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11/12/2012 | FRANCE | N°11BX02332

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 11 décembre 2012, 11BX02332


Vu le mémoire, enregistré le 18 août 2011, présenté pour la section du bourg de la commune de Ménoire (Corrèze), prise en la personne de son président ;

La section du bourg de la commune de Ménoire demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901949 en date du 23 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, sur la demande de M. Serge X, annulé les délibérations du 16 juin 2009 relatives aux baux à conclure avec M. Y, M. Z et Mme A ainsi que le refus opposé à la candidature de M. X le 16 juin 2009 et le rejet de son recours gracieux, le 25 ao

ût 2009 ;

2°) de condamner M. X à lui verser la somme de 2 000 euros au titr...

Vu le mémoire, enregistré le 18 août 2011, présenté pour la section du bourg de la commune de Ménoire (Corrèze), prise en la personne de son président ;

La section du bourg de la commune de Ménoire demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901949 en date du 23 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, sur la demande de M. Serge X, annulé les délibérations du 16 juin 2009 relatives aux baux à conclure avec M. Y, M. Z et Mme A ainsi que le refus opposé à la candidature de M. X le 16 juin 2009 et le rejet de son recours gracieux, le 25 août 2009 ;

2°) de condamner M. X à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance en date du 3 novembre 2011 fixant la clôture de l'instruction au 5 décembre 2011 ;

Vu la décision du 27 octobre 2010 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la section du bourg de la commune de Ménoire ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs et l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;

et les conclusions de M. Bentolila rapporteur public ;

1. Considérant que la commune rurale de Ménoire (Corrèze) possède une section, dénommée section du bourg, possédant un patrimoine foncier distinct de celui de la commune ; qu'à la suite de la résiliation des baux consentis sur des terres appartenant à la section du bourg, plusieurs exploitants agricoles, M. Z, Mme A, M. Y et M. X ont présenté des demandes tendant à ce que ces terres leur soient attribuées en tout ou partie ; que, par deux délibérations du 16 juin 2009, la commission syndicale de la section du bourg a décidé de retenir les candidatures de M. Z, Mme A et M. Y sur différentes terres ; que le président de la commission syndicale a, le même jour, informé M. X du rejet de sa candidature ; que celui-ci a alors adressé au président de la commission syndicale un recours gracieux qui a été rejeté le 25 août 2009 ; que la section du bourg de la commune de Ménoire fait appel du jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 23 juin 2011 qui a, sur la demande de M. X, annulé les délibérations précitées du 16 juin 2009 attribuant les baux ruraux, ainsi que le refus d'attribution qui a été opposé le même jour à M. X et le rejet de son recours gracieux, en date du 25 août 2009 ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. X :

2. Considérant que la circonstance que le Conseil d'Etat ait, par décision du 27 octobre 2010, estimé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au conseil constitutionnel le mémoire en question prioritaire de constitutionnalité par lequel la section du bourg de la commune de Ménoire avait saisi le tribunal administratif de Limoges, s'agissant de la constitutionnalité des articles L. 2411-2 et L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales, est sans incidence sur la recevabilité de la présente requête ;

