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18/10/2012 | FRANCE | N°12BX01113

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 18 octobre 2012, 12BX01113


Vu la requête, enregistrée sous forme de télécopie le 3 mai 2012 et régularisée par courrier le 15 mai 2012, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1201451 en date du 28 mars 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a, à la demande de M. X, annulé son arrêté en date du 26 mars 2012 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination ;

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Vu les autres pièces ...

Vu la requête, enregistrée sous forme de télécopie le 3 mai 2012 et régularisée par courrier le 15 mai 2012, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1201451 en date du 28 mars 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a, à la demande de M. X, annulé son arrêté en date du 26 mars 2012 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant publiée au Journal officiel par décret n° 90-917 du 8 octobre 1990 ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2012 :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

Considérant que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE relève appel du jugement en date du 28 mars 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 26 mars 2012 obligeant M. X, ressortissant de nationalité algérienne, à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français sans délai :

Considérant que le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté précité du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE au motif que la décision obligeant M. X à quitter le territoire français portait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale dans des conditions contraires aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, les pièces que M. X produit à l'appui de sa demande ne permettent pas d'établir l'existence d'une communauté de vie stable avec sa compagne antérieurement à l'année 2010, date à laquelle il produit des factures d'achat à la même adresse que celle-ci ; que M. X ne démontre pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère et ses frères et soeurs et où il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions d'entrée et de séjour de M. X en France, et eu égard au caractère récent de la communauté de vie avec sa compagne, lequel n'est pas démenti par les attestations peu circonstanciées produites par l'intéressé, l'arrêté attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur ce motif pour annuler l'obligation de quitter le territoire français sans délai et, par voie de conséquence, la mesure de placement en rétention administrative prises à l'encontre de M. X ;

Considérant qu'il appartient toutefois au juge d'appel, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X devant le tribunal administratif de Toulouse ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été signé par Mlle Sophie Pauzat, chef du service de l'immigration et de l'intégration, qui bénéficiait d'une délégation de signature du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE en vertu d'un arrêté en date du 15 février 2012, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 26 mars 2012 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait en constituant le fondement et qui fait notamment état du parcours de M. X en France et des éléments relatifs à sa situation privée et familiale est suffisamment motivé ;

Considérant, en troisième lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale de M. X une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que M. X n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaitrait les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que M. X soutient que l'arrêté attaqué aura pour conséquence de le séparer de sa fille qui a vocation à résider en France auprès de sa mère titulaire d'une carte de résident ; que, toutefois, ainsi qu'il vient d'être dit, M. X n'apporte aucun élément suffisamment probant de nature à établir qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; qu'il n'apporte pas davantage d'élément permettant de dire que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative n'aurait pas suffisamment pris en compte l'intérêt supérieur de celui-ci ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être accueilli ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S''il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 susvisée : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 7) "risque de fuite": le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite (...) " ;

Considérant que, pour refuser à M. X un délai de départ volontaire, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes dès lors qu'il n'avait pas déféré à son précédent arrêté l'obligeant à quitter le territoire français et avait déclaré ne pas vouloir retourner dans son pays d'origine ; qu'en outre, il n'est pas contesté qu'il ne justifiait pas, au moment de la décision attaquée, de documents d'identité et de voyage en cours de validité ; que ces éléments sont de nature, en l'absence de circonstance particulière, à caractériser un risque de fuite ; que, par suite, le préfet, en prenant la décision attaquée, et nonobstant la circonstance que M. X soit présent depuis dix ans en France, n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation ;

Sur la mesure de placement en rétention administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le placement en rétention d'un étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : (...) 3º Soit, faisant l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris en application des articles L. 511-1 à L. 511-3 et édicté moins d'un an auparavant, ou devant être reconduit à la frontière en exécution d'une interdiction du territoire prévue au deuxième alinéa de l' article 131-30 du code pénal ne peut quitter immédiatement le territoire français (...) " ;

Considérant, en premier lieu, qu'aucun des moyens dirigés contre la décision d'éloignement n'est fondé ; que, dès lors, M. X ne peut pas se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision pour contester la mesure de placement en rétention administrative dont il a fait l'objet ;

Considérant, en second lieu, que la décision décidant du maintien de l'intéressé dans un local ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ne porte par elle-même aucune atteinte au droit de M. X à mener une vie familiale normale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par cette décision des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté en date du 26 mars 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 28 mars 2012 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions présentées devant la cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 12BX01113


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX01113
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SADEK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-10-18;12bx01113 ?
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