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02/12/2013 | FRANCE | N°13BX02843

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des référés, 02 décembre 2013, 13BX02843


Vu la requête enregistrée par télécopie le 22 octobre 2013, et régularisée par courrier le 25 octobre 2013, présentée pour le département de Mayotte, dont le siège est situé 8 rue de l'hôpital, BP 101 à Mamoudzou (97600), représenté par le président du conseil général en exercice, par Me A...;

Le département de Mayotte demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1300378 du 3 octobre 2013 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Mayotte, sur déféré du préfet de Mayotte, a suspendu l'exécution de l'arrêté du 18 mars 2013 du pr

ésident du conseil général de Mayotte portant nomination de M. B... C...en qualité d'adjo...

Vu la requête enregistrée par télécopie le 22 octobre 2013, et régularisée par courrier le 25 octobre 2013, présentée pour le département de Mayotte, dont le siège est situé 8 rue de l'hôpital, BP 101 à Mamoudzou (97600), représenté par le président du conseil général en exercice, par Me A...;

Le département de Mayotte demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1300378 du 3 octobre 2013 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Mayotte, sur déféré du préfet de Mayotte, a suspendu l'exécution de l'arrêté du 18 mars 2013 du président du conseil général de Mayotte portant nomination de M. B... C...en qualité d'adjoint technique territorial de 1ère classe, en tant qu'il reclasse l'intéressé au 3ème échelon de ce grade, indice brut 303 ;

2°) de rejeter la demande de suspension présentée par le préfet de Mayotte devant le tribunal administratif de Mayotte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens ;

Il soutient que :

- le président du conseil général a parfaitement respecté les dispositions du décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 portant organisation des carrières des fonctionnaires de catégorie C, les articles 6 et 6-1 de ce décret n'étant pas contradictoires mais complémentaires ; en effet, aucun indice égal n'existant dans le nouveau grade de M. B...C..., ce dernier a donc été placé dans un échelon à indice supérieur conformément à cet article 6 ; en outre, ayant toujours la qualité d'agent public, l'intéressé remplit les conditions de l'article 6-1 du même décret qui permet une reprise de l'ancienneté égale aux trois quarts de la durée des services civils accomplis ; enfin, la disposition de ce texte selon laquelle la reprise des trois quarts des services antérieurs est applicable aux anciens fonctionnaires civils, ne signifie nullement que l'article 6-1 ne serait pas applicable aux fonctionnaires en activité ; aucun doute sur la légalité de l'arrêté contesté ne peut donc être retenu, et le juge du référé du tribunal administratif de Mayotte a commis une erreur de droit ;

- l'ordonnance attaquée n'est pas suffisamment motivée, le juge des référés n'indiquant pas en quoi le moyen invoqué est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux et en quoi les dispositions de l'article 6-1 du décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 ne seraient pas applicables ;

- le déféré et le référé ayant été signés par le secrétaire général de la préfecture de Mayotte, et non par le préfet, la saisine du tribunal a été faite par une personne incompétente ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

Vu la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 modifiée ;

Vu le décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 modifié ;

Vu le décret n° 87-1108 du 30 décembre 1987 modifié ;

Vu le décret n° 2004-1529 du 30 décembre 2004 modifié ;

Vu le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 15 novembre 2013 par laquelle le président de la cour a désigné notamment M. Bernard Chemin, président de chambre, pour statuer sur les litiges relevant du livre V du code de justice administrative ;

Après avoir, au cours de l'audience publique du 29 novembre 2013, à 11 heures, dont les parties ont été régulièrement avisées, présenté le rapport, les parties n'étant ni présentes, ni représentées ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 3132-1 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 3131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. " ; que le quatrième alinéa du même article, auquel l'article L. 554-1 du code de justice administrative renvoie, dispose : " Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués, parait, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute quant à la légalité de l'acte attaqué. (...). " ;

