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26/07/2013 | FRANCE | N°12BX02731

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 26 juillet 2013, 12BX02731


Vu la requête enregistrée le 24 octobre 2012, présentée pour Mme E...F..., élisant domicile..., par Me A...;

Mme F...demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1201719 du 16 juillet 2012 du président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 21 février 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ou de tout autre pays dans

lequel elle établit être légalement admissible et prononçant une interdiction d...

Vu la requête enregistrée le 24 octobre 2012, présentée pour Mme E...F..., élisant domicile..., par Me A...;

Mme F...demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1201719 du 16 juillet 2012 du président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 21 février 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ou de tout autre pays dans lequel elle établit être légalement admissible et prononçant une interdiction de retour en France pendant deux ans ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour vie privée et familiale ou, à défaut, de lui enjoindre de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer son droit au séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de son conseil sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- il appartient au préfet de justifier de ce que MmeC..., signataire de l'arrêté, disposait d'une délégation de pouvoir en bonne et due forme ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la requête comportait les précisions nécessaires afin d'en apprécier le bien-fondé ; l'intégralité des pièces justificatives a été versée aux débats ; le tribunal ne pouvait valablement rejeter sa requête par ordonnance ; le fond du dossier n'a pas été étudié par le tribunal, de sorte qu'elle a été privée d'un degré de juridiction ;

- l'article L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;

- le préfet n'a pas produit l'avis du médecin inspecteur ; c'est à tort que ce dernier a estimé que le défaut de prise en charge de son état de santé ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; elle fournit à cet égard de nombreux certificats médicaux pour en attester ; elle souffre de graves problèmes gynécologiques et orthopédiques ayant nécessité de nombreuses hospitalisations ;

- il appartient au préfet de démontrer qu'elle pourra effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ; en effet, sa vie privée et familiale est construite en France depuis de nombreuses années, bien qu'elle ait fait l'objet de deux obligations de quitter le territoire français par le passé et que son fils soit en situation irrégulière ; elle est entrée en France en 2005 avec son fils alors âgé de 16 ans ; ce dernier est étudiant, vit en concubinage avec une ressortissante française avec laquelle il a eu une petite fille née le 14 août 2010 ; la situation de son fils est en cours de régularisation ;

- le préfet, en lui refusant le séjour, a commis une erreur manifeste d'appréciation tant au regard de son état de santé que de sa vie privée et familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire français viole l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les raisons déjà exposées ;

- cette mesure est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans ses conséquences au regard de son état de santé et de sa vie privée et familiale ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 511-1, III alinéa 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que des articles 11,2° et 12 de la directive n° 2008/15/CE du 16 décembre 2008 ; aucune motivation ne vient au soutien de cette décision ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français n'est pas justifiée au fond, d'autant qu'elle est prononcée pour deux ans ; sa présence ne constitue en rien une menace pour l'ordre public ; la mesure est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi contrevient à l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en cas de retour dans son pays d'origine, sa vie ou sa liberté, ainsi que celles de son fils, y seraient menacées, puisqu'ils ont fuit la Russie ;

- cette décision contrevient donc à l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le simple fait d'avoir été déboutée de sa demande d'asile ne lie pas le préfet ;

Vu l'ordonnance et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 16 avril 2012 fixant la clôture de l'instruction au 15 mai 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 20 septembre 2012 accordant à Mme F...l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2013 :

- le rapport de Mme Florence-Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme E...D..., épouseF..., de nationalité russe, née en 1967, est entrée irrégulièrement en France, le 26 juillet 2005, accompagnée de son fils mineur, B..., et y a sollicité l'asile ; que sa demande a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides le 28 février 2006 et par la commission des recours des réfugiés, le 16 novembre 2007 ; qu'à la suite de ce rejet, Mme F...a fait l'objet d'un premier refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français à destination de la Russie par un arrêté du préfet de la Gironde du 4 janvier 2008 dont la légalité a été confirmée par arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 5 mai 2009 ; que le 16 mars 2009, Mme F... a saisi le préfet de la Gironde d'une demande de régularisation de sa situation sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 18 juin 2009, le préfet de la Gironde a de nouveau refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français en fixant la Russie comme pays de renvoi, arrêté dont la légalité a été confirmée par la cour le 14 décembre 2010 ; que, le 17 octobre 2011, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 21 février 2012, le préfet de la Gironde lui a refusé le titre de séjour sollicité en lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et en fixant le pays de renvoi, et a prononcé une interdiction de retour en France pendant une durée de deux ans ; que Mme F... fait appel de l'ordonnance du 16 juillet 2012 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que la demande de présentée par Mme F...devant le tribunal administratif comportait de nombreux moyens, dont certains n'étaient pas dépourvus des précisions nécessaires permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'en outre, la requérante avait produit le 13 juin 2012, avant que le premier juge ne se prononce, de nombreuses pièces à l'appui de ses écritures ; que, dans ces conditions, c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le tribunal administratif a rejeté la requête de Mme F... sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative; que, par suite, cette ordonnance doit être annulée ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme F...devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

