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31/03/2014 | FRANCE | N°13BX00538

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 31 mars 2014, 13BX00538


Vu la requête enregistrée par télécopie le 19 février 2013, et régularisée par courrier le 21 février suivant, présentée pour M. E...D..., demeurant au..., par Me F...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200607 du 22 novembre 2012 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 septembre 2011 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de la Haute-Vienne a autorisé son licenciement, et la décision du 24 février 2012 du ministre chargé de l'emploi confirmant cette d

écision ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat u...

Vu la requête enregistrée par télécopie le 19 février 2013, et régularisée par courrier le 21 février suivant, présentée pour M. E...D..., demeurant au..., par Me F...;

M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200607 du 22 novembre 2012 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 septembre 2011 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de la Haute-Vienne a autorisé son licenciement, et la décision du 24 février 2012 du ministre chargé de l'emploi confirmant cette décision ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à son conseil, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi que la somme de 13 euros correspondant au droit de plaidoirie en application de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

Vu le décret n° 2006-1033 du 22 août 2006 modifié ;

Vu l'arrêté du 22 août 2006 relatif à l'organisation de la direction générale du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2014 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

- les observations de Me B...pour la Sarl Nouvelle société déconstruction plus ;

1. Considérant que par contrat du 24 février 2003, M.D..., a été recruté par la société " Services et désamiantage plus " en qualité d'opérateur en bâtiment de niveau 1 ; qu'en mai 2011, la société a été rachetée par la société à responsabilité limitée " Nouvelle société déconstruction plus " (NSDP) ; que par lettre du 29 août 2011, M. D...a été convoqué, le 6 septembre, à un entretien préalable à son licenciement pour faute grave ; que par une décision du 26 septembre 2011, l'inspecteur du travail de la 3ème section de l'inspection du travail de la Haute-Vienne a autorisé le licenciement de M.D..., délégué du personnel, pour faute ; que M. D...a adressé au ministre chargé du travail un recours hiérarchique dirigé contre la décision de l'inspecteur du travail ; que par une décision du 24 février 2012, le ministre a confirmé cette décision ; que M. D...fait appel du jugement du 22 novembre 2012 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégation signature des membres du Gouvernement, dans sa version applicable à la date de la décision attaquée : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : (...) / 2° les chefs de service, directeurs adjoints (...) " ; que, par décret en date du 6 octobre 2011, publié au journal officiel du 7 octobre 2011, M. A...C...a été nommé directeur adjoint au directeur général du travail ; qu'en vertu de l'article 2 du décret du 22 août 2006 relatif à la création de la direction générale du travail, le directeur adjoint assiste le directeur pour l'ensemble de ses attributions, lesquelles comprennent en application de l'article 3 de l'arrêté du même jour relatif à l'organisation de la direction générale du travail, les relations individuelles du travail entre les entreprises et les salariés ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée manque en fait ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-5 du code du travail : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée. (...) " ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, la décision de l'inspecteur du travail du 26 septembre 2011 comporte le visa des textes dont elle fait application ; que la décision du 24 février 2012 du ministre chargé du travail énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle vise notamment l'article L. 2411-5 du code du travail ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ; que, par suite, les moyens tiré de l'insuffisante motivation des décisions contestées doivent être écartés ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1232-4 du même code : " Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. / Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative. / La lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition. " ;

5. Considérant qu'il est constant que la société NSDP n'était pas dépourvue d'institutions représentatives du personnel ; que, dès lors, en application des dispositions précitées, M. D...ne pouvait se faire assister lors de l'entretien préalable au licenciement que d'une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, ce qu'il a d'ailleurs fait en étant assisté de M.G..., délégué du personnel suppléant ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L 1232-2 au motif qu'il n'a pu être assisté d'un personne extérieur à l'entreprise doit, dès lors, être écarté ;

6. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

7. Considérant que le contrat de travail conclu le 24 février 2003 entre M. D...et son employeur stipule que : " (...) Les fonctions de M. D...E...impliquent des déplacements professionnels qui devront être effectués quelles qu'en soient la fréquence et la durée. (...). Pour les besoins du service ou approvisionnement des chantiers, l'entreprise met à la disposition du personnel un véhicule approprié. (...) L'utilisation de ce véhicule est exclusivement réservée aux déplacements nécessaires à l'entreprise. (...) Monsieur D...E...s'engage (...) à se conformer aux directives et instructions émanant de la direction ou de son représentant. (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations et du pouvoir de direction de l'employeur que le chef d'entreprise pouvait demander à M. D...de conduire le véhicule de l'entreprise et d'y transporter d'autres salariés, sans que l'intéressé puisse invoquer le fait qu'il n'était pas chef d'équipe ; que si M. D...avait accepté d'accomplir cette tâche jusqu'au mois de juin 2011, il est constant que le 1er août 2011, il a refusé de conduire le véhicule mis à sa disposition par la société et d'acheminer l'équipe sur le chantier ; qu'il a réitéré ce refus les 22 et 29 août 2011, malgré l'avertissement puis la mise en demeure que lui a successivement notifiés la société les 19 et 22 août 2011, alors que la tâche de conduite du véhicule de l'entreprise correspondait à sa qualification et à ses attributions ;

8. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus de M. D...de conduire le véhicule de l'entreprise avait pour objet de manifester, au nom du personnel et antérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement le concernant, des préoccupations relatives aux conditions de travail dans l'entreprise ou ait été accompagné de réclamations formulées dans l'intérêt collectif des salariés concernés ; qu'ainsi, il n'est pas démontré que la demande de licenciement présentée à l'encontre de l'intéressé serait en lien avec l'exercice de ses fonctions représentatives ;

9. Considérant que, dans ces conditions, le refus réitéré de M. D...de conduire le véhicule destiné à acheminer les membres de l'équipe sur les chantiers alors que cette responsabilité n'excédait pas ses compétences, est constitutif d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; que cette faute suffit à elle seule à justifier l'autorisation de licencier M. D...;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. D...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, y compris les droits de plaidoirie ; qu'il n' y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D...la somme que la Sarl Nouvelle société déconstruction plus demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Sarl Nouvelle société déconstruction plus présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 13BX00538


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00538
Date de la décision : 31/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Bénéfice de la protection - Délégués du personnel.

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation - Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Jean-Emmanuel RICHARD
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : SELARL PREGUIMBEAU - GREZE : AEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-03-31;13bx00538 ?
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