2. Considérant que M. B... C..., fonctionnaire du cadre d'emplois des ouvriers territoriaux de Mayotte, classé au 3ème échelon du grade d'ouvrier territorial, indice brut 209, a été admis à la session 2012 du concours interne d'adjoint technique territorial de 1ère classe ; que par un arrêté du 18 mars 2013 du président du conseil général de Mayotte, il a été nommé et titularisé dans le cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux à compter du 1er février 2013 au grade d'adjoint technique territorial de 1ère classe, 3ème échelon, indice brut 303 ; que sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 3132-1 du code général des collectivités territoriales, le préfet de Mayotte a déféré cet arrêté au tribunal administratif de Mayotte et présenté une demande tendant à ce que soit ordonnée la suspension de l'exécution dudit arrêté ; que le département de Mayotte fait appel de l'ordonnance du vice-président du tribunal administratif de Mayotte qui a suspendu l'arrêté contesté en tant qu'il classe l'intéressé au 3ème échelon du grade d'adjoint technique territorial de 1ère classe ;

Sur la régularité de l'ordonnance :

3. Considérant qu'après avoir relevé que le préfet de Mayotte soutenait que " M. B... C..., qui avait déjà la qualité de fonctionnaire lorsqu'il a passé avec succès le concours interne d'adjoint technique de 1ère classe, et dont la situation statutaire était plus précisément celle d'un ouvrier territorial de Mayotte, devait être reclassé sur la base des dispositions de l'article 6 du décret du 30 décembre 1987 et non, comme cela a été fait dans le cadre de l'arrêté attaqué, sur la base des dispositions de l'article 6-1 de ce même décret ", le vice-président du tribunal administratif de Mayotte s'est fondé sur ce moyen pour ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 18 mars 2013 ; que le premier juge, qui a ainsi désigné avec suffisamment de précision le moyen qui, en l'état de l'instruction, lui paraissait propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée, n'a pas entaché son ordonnance d'une insuffisance de motivation ;

Sur la recevabilité du déféré :

4. Considérant que le déféré aux fins de suspension a été signé pour le préfet de Mayotte et par délégation de celui-ci par M. François Chauvin, secrétaire général de la préfecture ; que contrairement à ce que soutient le département de Mayotte, la demande ainsi présentée mentionnait expressément que le secrétaire général de la préfecture avait reçu délégation par arrêté préfectoral n° 2013-144 du 18 février 2013 publié au recueil des actes administratifs édition spéciale n° 5.1 du 18 février 2013, lequel est d'ailleurs consultable sur le site internet de la préfecture ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le département et tirée de l'incompétence du signataire du déféré doit être écartée ;

Au fond :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2004-1529 du 30 décembre 2004 portant statut particulier du cadre d'emplois des ouvriers territoriaux de Mayotte, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1164 du 30 septembre 2009 : " Les ouvriers territoriaux de Mayotte constituent un cadre d'emplois hors catégorie au sens du dernier alinéa du II de l'article 64-1 de la loi du 11 juillet 2001 susvisée. / Ce cadre d'emplois comporte un seul grade de six échelons. Les cinq premiers échelons sont d'une durée d'un an. / L'échelonnement indiciaire de ce cadre d'emplois est fixé par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'en vertu de l'article 1er décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des agents techniques territoriaux, les adjoints techniques territoriaux constituent un cadre d'emplois technique de catégorie C au sens de l'article 5 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; qu'en application de l'article 2 du même décret les grades d'adjoint technique territorial de 2ème classe et de 1ère classe de ce cadre d'emplois sont régis par les dispositions des décrets n° 87-1107 et n° 87-1108 du 30 décembre 1987 et relèvent respectivement des échelles 3 et 4 de rémunération ; qu'enfin, en vertu des articles 5 et 6 du décret précité du 22 décembre 2006, les adjoints techniques territoriaux de 1ère classe sont recrutés après inscription sur une liste d'aptitude des candidats déclarés admis à un concours ;

