Vu la requête, enregistrée sous forme de télécopie le 7 décembre 2011 et régularisée par courrier le 8 décembre 2011, présentée pour M. Gérard X, demeurant ..., par Me Françoise Vacher, avocat ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1000778 du 6 octobre 2011 par lequel le tribunal de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, mises en recouvrement le 30 avril 2009, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 et à la rectification de son résultat au titre de 2007 ;
2°) d'ordonner la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2012 :
- le rapport de Mme Dominique Boulard, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
Considérant qu'à la suite de la vérification de la comptabilité dont a fait l'objet en 2008 l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Le Puits à Sel, qui exerce une activité de vente d'articles divers à Saint-Martin de Ré, les résultats de cette entreprise au titre des exercices clos au cours des années 2005, 2006 et 2007 ont été rectifiés ; que M. Gérard X, qui est le gérant et l'associé unique de cette société, a été assujetti en 2009, au titre des années 2005 et 2006, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu procédant de ces rectifications, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; qu'il a saisi le tribunal administratif de Poitiers de conclusions tendant à la décharge de ces impositions émises au titre des années 2005 et 2006 et d'une demande que le tribunal a analysée comme tendant au rétablissement du résultat déficitaire qu'il avait déclaré au titre de l'exercice clos en 2007 ; qu'il fait appel du jugement ayant rejeté l'ensemble de ses conclusions ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales imposables selon le régime du forfait ou un régime de bénéfice réel (...) lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A n'a pas été déposée dans le délai légal./ (...) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2°. " ; qu'aux termes de l'article L. 68 du même code : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure... " ; que, pour écarter le moyen tiré de l'inapplicabilité de la procédure d'évaluation d'office aux résultats des exercices 2006 et 2007, les premiers juges relèvent que l'EURL Le Puits à Sel a déposé hors délais ses déclarations de résultat des exercices clos les 31 décembre 2006 et 2007, plus de trente jours après la réception d'une mise en demeure, ce qui permettait à l'administration de mettre en oeuvre la procédure d'évaluation d'office prévue par les dispositions précitées ; qu'ils ajoutent que, si M. X soutient que cette situation résultait d'un différend avec l'expert-comptable de la société, qui disposait des livres et documents comptables, il n'établit pas avoir effectué toutes les démarches et diligences nécessaires pour obtenir la restitution de ces documents ; qu'ils estiment alors que le retard apporté à la souscription des déclarations de résultats de la société ne peut être regardé comme étant dû à un cas de force majeure qui serait seul de nature à faire obstacle à l'application de la procédure d'évaluation d'office ; qu'il convient d'adopter cette motivation retenue à juste titre par le tribunal, que les pièces produites en appel par le requérant, notamment ses courriers adressés à l'ancien cabinet comptable, ne permettent pas d'infirmer ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'administration, qui n'était pas tenue de dresser un procès-verbal constatant le défaut de présentation de documents comptables au titre de l'exercice 2005, a pu faire le constat de cette carence dans la proposition de rectification adressée le 9 octobre 2008, sans entacher d'irrégularité la procédure d'imposition contradictoire dont relève cet exercice ; que les observations produites par le contribuable le 18 décembre 2008 à la suite de cette proposition de rectification ont donné lieu à une réponse du service des impôts en date du 13 janvier 2009 ; que la circonstance que, sur ce document relatif aux trois exercices vérifiés, la mention relative à la faculté de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'ait pas été rayée, ne saurait entacher d'irrégularité la procédure de redressement, même pour ce qui est des exercices relevant de l'évaluation d'office ; que, ni le délai de réponse accordé par le service des impôts dans la proposition de rectification, ni le délai mentionné dans la réponse aux observations du contribuable, ni celui pris pour assurer la mise en recouvrement des impositions contestées, établies le 30 avril 2009, ne sont constitutifs d'une irrégularité, que la procédure applicable soit contradictoire ou d'office ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la déduction des amortissements :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : (...) 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise... " ; qu'il résulte de ces dispositions que ne peuvent être déduits du bénéfice imposable que les amortissements qui ont été effectivement inscrits dans les écritures comptables à la clôture des exercices concernés ; qu'il appartient au contribuable de justifier que cette inscription a été effectuée avant l'expiration du délai imparti pour souscrire la déclaration des résultats annuels de l'entreprise ;
