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17/10/2013 | FRANCE | N°13BX00701

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 17 octobre 2013, 13BX00701


Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 14 mars 2013, présentée pour Mme A...C...épouse D...demeurant..., par MeB... ;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1202892 du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 24 mai 2012 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé comme pays de de

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Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 14 mars 2013, présentée pour Mme A...C...épouse D...demeurant..., par MeB... ;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1202892 du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 24 mai 2012 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé comme pays de destination le pays dont elle a la nationalité ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour assorti d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 septembre 2013 :

- le rapport de Mme Catherine Monbrun, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeD..., ressortissante arménienne née le 19 décembre 1967, est entrée en France le 12 novembre 2009 selon ses déclarations, accompagnée de son époux et de leurs deux enfants, et y a sollicité l'asile ; que sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 22 juillet 2010, refus confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 8 juin 2011 ; que, le 13 septembre 2011, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en tant qu'étranger malade ; que par arrêté du 24 mai 2012, le préfet du Tarn a refusé de l'admettre au séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Arménie comme pays de destination ; que Mme D...fait appel du jugement en date du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande à fin d'annulation de l'arrêté du 24 mai 2012 précité ;

Sur le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que par arrêté du 25 octobre 2011, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n°263 d'octobre 2011 de la préfecture du Tarn, le préfet du Tarn a donné à Mme Béatrice Steffan, secrétaire générale de la préfecture, délégation dépourvue de caractère général pour signer notamment les arrêtés relevant des attributions de l'Etat dans le département et, par voie de conséquence, ceux portant refus des titres de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur manque en fait ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de séjour vise les textes sur lesquels elle se fonde, notamment les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle comporte, en outre, l'ensemble des éléments déterminants de la situation de Mme D...au regard du séjour, de son état de santé, de sa vie privée et familiale, ainsi que des risques qu'elle pourrait encourir en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, la décision en litige, qui énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent, est suffisamment motivée au regard des exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'en outre, cette motivation n'est pas de nature à révéler que le préfet se serait abstenu de procéder à l'examen de la situation personnelle et familiale de la requérante ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le 15 mars 2012, le médecin de l'agence régionale de santé Midi-Pyrénées, consulté par le préfet du Tarn sur la demande de titre de séjour de MmeD..., a précisé que l'état de santé de celle-ci nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existait un traitement dans le pays d'origine de l'intéressée, que les soins nécessités par son état de santé devaient être poursuivis pendant six mois et qu'il existait une contre-indication médicale au port de charges lourdes et aux longs trajets ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de saisine du médecin de l'agence régionale de santé manque en fait ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que le préfet n'avait aucune obligation, préalablement à l'édiction de l'arrêté contesté, de communiquer à la requérante l'avis émis sur son cas par le médecin de l'agence régionale de santé ; que cet avis a été communiqué par le préfet dans le cadre de l'instance introduite par Mme D...devant le tribunal administratif de Toulouse ; que, dès lors, et en tout état de cause, le moyen tiré du défaut de communication dudit avis ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en cinquième lieu, que si le préfet s'est approprié les termes de l'avis émis le 15 mars 2012 par le médecin de l'agence régionale de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait estimé lié par cet avis et qu'il aurait ainsi entaché sa décision d'une erreur de droit ;

7. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ;

8. Considérant qu'il ressort de l'avis susmentionné du 15 mars 2012 qu'il existe un traitement approprié en Arménie pour la prise en charge médicale de MmeD... ; que la requérante n'apporte, à l'appui de ses allégations, aucun élément permettant de remettre en cause cette appréciation ; que notamment, le certificat médical établi le 30 décembre 2011 par un médecin généraliste et qui indique que Mme D...présente une lombosciatalgie droite sur hernie discale opérée en septembre 2011 et des crises migraineuses invalidantes ayant nécessité une hospitalisation, ne fait pas état de l'impossibilité pour celle-ci de se soigner en Arménie ; que doivent être également écartés les certificats établis les 31 mai et 7 août 2012 dès lors qu'ils sont postérieurs à la décision attaquée et qu'au surplus, ils ne font que reprendre les éléments déjà relevés selon lesquels la pathologie de l'intéressée nécessite un suivi médical ainsi qu'une exploration complémentaire par IRM ; que, par ailleurs, Mme D...ne démontre pas, par la production d'un certificat médical en date du 21 janvier 2013 émanant d'un psychiatre, que la pathologie psychiatrique qu'elle a développée postérieurement à la décision attaquée, et dont le préfet n'a pas été informé, ne pourrait pas être également traitée dans son pays d'origine ; qu'enfin, elle ne peut utilement se prévaloir de l'éloignement de son domicile par rapport à la capitale arménienne, Erevan, ni des discriminations, au demeurant non établies, dont elle ferait l'objet en tant qu'arménienne d'origine azérie, pour établir l'absence de traitement approprié à son état de santé ; que, dans ces conditions, en lui refusant le titre de séjour qu'elle sollicitait, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant, en dernier lieu, que Mme D...est entrée irrégulièrement en France à l'âge de 42 ans et qu'à la date de la décision en litige, elle ne justifiait pas d'une durée importante de séjour en France ; que, par ailleurs, elle n'établit pas être dépourvue de toute attache privée et familiale dans son pays d'origine ; qu'enfin, son époux fait l'objet d'une mesure similaire en date du 22 juin 2012 ; qu'en se bornant à soutenir que sa cellule familiale est installée en France depuis deux années et qu'elle fait des efforts d'intégration par l'apprentissage de la langue française, la requérante n'établit pas que le refus de séjour attaqué serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, qu'aucun des moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour n'étant fondé , Mme D...ne peut exciper de l'illégalité de cette décision pour contester celle l'obligeant à quitter le territoire français ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de motivation des actes administratifs ; que l'arrêté en litige, vise les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fondent l'obligation de quitter le territoire français et dispensent l'obligation de quitter le territoire français de motivation spécifique ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier ainsi que des mentions de la décision litigieuse que le préfet du Tarn, qui a procédé à un examen particulier de la situation de MmeD..., ne s'est pas estimé en situation de compétence liée pour faire obligation à celle-ci de quitter le territoire français ;

13. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

14. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, dans des conditions contraires aux stipulations à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

15. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ;

16. Considérant que MmeD..., dont la demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile, ne produit aucun document précis et probant de nature à établir la réalité des violences et des discriminations qu'elle-même et son époux auraient endurées du fait de ses origines azéries ; qu'elle n'établit pas plus, notamment en se bornant à invoquer sa pathologie psychiatrique récente, l'existence de risques auxquels elle serait personnellement et actuellement exposée en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mai 2012 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

18. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mai 2012, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les frais exposés non compris dans les dépens :

19. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné à verser la somme que Mme D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

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N° 13BX007012


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00701
Date de la décision : 17/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Catherine MONBRUN
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DUJARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-10-17;13bx00701 ?
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