6. Considérant qu'aux termes du I de l'article 5 du décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 portant organisation des carrières des fonctionnaires territoriaux de catégorie C, dans sa rédaction issue du décret n° 2006-1687 du 11 décembre 2006 ; " Les fonctionnaires de catégorie C relevant de grades dotés des échelles de rémunération 3, 4 et 5 qui sont classés par application des règles statutaires à l'un des grades ou emplois relevant des mêmes échelles sont maintenus dans leur nouveau grade à l'échelon dans lequel ils étaient parvenus dans leur précédent grade. / Les intéressés conservent, dans la limite de la durée maximale de service exigée pour l'accès à l'échelon supérieur du nouveau grade, l'ancienneté d'échelon qu'ils avaient acquise dans leur grade antérieur. (...). " ; qu'aux termes du I de l'article 6 du même décret : " Les autres fonctionnaires nommés à l'un des grades dotés des échelles de rémunération 3, 4 ou 5 qui relevaient antérieurement de grades ou emplois dotés d'une échelle indiciaire différente sont classés dans leur nouveau grade à un échelon doté d'un indice égal ou immédiatement supérieur à celui qu'ils détenaient dans leur situation antérieure. / (...) Les intéressés conservent, dans la limite de la durée maximale de service exigée pour l'accès à l'échelon supérieur du nouveau grade, l'ancienneté d'échelon qu'ils avaient acquise dans leur grade antérieur. " ; qu'enfin, aux termes de l'article 6-1 de ce même décret : " Les personnes nommées fonctionnaires dans un grade de catégorie C doté des échelles de rémunération 3, 4 ou 5 qui ont, ou avaient eu auparavant, la qualité d'agent public, sont classées avec une reprise d'ancienneté égale aux trois quarts de la durée des services civils qu'ils ont accomplis, le cas échéant après calcul de conversion en équivalent temps plein. Ce classement est opéré sur la base de la durée maximale de chacun des échelons du grade dans lequel ils sont intégrés. / (...) / La règle de la reprise des trois quarts des services antérieurs mentionnée au premier alinéa est applicable aux anciens fonctionnaires civils (...). " ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que seules peuvent bénéficier de la reprise des trois quarts des services antérieurs accomplis en qualité notamment d'agents publics ou d'anciens fonctionnaires civils prévue à l'article 6-1 du décret du 30 décembre 1987, les personnes qui sont nommées fonctionnaires dans un grade de catégorie C doté des échelles de rémunération 3, 4 ou 5 d'un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale ; que ces dispositions ne sont pas applicables en revanche aux agents qui ont déjà la qualité de fonctionnaire lorsqu'ils sont nommés dans un tel grade ;

8. Considérant qu'il est constant que M. B... C...avait la qualité de fonctionnaire du cadre d'emplois des ouvriers territoriaux de Mayotte, lorsque le président du conseil général de Mayotte l'a nommé et titularisé dans le grade d'adjoint technique territorial de 1ère classe à la suite de son admission à ce concours ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'intéressé ne pouvait, dans son nouveau grade, bénéficier, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 6-1 du décret du 30 décembre 1987, d'un classement avec reprise d'ancienneté des services antérieurs qu'il avait accomplis, est de nature en l'état de l'instruction, ainsi que l'a estimé à bon droit le premier juge, à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté du 18 mars 2013 ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le département de Mayotte n'est pas fondé pas à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du tribunal administratif de Mayotte a suspendu l'exécution de l'arrêté contesté ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le département de Mayotte demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

ORDONNE :

Article 1er : La requête du département de Mayotte est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au département de Mayotte, au ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, au ministre des outre-mer et à M. B...C.... Copie en sera transmise au préfet de Mayotte.

Fait à Bordeaux, le 2 décembre 2013.

Le juge d'appel des référés,

Bernard Chemin

La République mande et ordonne au ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique et au ministre des outre-mer, chacun en ce qui les concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

André Gauchon

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No 13BX02843


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 13BX02843
Date de la décision : 02/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Suspension sursis

Analyses

135-01-015-03 Collectivités territoriales. Dispositions générales. Contrôle de la légalité des actes des autorités locales. Déféré assorti d'une demande de sursis à exécution.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Avocat(s) : SELAS LLC ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-12-02;13bx02843 ?
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