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11/02/2014 | FRANCE | N°13BX02028

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 11 février 2014, 13BX02028


Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Marques-Melchy, avocat ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300646 du 19 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 février 2013 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°)

d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de...

Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Marques-Melchy, avocat ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300646 du 19 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 février 2013 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 janvier 2014 :

- le rapport de Mme Béatrice Duvert, premier conseiller ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant serbe d'origine kosovare, interjette appel du jugement du 19 juin 2013, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2013 du préfet de la Charente-Maritime rejetant sa demande de titre de séjour, assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif de Poitiers le 15 mai 2013, M. B...a soulevé le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le tribunal a omis de statuer sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que le jugement attaqué est ainsi entaché d'une omission à statuer et, par suite, est irrégulier ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de M. B...devant le tribunal administratif dirigées contre l'arrêté du 26 février 2013 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Considérant que M. Tournaire, secrétaire général de la préfecture de la Charente-Maritime, signataire de l'arrêté litigieux, bénéficiait, en vertu d'un arrêté préfectoral du 6 mars 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département de la Charente-Maritime du 8 mars 2012, d'une délégation à l'effet de signer tous actes, correspondances et décisions à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait ;

5. Considérant que l'arrêté contesté comporte l'énonciation des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que contrairement à ce que soutient M.B..., cet arrêté n'avait pas à viser l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lequel la demande de titre de séjour n'était pas fondée et dont le préfet de la Charente-Maritime, même s'il a mentionné que l'intéressé " n'entre dans aucun des autres cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " et doit ainsi être regardé comme ayant examiné sa situation au regard notamment de cet article, n'a pas fait une application spécifique ; que, dès lors, l'arrêté en litige est suffisamment motivé, au sens de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Charente-Maritime a procédé à l'examen particulier de la situation de M.B... ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 du présent code, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. Elle est également délivrée de plein droit au conjoint de cet étranger et à ses enfants dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 lorsque le mariage est antérieur à la date d'obtention de la protection subsidiaire ou, à défaut, lorsqu'il a été célébré depuis au moins un an, sous réserve d'une communauté de vie effective entre époux. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. (...) " ;

7. Considérant que M. B...fait valoir qu'il a épousé à la Rochelle, le 22 décembre 2011, une compatriote titulaire d'une carte de résident en sa qualité de réfugiée politique ; que si le mariage avait ainsi été célébré depuis au moins un an à la date de l'arrêté en litige, le requérant n'établit pas, en se bornant à produire quelques attestations de proches non circonstanciées, une attestation de son épouse faisant seulement état qu'elle subvient à ses besoins quotidiens, une attestation de la caisse d'allocations familiales de la Charente-Maritime du 5 mars 2012 portant mention des deux époux, des avis d'imposition à une même adresse de chacun des époux mais portant sur deux années différentes, ainsi qu'un avis d'imposition et un certificat de scolarité tous deux postérieurs à l'arrêté attaqué, que la communauté de vie entre les époux, qui est contestée en défense, était effective à cette même date ; que si l'intéressé fait état de ce que sa conjointe est enceinte et qu'il a reconnu, de manière anticipée, l'enfant à naître, ces circonstances, qui sont postérieures à l'arrêté en cause, sont sans influence sur sa légalité ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Charente-Maritime aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). " ;

9. Considérant que M.B..., qui est irrégulièrement entré en France en septembre 2011 avec son fils alors âgé de cinq ans, soutient qu'il vit depuis lors avec une compatriote en situation régulière qu'il a épousée le 22 décembre 2011, et dont la qualité de réfugiée politique rend impossible la poursuite d'une vie familiale normale au Kosovo ; que, toutefois, et alors qu'il ressort des propres déclarations de M.B..., que celui-ci a quitté la France entre les mois d'avril et juillet 2012 à la suite du décès de sa grand-mère vivant au Monténégro, le mariage était, à la date de l'arrêté en litige, encore récent ; que si Mme B...est enceinte, depuis le 9 août 2013, d'un enfant que le requérant a reconnu dès avant la naissance, ces circonstances sont, ainsi qu'il a déjà été dit, postérieures à la date de l'arrêté contesté, à laquelle s'apprécie sa légalité ; qu'il ressort en revanche des pièces du dossier que M. B... n'est pas dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et où résident toujours son père et la mère biologique de son fils, avec lesquels il n'établit pas ne plus être en contact ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la courte durée et des conditions du séjour en France de M.B..., qui est revenu sur le territoire national après avoir déjà fait l'objet d'un arrêté préfectoral du 3 février 2012 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, dont la légalité avait été admise par un jugement du tribunal administratif de Poitiers du 24 mai 2012, confirmé par arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 15 janvier 2013, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris, quand bien même son épouse ne pourrait obtenir le bénéfice du regroupement familial ; que, dès lors, le préfet de la Charente-Maritime n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, en tout état de cause, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté en litige, qui n'a pas pour effet de séparer M. B...de son fils, priverait ce dernier de la possibilité de poursuivre sa scolarité ou l'exposerait, compte tenu de son appartenance à la communauté Rom, à vivre une situation angoissante ; que, dès lors, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Charente-Maritime aurait méconnu l'intérêt supérieur de son fils, en violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

11. Considérant que si M. B...fait état de son appartenance à la communauté Rom, l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 novembre 2011, n'apporte aucun élément probant de nature à établir qu'il serait personnellement exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Charente-Maritime aurait méconnu ces stipulations doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 26 février 2013 du préfet de la Charente-Maritime ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1300646 en date du 19 juin 2013 du tribunal administratif de Poitiers est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée.

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N° 13BX02028


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02028
Date de la décision : 11/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: Mme Béatrice DUVERT
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : MARQUES-MELCHY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-02-11;13bx02028 ?
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