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2411-1 du code général des collectivités territoriales : " Constitue une section de commune toute partie d'une commune possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune. / La section de commune a la personnalité juridique. " ; qu'aux termes de l'article L. 2411-2 du même code : " La gestion des biens et droits de la section est assurée par le conseil municipal, par le maire et, dans les cas prévus aux articles L. 2411-6 à 8, L. 2411-11, L. 2411-15, L. 2411-18 et L. 2412-1, par une commission syndicale et par son président " ; que l'article L. 2411-6 du même code dispose : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 2411-15, la commission syndicale délibère sur les objets suivants : (...) 2° Vente, échange et location pour neuf ans ou plus de biens de la section (...) En ce qui concerne les locations de biens de la section consenties pour une durée inférieure à neuf ans, la commission syndicale doit être consultée par son président lorsque ce dernier est saisi d'une demande émanant de la moitié des électeurs de la section et formulée dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat. En cas d'accord entre la commission syndicale et le conseil municipal ou si la commission syndicale ne s'est pas prononcée dans le délai de deux mois à compter de la délibération du conseil municipal, le maire passe le contrat. En cas de désaccord, le maire ne passe le contrat qu'après une nouvelle délibération du conseil municipal " ; qu'aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 2411-10 dudit code : " Les terres à vocation agricole ou pastorale propriétés de la section sont attribuées par bail rural (...) au profit des exploitants agricoles ayant leur domicile réel et fixe, ainsi que le siège d'exploitation sur la section. L'autorité municipale peut attribuer, le cas échéant, le reliquat de ces biens au profit d'exploitants agricoles sur la section ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant pendant la période hivernale leurs animaux sur la section, ou à défaut au profit de personnes exploitant des biens sur le territoire de la section et résidant sur le territoire de la commune ; à titre subsidiaire, elle peut attribuer ce reliquat au profit de personnes exploitant seulement des biens sur le territoire de la section ou, à défaut, au profit des exploitants ayant un bâtiment d'exploitation sur le territoire de la commune " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le conseil municipal est en principe compétent pour gérer les biens de la section, et notamment pour attribuer par bail rural les terres de ladite section, selon des critères de priorités définis par l'article L. 2411-10 précité ; que cependant, par dérogation à ce principe, l'article L. 2411-6 prévoit que la commission syndicale de la section reste compétente s'agissant notamment de la location de terres appartenant à la section lorsque ces locations sont effectuées sous la forme de baux à ferme de plus de neuf ans ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les baux consentis à M. Z, Mme A et M. Y par délibérations de la commission syndicale du 16 juin 2009 sont des baux de ce type ; que par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que les délibérations du 16 juin 2009 par lesquelles la commission syndicale a statué sur les demandes dont il était saisi en vue de la conclusion de baux ruraux, et la décision du 25 août 2009 par laquelle le président de la commission syndicale a rejeté le recours gracieux formé par M. X, agriculteur évincé de l'attribution de terres en cause, avaient été prises par une autorité incompétente ;

5. Considérant qu'il y a lieu pour la cour d'annuler le jugement et, saisie par l'effet dévolutif de l'ensemble du litige, de statuer sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

Sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif :

6. Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : -restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / -infligent une sanction ; / -subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; / -retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; / -opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; / - refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / - refusent une autorisation (...) / -rejettent un recours administratif (...) " ;

7. Considérant que si M. X fait valoir que le courrier que lui a adressé le 16 juin 2009 le président de la commission syndicale l'informant de ce que sa demande d'attribution de terres n'avait pas pu être satisfaite, ainsi que le courrier du 25 août 2009 de la même autorité, rejetant son recours gracieux, sont insuffisamment motivés au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, il ressort des termes dudit article que le refus opposé à l'intéressé, qui ne constitue notamment pas le refus d'un avantage dont l'attribution aurait constitué un droit, n'entre pas dans le champ d'application dudit article ; que par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation au regard de la loi du 11 juillet 1979 doit être écarté comme inopérant ;

8. Considérant en second lieu qu'il ressort des pièces du dossier qu'au regard des critères d'attribution des terres de section, prévus par l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales, M. X, qui n'a pas sa résidence sur le territoire de la commune et n'y possède qu'un bâtiment d'exploitation et des terrains, lesquels ne sont cependant pas situés sur le territoire de la section, se trouve classé par cet article dans la quatrième catégorie des bénéficiaires potentiels des biens de la section, les terres ayant été attribuées aux candidats ayant leur résidence et/ou leur siège d'exploitation sur la commune, ou ayant déjà des terres et/ ou des bâtiments sur le territoire de la section ; que par suite, quand bien même l'un des agriculteurs retenus, M. Z, n'aurait été qu'en cours d'installation, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales qu'il ne s'est pas vu attribuer de terres en location ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la demande de M. X par la section du bourg de la commune de Ménoire, que celui-ci n'est pas fondé à demander l'annulation des délibérations prises par la commission syndicale de la section le 16 juin 2009, ni celle de la décision de refus d'attribution qui lui a été faite le même jour, ni celle du rejet de son recours gracieux, intervenu le 25 août 2009 ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à verser à la section du bourg de la commune de Ménoire la somme de 1 500 euros au titre dudit article ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu de condamner cette dernière à verser à M. X la somme que celui-ci réclame au titre de ce même article ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 23 juin 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Limoges est rejetée.

Article 3 : M. X est condamnée à verser à la section du bourg de la commune de Ménoire la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Nos 11BX02332


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX02332
Date de la décision : 11/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-02-03-01 Collectivités territoriales. Commune. Biens de la commune. Intérêts propres à certaines catégories d'habitants. Sections de commune.


Composition du Tribunal
Président : M. JACQ
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : PEYRONNIE CULINE LESCURE RENAUDIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-12-11;11bx02332 ?
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