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05/11/2013 | FRANCE | N°13BX00825

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 05 novembre 2013, 13BX00825


Vu la requête enregistrée le 15 mars 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 18 mars 2013, présentée pour M. B...C...demeurant à ...par MeA... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202048 du 15 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 16 octobre 2012 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30

jours et d'une décision fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloig...

Vu la requête enregistrée le 15 mars 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 18 mars 2013, présentée pour M. B...C...demeurant à ...par MeA... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202048 du 15 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 16 octobre 2012 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et d'une décision fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral du 16 octobre 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 2013 le rapport de M. Jean-Pierre Valeins, président assesseur ;

1. Considérant que le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pris à l'encontre de M. C..., le 16 octobre 2012, un arrêté lui refusant le titre de séjour qu'il sollicitait, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et fixant le pays à destination duquel il serait reconduit ; que, par un jugement du 15 janvier 2013, le tribunal administratif de Pau a rejeté la demande d'annulation de cet arrêté présentée par M. C...; que M. C...interjette appel de ce jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral :

En ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire:

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'indication des pièces à fournir par l'étranger qui sollicite son admission au séjour au titre de l'asile en application du présent article est portée à sa connaissance par les services de la préfecture. Ces derniers remettent alors à l'étranger un document d'information sur ses droits et sur les obligations qu'il doit respecter eu égard aux conditions d'accueil des demandeurs d'asile, ainsi que sur les organisations qui assurent une assistance juridique spécifique et celles susceptibles de l'aider ou de l'informer sur les conditions d'accueil dont il peut bénéficier, y compris les soins médicaux. Cette information se fait dans une langue dont il est raisonnable de penser que le demandeur d'asile la comprend " ;

3. Considérant qu'eu égard à l'objet de ce document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, sur les organisations susceptibles de leur procurer une assistance juridique, de les aider ou de les informer sur les conditions d'accueil qui peuvent leur être proposées, la remise de ce document doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile, ainsi que le prévoit l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, dans le respect notamment des délais prévus ; que si le défaut de remise de ce document à ce stade est ainsi de nature à faire obstacle au déclenchement du délai de vingt et un jours prévu par l'article R. 723-1 pour saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, en revanche, il ne peut être utilement invoqué à l'appui d'un recours qui, comme en l'espèce, met en cause la légalité de la décision par laquelle le préfet statue, en fin de procédure, après intervention de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, sur le séjour en France au titre de l'asile ou à un autre titre ; que, par suite, le moyen invoqué tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ;

5. Considérant que M.C..., de nationalité russe et d'origine tchétchène, est entré en France accompagné de sa famille, selon ses déclarations, en août 2009, alors qu'il était âgé de 38 ans ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, il ne résidait en France que depuis 3 ans et 2 mois ; que, si le requérant soutient qu'il vit en France avec son épouse, elle-même de nationalité russe d'origine tchétchène et leurs 6 enfants âgés de 14 à 3 ans à la date de l'arrêté attaqué, que ses enfants sont scolarisés et que sa soeur vit en France, rien ne fait obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en Pologne, pays duquel l'intéressé a obtenu en 2010 un titre de séjour en qualité de réfugié et où il résidait auparavant avec sa famille, son épouse étant elle-même dépourvue de titre de séjour en France; que, dans ces conditions, eu égard notamment à la brièveté du séjour en France de l'intéressé, par les décisions attaquées, le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'a pas porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'il n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, que M. C...soutient que les décisions en cause sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet n'a pas pris la mesure des risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine ou en Pologne ; qu'il ressort toutefois des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le requérant doit être reconduit en priorité en Pologne ; que les pièces du dossier ne permettent pas d'établir la réalité des menaces qu'il déclare avoir subies en Pologne ni le défaut de protection des autorités polonaises, ainsi d'ailleurs que l'a jugé la Cour nationale du droit d'asile refusant de reconnaître à l'intéressé la qualité de réfugié; que le moyen invoqué n'est donc pas fondé ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant, signée le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

8. Considérant que si M. C...fait valoir que les décisions attaquées vont mettre fin à l'équilibre que ses enfants ont su trouver en France dans leur vie et leur famille, il n'invoque aucun élément susceptible d'établir que cet équilibre ne pourrait pas être retrouvé en Pologne où sa famille vivait auparavant et alors que ces décisions n'ont pas pour effet de contraindre M. C... à se séparer de ses enfants et de son épouse ; que, si M. C...soutient que deux de ses enfants ont passé la majorité de leur scolarité en France, il n'invoque aucun élément tendant à établir qu'ils ne pourraient pas reprendre une scolarité normale en Pologne ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à prétendre que le préfet des Pyrénées-Atlantiques aurait méconnu les stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

9. Considérant que les décisions refusant à M. C...un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire n'étant pas entachées d'illégalité, la décision fixant de délai de départ volontaire ne se trouve pas privée de base légale ;

10. Considérant que selon les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

11. Considérant que M. C...soutient que la décision fixant à 30 jours le délai pour quitter le territoire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que ses 6 enfants étant scolarisés, le délai accordé aurait dû être supérieur ; que toutefois le moyen n'est pas fondé dès lors que l'arrêté attaqué ayant été pris le 16 octobre 2012 l'année scolaire avait à peine commencé ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

12. Considérant que les décisions refusant à M. C...un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire n'étant pas entachées d'illégalité, la décision fixant le pays de renvoi ne se trouve pas privée de base légale ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

14. Considérant que M. C...soutient qu'en raison de son engagement passé, militaire et politique, en faveur de l'indépendance de la Tchétchénie, il encourt en Pologne des risques de traitements inhumains ou dégradants du fait de menaces de représailles dans ce pays qui auraient été proférées par des partisans des autorités officielles tchétchènes; que toutefois, en se bornant à produire un document intitulé " Rapport de l'Association des peuples menacés " qui constitue seulement une critique des conditions de vie des réfugiés en Pologne ainsi que deux articles de presse relatifs aux poursuites pour terrorisme dont le chef du gouvernement tchétchène en exil fait l'objet, M. C...n'apporte pas d'éléments suffisamment probants à l'appui de ses allégations de nature à établir le caractère personnel et direct des risques auxquels il prétend être exposé ; que, dans ces conditions, en fixant la Pologne, qui a accordé au requérant le statut de réfugié, comme pays de destination, le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 16 octobre 2012 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M.C..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Pyrénées-Atlantiques de délivrer à M. C...un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. C...à ce titre au bénéfice de son avocat ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

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No 13BX00825


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00825
Date de la décision : 05/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARRACO
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : MOURA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-11-05;13bx00825 ?
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