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11/12/2012 | FRANCE | N°11BX03144

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 11 décembre 2012, 11BX03144


Vu, la requête, enregistrée le 2 décembre 2011, présentée pour la commune des Grands-Chezeaux, par Me Delpuech ;

La commune demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000163 du 29 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. et Mme X une indemnité de 5 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux de l'interdiction de circulation sur un tronçon du chemin rural dénommé "voie communale n° 33" édictée par l'arrêté municipal du 19 décembre 2006 ;

2°) de rejeter la demande présentée par

M. et Mme X devant le tribunal administratif ;

2°) de condamner M. et Mme X à lui verser l...

Vu, la requête, enregistrée le 2 décembre 2011, présentée pour la commune des Grands-Chezeaux, par Me Delpuech ;

La commune demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000163 du 29 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. et Mme X une indemnité de 5 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux de l'interdiction de circulation sur un tronçon du chemin rural dénommé "voie communale n° 33" édictée par l'arrêté municipal du 19 décembre 2006 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme X devant le tribunal administratif ;

2°) de condamner M. et Mme X à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

- les observations de Me Seyt, avocat de M. et Mme X ;

1. Considérant que, par un arrêté du 19 décembre 2006, le maire des Grands-Chezeaux a, sous la seule réserve des engins agricoles, interdit la circulation aux véhicules sur un tronçon du chemin rural dénommé "voie communale n° 33" ; que la commune des Grands-Chezeaux fait appel du jugement du 29 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. et Mme X, dont la propriété située au lieu-dit " Le Moulin Neuf " est desservie notamment par le chemin d'exploitation n° 12 situé dans le prolongement de ladite voie, une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice résultant pour eux de l'illégalité fautive de cet arrêté ; que, par la voie de l'appel incident, M. et Mme X demandent, d'une part, que l'indemnité allouée soit portée à 50 000 euros, d'autre part, qu'il soit enjoint au maire de lever l'interdiction de circulation sur la voie communale n° 33 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables (...) les accidents (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 161-5 du code rural alors en vigueur, l'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux ;

3. Considérant que pour justifier de la nécessité d'interdire la circulation sur la voie communale n° 33, la commune des Grands-Chezeaux invoque les impératifs de sécurité publique et le principe de précaution ; qu'il résulte de l'instruction que cette voie, qui constitue l'une des deux voies d'accès à l'habitation des époux X et l'unique voie d'accès à leur parcelle cadastrée n° 1092, se présente comme un chemin en pente au tracé sinueux, comportant des ornières, difficilement praticable par les véhicules lourds, d'une largeur d'environ trois mètres ne permettant pas à deux véhicules de se croiser ; que, toutefois, il n'est pas sérieusement contesté que cette voie empierrée, dont l'entretien incombe à la commune, était carrossable depuis sa réfection en 1998 ; que son état ne justifiait pas l'interdiction permanente à la circulation de tout véhicule autre qu'agricole édictée par l'arrêté du 19 décembre 2006 ; que, dans ces conditions, le maire a imposé aux riverains de cette voie des restrictions qui n'étaient pas justifiées par les impératifs de sécurité publique, excédant celles qu'il pouvait légalement imposer dans l'exercice des pouvoirs de police qu'il tenait des dispositions législatives précitées ; qu'il a ainsi commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune à l'égard des époux X ;

4. Considérant qu'il est constant que la voie communale n° 33 constitue l'unique accès à la parcelle cadastrée n° 1092 appartenant aux époux X ; que si ceux-ci disposaient d'un autre accès à leur habitation par la voie carrossable n° 32, d'ailleurs empruntée par les véhicules de collecte des ordures ménagères, il n'est pas sérieusement contesté que le chemin d'exploitation n° 13 situé dans le prolongement de cette voie, à proximité du lit du ruisseau de la Chaume, est inondable ; que leur courrier n'a pu être distribué à leur adresse postale ; que dans ces conditions, alors même qu'ils n'utilisaient pas systématiquement la voie communale n° 33, M. et Mme X ont subi des troubles de toute nature dans leurs conditions d'existence dont ils sont fondés à demander réparation ; que les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à 5 000 euros ;

5. Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le tribunal administratif n'a pas fait une évaluation insuffisante des troubles subis dans leurs conditions d'existence par les époux X ; que ceux-ci n'établissent ni même n'allèguent avoir envisagé de céder leur propriété ; que, dès lors, le préjudice lié à la perte de valeur vénale de cette propriété présente un caractère purement éventuel ; que les requérants ne sont, dès lors, pas fondés à demander, par la voie de l'appel incident, une indemnité à ce titre ;

6. Considérant que la cour ne se trouvant pas saisie d'un litige d'excès de pouvoir, le présent arrêt n'implique d'autre mesure d'exécution que le paiement par la commune, s'il n'a pas déjà été effectué en exécution du jugement attaqué, de l'indemnité de 5 000 euros due aux époux X ; que, par suite, les conclusions de ces derniers tendant à ce que la cour ordonne sous astreinte la levée de l'interdiction de circuler ne peuvent être accueillies ; qu'il leur appartient seulement, s'ils s'y estiment fondés, de saisir l'autorité compétente d'une demande tendant à l'abrogation de l'arrêté du 19 décembre 2006 ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'appel principal de la commune des Grands-Chezeaux et l'appel incident de M. et Mme X doivent être rejetés ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des intimés, qui ne sont pas pour l'essentiel la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune des Grands-Chezeaux demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune, sur le même fondement, à verser à M. et Mme X la somme de 1 200 euros ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune des Grands-Chezeaux et l'appel incident de M. et Mme X sont rejetés.

Article 2 : La commune des Grands-Chezeaux versera à M. et Mme X la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N°11BX03144 - 3 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX03144
Date de la décision : 11/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Thérèse LACAU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : DELPUECH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-12-11;11bx03144 ?
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