4. Considérant que l'arrêté attaqué a été signé par Mme Isabelle Dilhac, secrétaire générale de la préfecture de la Gironde, qui disposait d'une délégation de signature consentie par arrêté du préfet du 1er février 2012, régulièrement publiée au recueil spécial des actes administratifs n° 5 de la préfecture de la Gironde, à l'effet de signer " toutes décisions de refus de délivrance de titres de séjour " ainsi que " toutes décisions d'éloignement et décisions accessoires s'y rapportant prises en application du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...). " ; que selon l'article R. 313-22 du même code, " l'avis [du médecin de l'agence régionale de santé] est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 14 et 15 décembre 2011, dont la teneur, non contestée, est intégralement reproduite par l'arrêté attaqué, que si l'état de santé de Mme F...nécessite un suivi médical, le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et il n'existe aucune contre-indication médicale au voyage ; que si les certificats médicaux que produit Mme F... établissent qu'elle souffre d'une pathologie gynécologique nécessitant un suivi régulier, ainsi que d'une pathologie podologique suite au traitement chirurgical d'un hallus valgus au pied droit, ces mêmes documents ne démontrent pas, comme elle le soutient, que le défaut de prise en charge médicale devrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que les dispositions de l'article L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font pas obligation au préfet d'examiner l'accessibilité aux soins dès lors qu'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante se serait prévalue devant lui de circonstances particulières ou exceptionnelles l'empêchant effectivement d'y accéder ; qu'en l'espèce, Mme F..., qui ne conteste pas l'existence d'un traitement approprié en Russie pour les pathologies dont elle souffre, ne fait valoir aucune circonstance particulière qui lui en interdirait l'accès effectif ; qu'ainsi, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ; 2. Il ne peut y avoir d'ingérence dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que Mme F...fait valoir qu'elle est entrée en France en 2005, accompagnée de son fils alors âgé de 16 ans, que la situation de celui-ci, qui vit désormais en concubinage avec une ressortissante française avec laquelle il a eu une petite fille née en août 2010, est en cours de régularisation et qu'ainsi sa vie privée et familiale est désormais en France ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que l'intéressée, dont les demandes d'asile ont été rejetées et qui, malgré deux arrêtés portant obligation de quitter le territoire français, s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français, il ne fait pas valoir que son époux vivrait en France, que son fils est désormais majeur et n'est plus à sa charge ; qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de 38 ans dans son pays d'origine où elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales et personnelles ; qu'elle ne justifie d'aucune intégration sociale ou professionnelle particulière depuis son entrée en France ; que, par suite, le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus qui lui ont été opposés et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant que pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus au point 7, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de la requérante doivent être écartés ;

En ce qui concerne la fixation du pays de renvoi :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ", et qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ;

10. Considérant que Mme F...soutient que sa liberté ou sa vie seraient menacées en cas de retour en Russie ; que cependant, son seul " récit de vie " produit en pièce jointe à son mémoire de première instance, d'après lequel elle dit avoir fui son pays en raison de persécutions qu'elle aurait subie du fait de sa confession juive, ne suffit pas à établir qu'elle encourrait des risques personnels et actuels dans son pays d'origine, alors qu'au demeurant sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis par la commission de recours des réfugiés ; que, dans ces conditions, la décision du préfet de la Gironde désignant le pays de destination ne saurait être regardée comme ayant méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, non plus que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la directive n° 2008/15/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats-membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier : " 1. Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent les informations relatives aux voies de recours disponibles " ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir directement des dispositions de cette directive au soutien de son moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre le 21 février 2012, dès lors qu'à la date de l'arrêté attaqué, ladite directive avait été transposée en droit interne ;

12. Considérant qu'aux termes du paragraphe III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) " ;

13. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la motivation de la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs, et doit notamment attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi ;

14. Considérant que la motivation de l'arrêté litigieux ne fait pas ressortir que le préfet ait pris en compte la menace pour l'ordre public que représenterait la présence sur le territoire français de Mme F...; que, dans ces conditions, cet arrêté doit être regardé comme insuffisamment motivé en tant qu'il interdit à Mme F...le retour sur le territoire français pendant une période de deux ans ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, cette mesure d'interdiction doit être annulée ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme F...est seulement fondée à demander l'annulation de la mesure portant interdiction de retour sur le territoire français contenue dans l'arrêté du 21 février 2012 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Considérant que le présent arrêt annule la seule interdiction de retour sur le territoire français contenue dans l'arrêté contesté ; que cette annulation n'implique pas d'autre mesure d'exécution que celle consistant à ce que le signalement de Mme F...aux fins de non-admission soit supprimé dans le système d'information Schengen; que, par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer son droit au séjour, doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

17. Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante pour l'essentiel, les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent être accueillies ;

DECIDE

Article 1er : L'ordonnance n° 1201719 du 16 juillet 2012 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux est annulée.

Article 2 : L'arrêté du 21 février 2012 du préfet de la Gironde est annulé en tant qu'il prononce à l'encontre de Mme F...une interdiction de retour sur le territoire français.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par Mme F...devant le tribunal administratif de Bordeaux et de sa requête devant la cour est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...F...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bernard Chemin, président,

M. Jean-Emmanuel Richard, premier conseiller,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 26 juillet 2013.

Le rapporteur,

Florence Rey-GabriacLe président,

Bernard Chemin

Le greffier,

André Gauchon

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

André Gauchon

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No 12BX02731


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX02731
Date de la décision : 26/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : DUTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-07-26;12bx02731 ?
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