Vu la requête enregistrée le 10 janvier 2012, présentée pour la SARL Malmezat Prat mandataire judiciaire liquidateur de la SA France Meuble Association (FMA), 123 avenue Thiers à Bordeaux (33100) par MeA... ;
La SARL Malmezat Prat demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0902745 en date du 10 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt établies au nom de la SA FMA au titre des années 2002 à 2004, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 septembre 2013 :
- le rapport de M. Philippe Cristille, premier-conseiller ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
1. Considérant que la société France Meubles Association (FMA), dont le siège est à Mérignac, a pour activité la fabrication, la vente en gros et au détail de meubles, d'articles ménagers et d'accessoires de décoration ; que cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 ; que l'administration, estimant qu'il existait entre la société FMA et la société Tanner Trading Limited (TTL), société de droit anglais qui a pour actionnaires deux sociétés dont les sièges sont situés sur l'île de Man, un lien de dépendance et que le prix auquel la société FMA achetait ses meubles à la société TTL était anormalement élevé, a, sur le fondement des dispositions de l'article 57 du code général des impôts réintroduit dans les résultats de chacun des exercices vérifiés de la société française la différence entre le prix auquel celle-ci achetait ses meubles à la société TTL et le prix d'acquisition de ces mêmes meubles par la société TTL, soit les sommes de 332 911 euros au titre de l'année 2002, de 339 105 euros au titre de l'année 2003 et de 492 891 euros pour 2004 ; qu'il s'en est suivi pour la société FMA des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt ainsi que des pénalités pour manquement délibéré ; que la SARL Malmezat Prat, mandataire liquidateur de la société FMA, a contesté cette imposition supplémentaire devant le tribunal administratif de Bordeaux qui par un jugement du 10 novembre 2011 a rejeté sa demande ; que la société FMA représentée par son liquidateur judiciaire fait appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 57 du code général des impôts rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 dans la rédaction modifiée par la loi du 12 avril 1996 : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France. (...° ) A défaut d'éléments précis pour opérer les rectifications prévues (...), les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement " ;
3. Considérant que l'article 57 du code général des impôts n'institue de présomption de l'existence d'un transfert indirect de bénéfices par une société assujettie à l'impôt sur les sociétés en France vers l'étranger que lorsque l'administration fiscale a établi, d'une part, l'existence de liens de contrôle ou de dépendance entre cette société et des entreprises situées hors de France, sauf dans l'hypothèse, pour laquelle cette condition n'est pas exigée, où ces dernières sont établies dans un Etat étranger ou dans un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié au sens du deuxième alinéa de l'article 238 A du code général des impôts, et, d'autre part, l'octroi d'avantages consentis par cette société à ces entreprises ; qu'il s'agit d'une présomption simple, que la société contribuable peut combattre en apportant la preuve que ces avantages ont été justifiés par l'obtention de contreparties favorables à sa propre exploitation et ne constituent pas un transfert indirect de bénéfices ;
4. Considérant que pour établir la dépendance de la société TTL à l'égard de la société FMA, l'administration s'est fondée sur les éléments obtenus à la suite, d'une part, d'une demande d'assistance internationale auprès, en particulier, de la Grande Bretagne, et d'autre part, de la procédure de saisie et de la perquisition prévue à l'article 16 B du livre des procédures fiscales ; qu'il ressort des constatations concernant la société TTL, faites sur place dans le cadre de l'assistance internationale et dont la teneur n'est pas sérieusement discutée, que l'adresse de cette société est une simple domiciliation, que la société, identifiée dans la catégorie " autres activités commerciales non classifiées par ailleurs ", ne dispose pas d'immobilisation, ne paie pas de loyer et n'emploie pas de personnel ; qu'en dépit de leur caractère quelquefois fragmentaire, les pièces saisies par l'administration fournissent des indices suffisants de la dépendance de fait de la société TTL à l'égard de la société FMA ; que ces documents révèlent ainsi que les associés et le personnel de la société FMA prenaient des décisions commerciales pour le compte de la société TTL et accomplissaient à son profit une suite d'opérations commerciales depuis l'achat de meubles jusqu'à leur livraison sans qu'il soit démontré que leur intervention n'aurait concerné que quelques commandes spéciales ainsi qu'il est soutenu ; qu'à cet égard, ces documents font ressortir que les membres de la société FMA ont signé et adressé directement des bons de commande à en-tête de la société TTL à des fabricants de meubles, que les marchandises commandées étaient ensuite adressées par le fournisseur à la société FMA et réceptionnées par celle-ci sans transiter par la société TTL, que les factures adressées par les fournisseurs à la société TTL étaient transmises directement à Mérignac au siège de la société FMA et que les factures de la société TTL à la société FMA étaient établies par le personnel de cette dernière ; que, par ailleurs, des notes émanant de la secrétaire commerciale de la société FMA ont été transmises à l'associé principal de la société FMA pour l'informer du suivi du paiement des fournisseurs de TTL ; qu'il ressort ainsi de l'ensemble de ces éléments que la société TTL s'intercalait dans le circuit de commercialisation entre les fournisseurs de meubles et la société FMA sans effectuer de réelles prestations au profit de cette dernière, laquelle assurait en fait elle-même son approvisionnement ; que la société TTL doit ainsi être regardée, au sens des dispositions précitées de l'article 57 du code général des impôts, comme étant sous la dépendance de fait de la société FMA ;
5. Considérant que la société requérante conteste que les prix de vente de la société TTL aient été majorés et qu'elle ait consenti à cette société un avantage au sens de l'article 57 du code général des impôts ; qu'à cet égard, elle fait valoir que l'administration, sur qui repose la charge de la preuve d'un transfert de bénéfices, ne propose aucun élément de comparaison avec les prix pratiqués pour de telles transactions par des entreprises similaires exploitées normalement sans lien de dépendance et permettant d'établir, en l'espèce, la majoration du prix d'achat ; que, toutefois, l'administration établit de manière précise, à partir des factures établies au nom de la société TTL, que le volume des approvisionnements de la société FMA auprès de la société TTL s'est notablement accru au cours des années vérifiées passant de 20% en 2002 à 33% en 2003 puis à 50% en 2004 et que, concomitamment les prix auxquels la société FMA a acheté les meubles à la société TTL ont augmenté, la marge réalisée par la société TTL sur les achats de meubles effectués par la société FMA passant de 9,84 % à 25,4% au cours de la même période alors que la marge commerciale dégagée par la société FMA qui se montait à 45,02% en 1999 a chuté aux alentours de 11% entre 2002 et 2004 ; que, de façon générale, ainsi que le fait valoir l'administration, la société FMA a payé nécessairement plus chers les meubles qu'elle achetait en passant ses commandes à TTL qu'elle ne les aurait payés en les commandant directement aux fabricants, alors que la société TTL est un intermédiaire qui, ainsi qu'il été dit précédemment, ne fournissait pas de réelles prestations en contrepartie de son interposition ; qu'ainsi, l'administration démontre que la société FMA a consenti un avantage à la société TTL et que cet avantage est égal à la marge réalisée par cette société sur les prix facturés à la société FMA ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société FMA représentée par la SARL Malmezat Prat n'est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés par la société FMA représentée par son mandataire liquidateur et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Malmezat Prat mandataire judiciaire liquidateur de la SA France Meubles Association est rejetée.
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N°12BX00050