Considérant que l'administration n'a pas admis la déductibilité des dotations aux amortissements en litige, pratiquées sur le prix d'un bateau inscrit à l'actif de l'entreprise, au motif notamment qu'au titre de l'exercice 2005, l'EURL le Puits à Sel, n'ayant pas présenté de documents comptables, n'avait pu justifier de la comptabilisation des amortissements déduits et que, la comptabilité des exercices clos en 2006 et 2007 n'ayant été établie qu'en 2008, au cours de la vérification de comptabilité, par un nouveau comptable, les amortissements relatifs à ces exercices n'avaient été comptabilisés qu'après l'expiration du délai prévu pour la déclaration des résultats annuels de l'entreprise ; qu'en ce qui concerne l'exercice 2005, M. X conteste en appel le défaut de présentation de sa comptabilité ; que, cependant, le fait que l'administration se soit abstenue de dresser un procès-verbal de carence, ne fait pas obstacle à ce qu'elle se prévale de l'absence de présentation de comptabilité au titre de l'exercice 2005, absence qu'elle avait mentionnée dans la proposition de rectification précitée et qu'avait expressément reconnue le requérant dans sa réponse du 18 décembre 2008 où il exposait les raisons qui selon lui la justifiait ; que, par suite, le défaut de production de documents comptables au titre de 2005 doit être tenu pour établi ; que, si M. X soutient que ce défaut de présentation de comptabilité au titre du premier exercice vérifié et ce retard dans l'établissement des documents comptables au titre des deux exercices suivants sont dus à la rétention des documents comptables par l'expert-comptable de la société, il ne justifie pas davantage devant la cour que devant le tribunal avoir accompli toutes les démarches et diligences de nature à le mettre à même d'accomplir dans les délais légaux ses obligations déclaratives et comptables relatives à tous ces exercices ; que, dès lors, le moyen tiré d'un cas de force majeure ne peut être accueilli ; qu'il résulte de ce qui précède que l'administration n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts en refusant la déductibilité des amortissements en litige, dont il n'était pas justifié qu'ils avaient été comptabilisés avant l'expiration du délai de déclaration ;
Considérant, sur le terrain de la doctrine administrative, que la réponse ministérielle faite à M. Y le 26 janvier 1987 n'admet la déduction d'amortissements dans le cadre d'une imposition d'office que "lorsqu'il peut être justifié de leur inscription dans la comptabilité avant" la date "d'expiration du délai de déclaration" ; qu'en l'espèce, cette justification n'est pas apportée, comme il est dit ci-dessus ; que, par suite, le requérant ne peut se prévaloir de cette réponse pour déduire de ses résultats imposables au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les amortissements en litige ;
En ce qui concerne la réintégration d'une dette inscrite au passif de l'exercice clos en 2005 :
Considérant que l'EURL Le Puits à Sel a acquis en 2004 un bateau dénommé " Eleven one " auprès des époux Patarin ; qu'elle a fait figurer à son passif au 31 décembre 2005 une somme de 207 000 euros correspondant, selon les indications de l'entreprise, au montant restant dû par elle de la créance des vendeurs du bateau ; qu'au cours de l'exercice 2006, cette dette de l'entreprise a été réduite d'une somme de 129 000 euros, à raison de paiements en espèces que M. X auraient auparavant effectués auprès des vendeurs du bateau pour le compte de la société ; qu'en contrepartie, le compte courant de M. X dans les écritures de l'EURL a été crédité au cours du même exercice 2006 de la somme de 129 000 euros ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité, le service des impôts, estimant que la dette de l'EURL envers les époux Patarin au 31 décembre 2005 n'était pas justifiée à hauteur de 129 000 euros et que la réalité des paiements effectués par M X pour ce montant n'étaient pas non plus établie, a réintégré cette somme dans le résultat de l'exercice 2005 ;
Considérant que, pour écarter la critique faite par M. X du bien-fondé de ce chef de redressement, le tribunal relève que, si ce dernier soutient que l'EURL Le Puits à Sel a seulement procédé à une substitution de créancier qui n'a pu constituer pour elle un profit imposable, il ne produit aucun justificatif des paiements de 113 000 euros et 16 000 euros qu'il dit avoir effectués en espèces au cours des années 2004 et 2005 grâce à la vente d'objets et de biens mobiliers personnels ; que, dans ces conditions, les premiers juges estiment à juste titre que la somme de 129 000 euros ne peut être regardée comme constituant une dette que la société était en droit de maintenir à son passif au 31 décembre 2005 ; qu'en appel, M. X produit un récapitulatif de ventes en 1995 dans trois salles de vente et sept bordereaux émanant de commissaires priseurs datant de 1995, 1996 et 2007, faisant état de ventes réalisés à son profit, mais ces documents ne permettent nullement de faire un lien entre les montants qui y figurent et ceux des versements en espèces que le requérant soutient avoir effectués auprès des vendeurs du bateau en 2004 et 2005 ; que la circonstance que d'autres relevés de vente que M. X dit avoir conservés à son domicile auraient été détruits lors de la tempête Xynthia de février 2010 ne le dispense pas d'apporter la preuve qui lui incombe d'établir la réalité du passif social déclaré à la clôture de l'exercice 2005 ; que le différend dont il se prévaut entre lui et les vendeurs du bateau ne suffit pas non plus à démontrer une consistance du passif de son entreprise au 31 décembre 2005 autre que celle rectifiée par l'administration ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que la somme de 129 000 euros a été réintégrée dans le bénéfice imposable de l'entreprise au titre de 2005 ;
Considérant, enfin, que la requête de M. X, qui demande en appel la décharge des impositions en litige en contestant la procédure et le bien-fondé de ces impositions, ne tend plus à ce qu'il soit sursis à statuer auxdites impositions ; que les termes de la réponse du tribunal à cet égard sont sans incidence sur le litige d'appel ; que les modalités suivant lesquelles sa réclamation préalable a demandé le sursis de paiement des impositions en cause sont, de même et en tout état de cause, sans incidence sur le présent litige qui est un litige d'assiette ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions litigieuses et au rétablissement de ses déficits reportables ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n' est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. X en remboursement des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 11BX03189