La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/02/2014 | FRANCE | N°13BX02099

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 11 février 2014, 13BX02099


Vu la requête enregistrée le 25 juillet 2013, présentée pour Mme C...E..., demeurant..., par Me Cesso ;

Mme E...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301085 du 27 juin 2013, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 4 mars 2013, refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui déliv

rer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant l'arrêt ...

Vu la requête enregistrée le 25 juillet 2013, présentée pour Mme C...E..., demeurant..., par Me Cesso ;

Mme E...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301085 du 27 juin 2013, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 4 mars 2013, refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2005/CE du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 janvier 2014 :

- le rapport de M. Michel Dronneau, président ;

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;

- les observations de MeA..., collaborateur de Me Cesso avocat de Mme E... ;

Vu les pièces complémentaires produites en délibéré, enregistrées le 14 janvier 2014, présentées pour MmeE... ;

1. Considérant que, par arrêté du 4 mars 2013, le préfet de la Gironde a refusé la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " à MmeE..., ressortissante turque, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite au terme de ce délai ; que Mme E...relève appel du jugement en date du 27 juin 2013, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la légalité de l'arrêté du 4 mars 2013 :

En ce qui concerne l'ensemble des décisions :

2. Considérant que Mme E...se borne à réitérer en appel le moyen, valablement écarté par le tribunal, tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté, sans critiquer le jugement attaqué ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, de rejeter ce moyen ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français " ; que MmeE..., qui avait la possibilité, pendant l'instruction de sa demande, de faire connaître, de manière utile et effective, les éléments justifiant son admission au séjour, ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, elle pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre une décision différente ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans la mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et également méconnu les dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E...est entrée en France le 23 mai 2011 sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 22 juin 2011 ; que sa demande d'asile du 18 octobre 2011, ayant été rejetée par l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides le 26 avril 2012, décision confirmée le 12 octobre 2012 par la Cour nationale du droit d'asile, Mme E...a sollicité, le 4 décembre 2012, un titre de séjour vie privée et familiale en faisant valoir la naissance de sa fille Asmine, née le 18 avril 2012 de son compatriote, M. B...F... ; que si Mme E...soutient que son compagnon est père d'un enfant français né le 4 juillet 2011 d'une précédente union, elle n'établit pas par les documents qu'elle produit qu'à la date de la décision attaquée il contribuait de façon habituelle à l'éducation et à l'entretien de son fils, vivant avec sa mère, de sorte que l'arrêté attaqué du 4 mars 2013 ne fait pas obstacle à la poursuite de leur vie familiale dans leur pays d'origine ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E...n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Turquie où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans ; que l'intéressée ne saurait soutenir valablement qu'elle est insérée dans la société française en se prévalant d'un contrat de travail à durée indéterminée qui aurait été conclu le 7 mars 2013 avec M. D...F..., frère de son compagnon, en qualité de peintre ; que, dans ces conditions, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé le 4 mars 2013 ne méconnaît ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que, pour les mêmes motifs, il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

7. Considérant qu'en application de ces dispositions, il appartenait à l'autorité administrative de vérifier si l'admission exceptionnelle au séjour de Mme E...par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répondait à des considérations humanitaires ou se justifiait au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il était fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire" ; qu'en l'espèce, Mme E...ne saurait se prévaloir utilement du contrat de travail invoqué, conclu postérieurement à la décision attaquée, le 7 mars 2013, avec le frère de son compagnon, M. D... F..., en vue d'exercer le métier de peintre ; qu'elle ne fait état, alors qu'au demeurant sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile, d'aucune circonstance humanitaire ni n'invoque de motifs exceptionnels de nature à lui ouvrir droit à la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le préfet de la Gironde, en refusant de lui délivrer le titre qu'elle sollicitait sur ce fondement, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d' appréciation ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'obligation de quitter le territoire français ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration du délai de départ volontaire ou, si aucun délai n'a été accordé, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, ni avant que le tribunal administratif n'ait statué s'il a été saisi. L'étranger en est informé par la notification écrite de l'obligation de quitter le territoire français. " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E...s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par une décision du préfet de la Gironde du 4 mars 2013 ; qu'à la date de la décision contestée du même jour, ainsi que l'ont relevé les premiers juges à juste titre, elle se trouvait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de MmeE..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à Mme E...la somme qu'elle demande au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.

''

''

''

''

2

No 13BX02099


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02099
Date de la décision : 11/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-02-11;13bx02099 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award