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04/12/2012 | FRANCE | N°11BX02422

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 04 décembre 2012, 11BX02422


Vu la requête enregistrée le 31 août 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 5 septembre 2011 présentée pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) dont le siège est situé 36 avenue du Général de Gaulle Tour Galiéni II à Bagnolet cedex (93175) par Me Saumon et Me Roquelle-Meyer, avocats ;

L'ONIAM demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800284,09002760 en date du 15 juin 2011 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il l'a condamné à vers

er à M. Miloud X des indemnités au titre de l'incidence professionnelle, des trou...

Vu la requête enregistrée le 31 août 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 5 septembre 2011 présentée pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) dont le siège est situé 36 avenue du Général de Gaulle Tour Galiéni II à Bagnolet cedex (93175) par Me Saumon et Me Roquelle-Meyer, avocats ;

L'ONIAM demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800284,09002760 en date du 15 juin 2011 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il l'a condamné à verser à M. Miloud X des indemnités au titre de l'incidence professionnelle, des troubles de toutes natures dans les conditions d'existence et du préjudice d'agrément qu'il avait subis du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C et en tant qu'il l'a condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde une somme correspondant aux dépenses de santé futures qu'elle devrait engager au bénéfice de son assuré ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. X et la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde devant le tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'elles portent, pour M. X, sur l'incidence professionnelle, les troubles de toutes natures et le préjudice d'agrément et pour la caisse primaire d'assurance maladie, sur les dépenses de santé futures ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2012 :

- le rapport de M. Jean-Pierre Valeins, président assesseur ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

1. Considérant qu'en 1984, M. X, alors âgé de 19 ans, a été soigné au centre hospitalier universitaire de Bordeaux où il a reçu une transfusion sanguine ; que par un jugement du 12 septembre 2000 le tribunal de grande instance de Bordeaux a reconnu que la contamination de M. X par le virus de l'hépatite C était imputable à cette transfusion sanguine et l'a indemnisé par l'allocation d'une somme de 150 000 francs (22 867,35 euros) ; que par un arrêt devenu définitif du 11 mars 2003, la cour d'appel de Bordeaux a porté à 50 000 euros le montant de l'indemnisation mise à la charge de l'établissement français du sang ; qu'en 2008, M. X a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la condamnation de l'ONIAM à réparer les préjudices supplémentaires liés à sa contamination par le virus de l'hépatite C qui n'avaient pas été indemnisés par l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux ; que, par jugement du 15 juin 2011, le tribunal administratif de Bordeaux a procédé à la substitution de l'ONIAM à l'établissement français du sang et a condamné l'ONIAM à verser à M. X les sommes de 10 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, 6 000 euros au titre des souffrances physiques et morales endurées, 15 000 euros au titre des troubles de toutes natures dans les conditions d'existence et au titre du préjudice d'agrément ; que par ce même jugement, le tribunal administratif a condamné l'ONIAM à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde les sommes de 4 077,12 euros au titre des bilans hépatiques et biologiques dont avait bénéficié M. X et de 3 898,17 euros au titre des dépenses de santé futures ; que l'ONIAM interjette appel de ce jugement en tant qu'il l'a condamné à indemniser M. X au titre de l'incidence professionnelle, des troubles de toutes natures dans les conditions d'existence et du préjudice d'agrément ; que l'ONIAM demande également l'annulation du jugement en tant qu'il l'a condamné à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde des dépenses de santé futures ;

2. Considérant, en premier lieu, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné l'ONIAM à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde les dépenses qu'elle engagera au fur et à mesure et à concurrence des sommes effectivement versées dans la limite d'un capital de 3 898,17 euros, au titre des dépenses de santé futures correspondant à des frais d'hospitalisation de jour et à des actes de biologie hépatique à réaliser tous les trois ans; qu'il ressort du document relatif aux frais futurs produit en première instance par la caisse primaire d'assurance maladie que cette somme correspond à des frais de contrôle à vie que le médecin-conseil de la caisse estime nécessaires pour M. X ; que s'il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise datée du 12 septembre 2006, que M. X est guéri de l'hépatite C depuis mars 2005, ce qui a été confirmé le 9 mars 2006 par le fait que l'acide ribonucléique du virus de l'hépatite C était indétectable, il résulte également de l'instruction, tant du rapport de l'expert que de la lettre adressée à l'expert par un spécialiste d'hépato-gastroentérologie le 1er septembre 2006, que, même rares, les risques de rechute existent et justifient une biologie hépatique annuelle et une hospitalisation de jour en hépatogastro-entérologie tous les trois ans ; que les dépenses de santé futures rappelées ci-dessus, dont le remboursement est demandé par la caisse et que le tribunal administratif a accordées, sont donc justifiées et certaines ; qu'en conséquence, l'ONIAM n'est pas fondé à demander la réformation du jugement sur ce point ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'au titre de l'incidence professionnelle subie par M. X du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C, le tribunal administratif a condamné l'ONIAM à verser à l'intéressé la somme de 10 000 euros ; que le tribunal administratif a justifié cette condamnation par les circonstances que M. X n'avait pas pu travailler pendant les périodes de traitement médical de sa contamination compte tenu de sa fatigabilité et qu'à compter de sa consolidation en mars 2006 il était en mesure de reprendre une activité professionnelle ne demandant pas d'effort physique important ;

4. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Bordeaux le 11 mars 2003, que celle-ci n'a pas indemnisé M. X pour ce chef de préjudice ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert qu'à la date de la découverte de sa contamination, M. X était apprenti ouvrier agricole ; que postérieurement à la date de sa consolidation, le 9 mars 2006, il n'a pas pu reprendre une activité professionnelle exigeant des efforts physiques car il conserve, malgré sa guérison, une fatigabilité rapide, ni d'ailleurs aucune autre activité professionnelle ; qu'en fixant à 10 000 euros le montant de la somme à verser par l'ONIAM au titre de l'incidence professionnelle, le tribunal administratif n'a donc pas fait une appréciation excessive du préjudice subi par l'intéressé ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'ONIAM soutient que le tribunal administratif ne pouvait pas indemniser M. X pour les troubles de toutes natures dans ses conditions d'existence et le préjudice d'agrément subis dès lors que ces préjudices avaient déjà été réparés par la cour d'appel de Bordeaux dans son arrêt devenu définitif du 11 mars 2003, que l'état de santé de l'intéressé s'est amélioré et qu'il est désormais guéri ;

6. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux que celle-ci avait déjà indemnisé M. X au titre de son préjudice d'agrément, mais à la date de cet arrêt et sans en préciser le montant, l'indemnité étant englobée dans le " préjudice spécifique de contamination " comprenant également les souffrances endurées et le préjudice moral ; que s'il ne résulte pas de l'instruction que ce préjudice se serait aggravé alors que postérieurement à cet arrêt, le 9 mars 2006, l'état de santé de M. X s'est amélioré puisqu'il s'est trouvé guéri de sa contamination par le virus de l'hépatite C, il ressort du rapport d'expertise que ce préjudice d'agrément n'a pas disparu malgré la guérison de l'intéressé, en raison d'une asthénie persistante ; qu'en condamnant l'ONIAM à indemniser M. X au titre de son préjudice d'agrément, le tribunal administratif de Bordeaux n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel de Bordeaux ;

7. Considérant que la cour d'appel de Bordeaux n'a pas indemnisé M. X au titre des troubles de toutes natures dans ses conditions d'existence subis tant avant la consolidation qu'après la consolidation puisque celle-ci est intervenue près de trois ans après son arrêt; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux que durant les 7 derniers mois de l'année 1998, M. X a été atteint d'une invalidité temporaire totale et d'une invalidité temporaire partielle de 30 %, du 1er janvier 1999 au 9 mars 2006, dues à sa contamination par le virus de l'hépatite C ; qu'il est actuellement atteint d'une invalidité permanente partielle de 10 % du fait d'une asthénie persistante et de céphalées psychogènes, séquelles de sa contamination ;

8. Considérant que, dans ces conditions, en condamnant l'ONIAM à verser à M. X la somme de 15 000 euros au titre des troubles de toutes natures dans ses conditions d'existence et du préjudice d'agrément, le tribunal administratif de Bordeaux n'a pas fait une appréciation excessive de ces préjudices ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ONIAM n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à indemniser la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde au titre des dépenses de santé futures et à indemniser M. X au titre de l'incidence professionnelle, des troubles de toutes natures dans ses conditions d'existence et de son préjudice d'agrément ;

DECIDE

Article 1er : La requête de l'ONIAM est rejetée.

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No 11BX02422


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX02422
Date de la décision : 04/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Évaluation du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARRACO
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS VATIER ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-12-04;11bx02422 ?
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