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13/11/2012 | FRANCE | N°11BX00451

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 13 novembre 2012, 11BX00451


Vu la requête, enregistrée 16 février 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 21 février 2011, présentée pour la Société Photo Caraïbes, société à responsabilité limitée, ayant son siège au centre commercial de Desreland, lot n°24 à Baie-Mahaut (97122), par Me Trillat ;

La Société Photo Caraïbes demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000421 du 17 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 19 802,61 euros, ave

c intérêts à compter du 7 janvier 2010 et capitalisation de ces intérêts, en réparation des...

Vu la requête, enregistrée 16 février 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 21 février 2011, présentée pour la Société Photo Caraïbes, société à responsabilité limitée, ayant son siège au centre commercial de Desreland, lot n°24 à Baie-Mahaut (97122), par Me Trillat ;

La Société Photo Caraïbes demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000421 du 17 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 19 802,61 euros, avec intérêts à compter du 7 janvier 2010 et capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices subis à la suite des barrages et des manifestations de rue qui se sont déroulés en Martinique du 6 février au 14 mars 2009 et qui ont entravé son activité ;

2°) de condamner l'Etat à payer la somme de 19 802,61 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2010 et d'ordonner la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................

Vu l'ordonnance fixant la clôture d'instruction au 30 septembre 2011 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la sécurité intérieure ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2012 :

- le rapport de M. Philippe Cristille, premier-conseiller ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

- les observations de Me Denanot, avocat de la Société Photo Caraïbes ;

1. Considérant que la Société Photo Caraïbes, qui exploite plusieurs magasins de vente d'articles de photographies, de vidéo et d'électronique sous l'enseigne Kodak express Foto First possède un magasin situé rue Lamartine à Fort-de-France ; qu'à la suite du mouvement de revendication contre la vie chère qui a affecté la Martinique du 6 février 2009 au 14 mars 2009, la Société Photo Caraïbes a recherché la responsabilité de l'Etat à raison du manque à gagner qu'elle impute aux difficultés d'accéder à son magasin du fait des manifestations et des barrages aux abords de son établissement qui auraient entravé son activité; que la Société Photo Caraïbes fait appel du jugement du tribunal administratif de Fort-de-France du 17 décembre 2010 qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 19 802,61 euros, avec intérêts capitalisés ;

Sur la responsabilité de l'Etat sur le fondement de la faute :

2. Considérant que s'il appartenait au préfet de la Martinique de prendre toutes dispositions nécessaires pour rompre les barrages dressés par les manifestants qui entravaient les voies de circulation et permettre une utilisation normale du domaine public, l'obligation qui lui incombait trouvait toutefois sa limite dans les nécessités de l'ordre public ; que si le préfet a choisi de poursuivre les négociations engagées avec les représentants des manifestants, cette attitude, qui a d'ailleurs permis la conclusion d'un protocole de fin de conflit, ne révèle pas, compte tenu de l'ampleur du mouvement et des troubles sérieux qu'aurait pu entraîner la décision d'utiliser la force publique pour faire évacuer les barrages, de carence constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Sur la responsabilité de l'Etat au titre de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales :

3. Considérant qu'aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales alors en vigueur, désormais codifiées à l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure : " L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens " ;

4. Considérant que l'application de ces dispositions est subordonnée à la condition que les dommages dont l'indemnisation est demandée résultent de manière directe et certaine de crimes ou de délits déterminés, commis par des rassemblements ou attroupements précisément identifiés ;

5. Considérant que la société, qui demande réparation de son manque à gagner, produit les attestations de deux de ses salariés rédigées en février 2011, indiquant que " des manifestations ont eu lieu du 6 février 2009 au 14 mars 2009 ", que " le service d'ordre de la manifestation obligeait les employés à fermer le magasin " et que " les clients sont devenus de plus en plus rares dans le centre-ville ", que " la direction du magasin a décidé la fermeture jusqu'à la fin de la grève " et un constat d'huissier, établi le 16 février 2009 pour le compte d'une autre société qui ne mentionne pas le magasin de la requérante et signale, sans autre précision, que " tous les commerces de la ville de Fort-de-France étaient fermés du fait de la grève générale ", que " le 16 février 2009 une manifestation se déroulait dans les rues de Fort-de-France composée de milliers de manifestants ", que " les différents commerçants de Fort de France avaient été obligés de fermer, contraints par le mouvement " ; que la Société Photo Caraïbes se borne ainsi à faire état de la situation générale de blocages et de troubles ayant affecté pendant 37 jours la ville de Fort-de-France et de la dégradation brutale du climat économique, sans établir de lien direct entre, d'une part, le manque à gagner qu'elle invoque, et, d'autre part, des délits commis par un rassemblement ou un attroupement précisément identifié ; que, par suite, et alors même qu'à l'occasion des troubles des délits ont pu être commis, la responsabilité de l'Etat n'est pas engagée à l'égard de la Société Photo Caraïbes sur le fondement de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ;

Sur la responsabilité de l'Etat sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques :

6. Considérant que la société qui allègue avoir perdu la somme de 19 802,61 euros à la suite de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée d'exercer son activité du 6 février au 14 mars 2009, n'établit pas, eu égard au caractère général du blocage de l'île qui a affecté un très grand nombre d'entreprises implantées en Martinique, avoir subi un préjudice spécial dont elle serait fondée à demander réparation sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société Photo Caraïbes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté son recours indemnitaire ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais exposés par la société et non compris dans les dépens soient mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la Société Photo Caraïbes est rejetée.

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N°11BX00451


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX00451
Date de la décision : 13/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : TRILLAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-11-13;11bx00451 ?
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