Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 8 septembre 2011, présentée pour la société Kapla France, ayant son siège 98 avenue de la Garonne à Saint Louis de Montferrand (33440), par Me Cassin ;
La société Kapla France demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0704053 du 5 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) de condamner 1'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de la justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2013 :
- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
- les observations de Me Cassin, avocat de la société Kapla France ;
1. Considérant qu'à l'issue de la vérification de la comptabilité de la société Kapla France, qui exerce une activité de fabrication et de commercialisation de jouets, l'administration fiscale a réintégré dans les résultats de l'exercice clos en 2001 des droits d'auteur et de marque, dans les résultats des exercices clos en 2001, 2002 et 2003, des frais de location d'un local en Belgique, et dans les résultats des exercices clos en 2002 et 2003 des frais de déplacement du directeur commercial ; que la société Kapla France fait appel du jugement du 5 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie de ce chef au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, d'une part, que si, au nombre des garanties que les contribuables tiennent des articles L. 47 et suivants du livre des procédures fiscales, figure la possibilité d'avoir sur place un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ;
3. Considérant, d'autre part, que lorsqu'elle a entrepris de vérifier la comptabilité d'un contribuable afférente à des exercices dont les plus anciens seraient susceptibles d'être couverts par la prescription avant l'achèvement de la totalité des opérations de vérification, l'administration fiscale a la faculté d'adresser à ce contribuable en temps utile pour interrompre cette prescription une proposition de rectification dont l'objet est limité à ces exercices les plus anciens et les premiers vérifiés ;
4. Considérant que la société Kapla France soutient qu'elle a été privée de la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire sur les redressements opérés au titre de l'année 2001 qui ont donné lieu à une proposition de rectification du 15 décembre 2004 ; que, toutefois, il est constant que les opérations de vérification, qui se sont déroulées du 9 novembre 2004 au 16 juin 2005 à son siège social, ont donné lieu à plusieurs interventions sur place de la vérificatrice, en présence du gérant ; que ni le fait que la proposition de rectification du 15 décembre 2004 est intervenue cinq semaines après le début des opérations de vérification, ni le fait que le vérificateur a demandé, par courrier du 30 novembre 2004 reçu le 2 décembre, la production des documents susceptibles de justifier les droits d'auteur et de marque portés en déduction au titre de l'exercice clos en 2001 ne sont, par eux-mêmes, de nature à révéler que la vérificatrice se serait refusée à tout échange de vues sur les redressements envisagés pour cet exercice et que la société aurait ainsi été privée de la possibilité d'un débat oral et contradictoire sur ces redressements ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la vérification de comptabilité en tant qu'elle a porté sur l'exercice clos en 2001 doit, par suite, être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
5. Considérant, que le 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, prévoit que le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges et notamment des frais généraux ; qu'il appartient au contribuable, que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ait été ou non saisie et, si elle l'a été, quel que soit le sens de son avis, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la société Kapla France n'est pas propriétaire de la marque commerciale "Kapla", déposée le 9 mai 1988 par M. Van Der Bruggen auprès de l'Institut National de la propriété industrielle, et que l'exploitation de cette marque est nécessaire à son activité ; qu'il ressort des conventions versées au dossier, dont la valeur probante ne saurait être remise en cause par la seule circonstance que l'un des cocontractants est domicilié dans l'île anglo-normande de Sark, que, le 2 mars 1995, M. Van Der Bruggen a concédé le droit exclusif d'exploiter cette marque et de fabriquer le jeu "Kapla", à la société de droit britannique Kapla International Limited, laquelle a elle-même concédé ces droits à la société Kapla France par contrats des 3 et 4 janvier 2000 prolongés par avenants jusqu'au 31 décembre 2001, en contrepartie d'une redevance de 10 % du chiffre d'affaires des produits commercialisés et de droits d'auteur de 6,80 francs sur chaque livre ; que, dans ces conditions, la société requérante justifie tant de la nature de ces charges que de l'existence et la valeur de la contrepartie qu'elle en a retirée ; que l'administration ne conteste ni le versement effectif des redevances et droits d'auteur, ni le fait que ceux-ci sont fondés dans leur principe et non exagérés dans leur montant, ainsi que l'a d'ailleurs constaté la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires le 3 mars 2006, et ne se prévaut pas du caractère fictif du contrat de concession des droits à la société Kapla International Limited ; qu'en se bornant à faire valoir que cet acte n'a pas fait l'objet d'un enregistrement au registre national des marques conformément aux prescriptions de l'article L. 714-7 du code de la propriété intellectuelle et ne lui est pas opposable, l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les charges en cause seraient dépourvues de contrepartie ou qu'elles auraient une contrepartie dépourvue d'intérêt pour la société ; que, dans ces conditions, c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de ces charges et en a réintégré le montant dans les résultats imposables de la société Kapla France au titre de l'exercice clos en 2001 ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que si la société soutient que la location du local de stockage de 600 m2 situé à Zulte en Belgique constituait, eu égard à la modicité du loyer consenti, une opportunité de développement de son activité commerciale en Europe du Nord où elle devait affronter la concurrence des producteurs locaux de jouets en bois, elle ne conteste pas qu'elle n'a exercé aucune activité dans ce local, resté inoccupé au cours des années 2001, 2002 et 2003 en litige, et elle n'a produit aucun élément de nature à justifier la réalité du projet de commercialisation lié à la location de local ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme ayant établi que les frais afférents à cette location n'ont pas été exposés dans l'intérêt de l'exploitation de la société ; que ces charges ne pouvaient, dès lors, être admises en déduction de ses résultats imposables ;
8. Considérant, enfin, qu'en se bornant à soutenir que la déductibilité de la rémunération de son directeur commercial, résident belge et père du gérant, n'a pas été remise en cause par l'administration, la société Kapla France, qui a seulement produit au cours du contrôle un tableau récapitulatif des déplacements en France et à l'étranger effectués en 2002 et 2003 par ce salarié, parfois accompagné de son épouse, sans indiquer la nature et l'objet de ces déplacements, ne justifie pas du caractère professionnel de ceux-ci ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a refusé d'admettre la déduction des frais y afférents, s'élevant à 14 286 euros pour l'année 2002 et 7 391 euros pour l'année 2003, des bases imposables de la société pour ces années ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Kapla France est seulement fondée à demander la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2001 à raison de la réintégration dans sa base d'imposition des redevances et droits d'auteur versés à la société Kapla International Limited ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais engagés par la société Kapla France et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La société Kapla France est déchargée des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercices clos en 2001 à raison de la réintégration dans ses bases imposables des redevances et droits d'auteur versés à la société Kapla International Limited.
Article 2 : Le jugement du 5 juillet 2011 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à la société Kapla France une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Kapla France est rejeté.
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N° 11BX02562 - 2 -