouvait la moto, après avoir marqué le signal " stop " placé à l'intersection des deux voies ; qu'il résulte de l'instruction, en particulier de la reconstitution à laquelle les services de gendarmerie ont procédé le 28 mai 2007 et des témoignages convergents versés au dossier, que, pour un conducteur dont le véhicule est arrêté à l'endroit où se trouvait le marquage du signal " stop ", les rambardes de la passerelle métallique située non loin du carrefour masquaient considérablement la visibilité sur le côté gauche, les véhicules franchissant la passerelle n'apparaissant dans le champ de vision de ce conducteur qu'à une distance de 20 mètres, laquelle est parcourue en 1,44 seconde seulement par un véhicule roulant à 50 km / h ; qu'ainsi, tel qu'il était alors aménagé et signalé, ce carrefour, situé dans l'agglomération de la commune de Saint-Leu, présentait un danger constitutif d'un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public dont la commune avait la charge ; que, d'ailleurs, dans les jours qui ont suivi l'accident, le point d'arrêt du signal " stop " a été déplacé par les services municipaux afin d'assurer une meilleure visibilité ; que ce défaut d'entretien normal est de nature à engager la responsabilité de la commune à l'égard de la société Prudence Créole, qui justifie être subrogée dans les droits tant de Mme A...que des ayants droit de M. B...qu'elle a indemnisés ;
5. Considérant que lorsque la responsabilité du maître d'un ouvrage public est engagée à l'égard de l'usager de l'ouvrage ou, comme en l'espèce, de l'assureur subrogé dans ses droits, ce maître d'ouvrage ne peut, pour dégager sa responsabilité, utilement invoquer le fait d'un tiers ; que, par suite, la commune ne peut utilement faire valoir que le dommage résulterait d'un défaut de conception de la passerelle métallique qui serait imputable à l'Etat ou à la région ;
6. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme A...aurait commis une faute qui serait, en tout ou partie, à l'origine de l'accident ; qu'en particulier, le seul témoin direct de l'accident, auditionné par les services de gendarmerie, a attesté qu'elle avait marqué l'arrêt imposé par le signal " stop " et s'était prudemment engagée sur la rue du général Lambert ; que si elle a reconnu dans ses déclarations auprès des gendarmes avoir commis un refus de priorité, elle l'a imputé à la mauvaise visibilité caractérisant le carrefour ; qu'aucun élément versé au dossier ne fait ressortir qu'elle n'aurait pas porté ses lunettes de vue au moment de l'accident ou que celles-ci auraient été inadaptées à sa vue ;
7. Considérant que, si la commune de Saint-Leu soutient que le dommage trouve son origine en partie dans l'imprudence du motocycliste qui roulait de nuit tous feux éteints, il résulte de l'instruction, en particulier du procès verbal établi par les services de gendarmerie le 14 juin 2007, reprenant sur ce point les conclusions du rapport de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, que l'ampoule de la motocyclette était allumée au moment de l'accident ; que la commune n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que la victime aurait, en roulant sans éclairage, commis une faute de nature à atténuer sa responsabilité ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Leu doit être déclarée responsable de la totalité des conséquences dommageables de l'accident ayant entraîné la mort de M.B... ;
En ce qui concerne le préjudice :
9. Considérant que la société Prudence Créole a produit, en plus des documents justifiant les paiements opérés au profit des ayants droit de M.B..., les protocoles d'indemnisation transactionnelle passés avec ces derniers, qui permettent d'identifier les personnes indemnisées, leurs liens de parenté avec M.B..., les montants alloués et la nature des préjudices indemnisés ; que la commune de Saint-Leu ne conteste ni la réalité ni l'étendue de ces préjudices, dont le dossier ne fait pas ressortir le caractère excessif ; que, par suite, la commune doit indemniser la société Prudence Créole à concurrence du montant de 411 504 euros demandé par celle-ci et suffisamment justifié ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Leu n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis l'a condamnée à verser à la société Prudence Créole la somme de 411 504 euros ;
En ce qui concerne les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la compagnie Prudence Créole, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la commune de Saint-Leu de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune le versement à la société Prudence Créole de la somme que celle-ci demande au titre des mêmes frais ;
Sur la requête n° 13BX01867 :
12. Considérant que la cour statue par le présent arrêt sur les conclusions de la requête n° 12BX02257 de la commune de Saint-Leu tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Saint-Denis du 7 juin 2012 ; que, par suite, les conclusions de la requête n°13BX01867 qui tendent à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement sont devenues sans objet ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n°13BX01867 de la commune de Saint-Leu.
Article 2 : La requête n°12BX02257 de la commune de Saint-Leu est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la SA Prudence Créole présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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Nos12BX02257, 13BX01867