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30/10/2012 | FRANCE | N°12BX00266

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 30 octobre 2012, 12BX00266


Vu la requête, enregistrée le 3 février 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 10 février 2012, présentée pour Mme Ilham épouse Y, demeurant au ..., par Me Georges ;

Mme épouse Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104297 du 3 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2011 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;



2°) d'annuler l'arrêté du 14 juin 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Girond...

Vu la requête, enregistrée le 3 février 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 10 février 2012, présentée pour Mme Ilham épouse Y, demeurant au ..., par Me Georges ;

Mme épouse Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104297 du 3 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2011 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 juin 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard, ou à défaut de procéder à un nouvel examen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2012 :

- le rapport de M. Aymard de Malafosse, président de chambre ;

- et les conclusions de M. Guillaume de la Taille Lolainville, rapporteur public ;

Considérant que Mme Ilham épouse Y, de nationalité marocaine, fait appel du jugement du 3 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2011 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à l'espèce : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y est entrée en France en octobre 2007, à l'âge de 28 ans, pour rejoindre son mari qu'elle avait épousé au Maroc le 12 avril 2007 ; que, si elle fait valoir qu'elle a dû quitter le domicile conjugal en décembre 2007 en raison des menaces proférées à son encontre par son époux, que sa famille restée au Maroc la rejette depuis sa séparation, qu'elle a réussi à stabiliser sa situation professionnelle en France et que les femmes divorcées sont maltraitées au Maroc, ces éléments, compte tenu notamment de la durée de la présence en France de l'intéressée et de ce qu'il n'est pas établi qu'elle ne puisse renouer les liens avec sa famille dont tous les membres se trouvent au Maroc, ne suffisent pas pour que le refus du préfet de régulariser la situation de l'intéressée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 puisse être regardé comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que, compte tenu de l'âge auquel Mme Y est entrée en France, de la durée de sa présence sur le territoire français, de ce qu'elle est divorcée de son époux, de ce qu'elle n'a pas d'enfant et a l'ensemble de sa famille au Maroc, le refus de titre de séjour contesté ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par ce refus et ne méconnaît donc pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le moyen tiré de la violation de ces stipulations doit donc être écarté ;

Considérant enfin que, compte tenu de ce qui précède, il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus de séjour contesté serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de Mme Y, laquelle n'invoque pas à l'appui de ce moyen d'autres éléments de fait que ceux tirés de l'atteinte à sa situation privée et familiale ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, le moyen tiré de l'illégalité du refus de séjour ne peut qu'être écarté ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, qui reposent sur les mêmes arguments que ceux invoqués à l'appui des mêmes moyens soulevés à l'encontre du refus de séjour, ne peuvent être accueillis ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 paragraphe 1 de la directive susvisée n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 : " Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; que la motivation d'une obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les obligations de motivation ; que l'arrêté contesté contient l'exposé des motifs de droit et de fait sur lesquels s'est fondé le préfet pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par la requérante et vise l'article du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permet d'assortir un tel refus d'une obligation de quitter le territoire ; que par suite, le moyen tiré de ce que cette obligation serait insuffisamment motivée et méconnaîtrait, pour ce motif, les dispositions de l'article 12 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive 2008/115/CE susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4 (...) / 2. Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / (...) 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que le préfet de la Gironde se serait cru tenu de n'accorder qu'un délai d'un mois à Mme Y pour quitter volontairement le territoire français sans procéder à l'examen particulier de sa situation au regard des dispositions précitées, ni qu'en fixant à un mois ce délai de départ volontaire, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 7 de la même directive doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que, compte tenu de ce qui précède, Mme Y n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français prises à son encontre ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de cet article 3 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que Mme Y ne produit pas d'éléments de nature à établir qu'elle serait personnellement exposée en cas de retour au Maroc à des traitements de la nature de ceux visés audit article 3 ou que sa vie ou sa liberté y serait menacées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme épouse Y n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions en ce sens de la requérante ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme épouse Y demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme épouse Y est rejetée.

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N° 12BX00266


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00266
Date de la décision : 30/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Aymard DE MALAFOSSE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : GEORGES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-10-30;12bx00266 ?
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