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19/02/2013 | FRANCE | N°12BX01469

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 19 février 2013, 12BX01469


Vu la requête enregistrée le 13 juin 2012, présentée pour M. B...A..., demeurant au..., par Me Breillat, avocat ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200363 du 16 mai 2012 en tant que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Vienne du 9 janvier 2012 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2012 du préfet de la V

ienne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer une carte de séjour ...

Vu la requête enregistrée le 13 juin 2012, présentée pour M. B...A..., demeurant au..., par Me Breillat, avocat ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200363 du 16 mai 2012 en tant que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Vienne du 9 janvier 2012 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2012 du préfet de la Vienne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente d'une nouvelle décision sur sa situation ;

4°) d'enjoindre à l'administration d'examiner de nouveau sa situation dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat à verser à son conseil une somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de New-York relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2013 :

- le rapport de M. Bernard Chemin, président ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila rapporteur public ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité géorgienne, relève appel du jugement du 16 mai 2012 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Vienne du 9 janvier 2012 portant rejet de sa demande de titre de séjour obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'ainsi que l'a relevé le tribunal administratif, M. Setbon, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, disposait d'une délégation de signature du préfet en date du 22 août 2011, régulièrement publiée au recueil des actes de la préfecture de la Vienne n° 37 du 24 août 2011, dont l'article 4 indiquait, s'agissant du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'elle portait sur " l'ensemble des dispositions " de ce code ; que contrairement à ce que soutient le requérant, ladite délégation était ainsi parfaitement précise ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit, dès lors, être écarté ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. Considérant que l'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application, notamment les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il précise les éléments relatifs à la situation personnelle de M. A...en particulier, sa demande d'asile rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 31 mai 2011 que par la Cour nationale du droit d'asile le 15 décembre 2011, le fait qu'il n'a pas justifié d'une entrée régulière en France, qu'il ne remplit pas les conditions de l'article L. 314-11, 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale dans la mesure où son épouse fait également l'objet d'une mesure d'éloignement, que la présence d'enfants mineurs scolarisés ne fait pas obstacle à l'éloignement dès lors que les parents peuvent les emmener avec eux, et enfin que M. A...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que le préfet de la Vienne a ainsi suffisamment motivé, en droit et en fait, sa décision, alors même qu'il n'a pas précisé que M. A...est père d'un enfant né sur le territoire âgé d'un an, ni les origines kurdes yézides de l'intéressé ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...). " ;

5. Considérant que M. A...affirme qu'il est bien inséré dans la société française, se prévaut de ses progrès en français malgré une entrée récente en France, et soutient qu'il n'a plus aucun lien familial ou affectif dans son pays d'origine, que sa vie privée se trouve désormais en France où il vit avec son épouse et qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que le requérant n'est entré sur le territoire français qu'en 2011, à l'âge de trente ans ; qu'il n'apporte aucun élément de nature à démontrer une particulière insertion en France, bien qu'il justifie suivre des cours de français ; qu'il ne démontre pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, alors qu'il résulte de ses propres déclarations à l'OFPRA que ses parents et son frère résident toujours en Géorgie ; qu'en outre, son épouse, dont les parents résident également en Géorgie, fait également l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, compte tenu de la durée de séjour en France de M.A..., la décision refusant de l'admettre au séjour ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'a donc pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que, pour l'application des dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

7. Considérant qu'eu égard à ce qui vient d'être dit sur la situation familiale et personnelle de M. A...et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la mesure d'éloignement n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le requérant ne peut utilement soutenir qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, dès lors que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas pour objet de fixer le pays vers lequel il doit être renvoyé ;

8. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

9. Considérant que le refus de titre de séjour litigieux n'a ni pour objet ni pour effet de séparer M. A...de sa fille âgée d'un an ; que son épouse faisant également l'objet d'un refus de titre de séjour, ce refus n'implique pas davantage une rupture de la cellule familiale ; qu'en outre, la circonstance que l'enfant soit bien intégrée en France où elle est née et ne connaisse pas la Géorgie ne saurait, par elle-même, révéler une méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que, dès lors, rien ne fait obstacle à ce qu'elle retourne avec ses parents en Géorgie ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de cet article doit être écarté ;

En ce qui concerne le délai de retour :

10. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. " ;

11. Considérant d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...ait fait état devant le préfet de la Vienne, lors du dépôt de sa demande de délivrance de titre de séjour ou, à tout le moins, avant l'édiction de l'arrêté litigieux, de circonstances particulières, propres à justifier qu'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours lui soit accordé ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté, qui lui a accordé un délai de départ volontaire d'un mois pour quitter le territoire français, serait entaché d'un défaut d'examen préalable de sa situation ;

12. Considérant, d'autre part, que pour les mêmes motifs, et alors qu'aucune disposition de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose à l'autorité préfectorale d'indiquer les motifs pour lesquels elle s'abstient d'user de la faculté qui lui permet, le cas échéant, d'accorder à l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté est entaché d'un défaut de motivation sur ce point ;

13. Considérant, enfin, qu'eu égard aux conditions et au caractère récent du séjour de M. A... et de sa famille en France, le préfet n'a pas, en fixant un délai de départ volontaire de trente jours, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

14. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

15. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 3, rappelle que la demande d'asile de M. A...a été rejetée définitivement par la Cour nationale du droit d'asile le 29 novembre 2011, et conclut qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi la décision fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée ;

16. Considérant, en second lieu, que si M. A...fait valoir qu'il encourrait des risques en cas de retour en Géorgie, où il soutient avoir été victime de violences et de discriminations en raison, notamment, de ses origines kurdes yézides, il ne fait état d'aucun élément nouveau sur la nature, la réalité, l'intensité et l'actualité des menaces ainsi encourues, autres que ceux qui ont conduit au rejet définitif de sa demande d'asile par la Cour nationale du droit d'asile le 29 novembre 2011 ; que les éléments produits, tant en première instance qu'en appel, ne permettent pas de regarder M. A...comme personnellement exposé en cas de retour dans son pays à des menaces actuelles et personnelles ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de la Vienne du 9 janvier 2012 ;

Sur les autres conclusions :

18. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A...ne peuvent être accueillies ;

19. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. A...demande le versement au profit de son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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No 12BX01469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX01469
Date de la décision : 19/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : BREILLAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-02-19;12bx01469 ?
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