Vu la requête, enregistrée le 4 février 2011, présentée pour M. Yves X demeurant ..., par Me Allard
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°0700895 du 9 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997 et 1998 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros hors taxe au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2012,
- le rapport de Mme Viard, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;
Considérant que M. X est associé et gérant de la SCI Saint-Denis Pierre ; que le 30 juillet 1996, cette société lui a vendu en l'état futur d'achèvement deux appartements au prix de 1 200 000 francs (182 938 euros) qu'il a revendus en mai 1997 et mars 1998 pour un montant total de 2 200 000 francs (335 387 euros) ; que l'administration a procédé au redressement de la valeur vénale déclarée en ce qui concerne les droits d'enregistrement et de publicité foncière dus par M. X et la taxe sur la valeur ajoutée due par la SCI ; qu'elle a ensuite procédé à une vérification de comptabilité de la SCI Saint-Denis Pierre et à un contrôle sur pièces des déclarations de revenus de M. X ; qu'à l'issue de ce dernier contrôle, elle a réintégré dans le revenu imposable de celui-ci la libéralité qui lui avait été consentie à raison de l'insuffisance du prix de vente des appartements par la SCI dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, au titre de l'année 1997, et l'a imposé, au titre des années 1997 et 1998, sur les plus-values immobilières réalisées lors de la vente des appartements ; que M. X a contesté ces impositions devant le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion ; qu'il fait appel du jugement qui a rejeté sa demande ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société.(...) Il en est de même (...) 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées à l'article 206 1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales dans as rédaction alors en vigueur : " En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration et la société elle-même. " ; qu'aux termes de l'article L.57 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) " ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, s'agissant du redressement dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, la notification de redressements adressée le 22 septembre 2000 à M. X fait référence à la notification de redressements adressée le 21 septembre 2000 à la SCI Saint-Denis Pierre dont une copie était jointe et lui indique que l'intégralité du bénéfice d'un montant de 913 242 euros lui est attribuée ; que, d'autre part, s'agissant des plus-values réalisées lors de la vente des appartements en litige en mai 1997, cette notification mentionne tous les éléments utilisés pour leur calcul ; qu'ainsi, et alors que la procédure contradictoire de redressement d'imposition a été régulièrement suivie entre la SCI Saint-Denis Pierre et l'administration fiscale en application des dispositions précitées de l'article L.53 du livre des procédures fiscale et n'avait pas à l'être entre cette dernière et chacun des associés de la société, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la notification de redressements adressée à M. X, en sa qualité d'associé de cette société, doit être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne la libéralité consentie par la SCI Saint-Denis Pierre :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa version alors en vigueur : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l''actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l''exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient soit la livraison des biens, c'est-à-dire leur délivrance au sens du code civil, pour les ventes ou opérations assimilées, soit l'achèvement des prestations, pour les fournitures de services ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCI Saint-Denis Pierre a comptabilisé en 1997 la vente des deux appartements ; que si M. X soutient que les appartements lui auraient été livrés avant la fin de l'année 1996, les éléments qu'il apporte, qui consistent en un constat d'huissier constatant l'état d'achèvement d'un des appartements dont s'agit, des attestations de conformité des installations électriques ainsi que des baux signés fin décembre 1996 par des propriétaires d'autres appartements situés dans la même résidence prenant effet début janvier 1997, ne sont pas de nature à établir que ces biens lui ont été effectivement livrés en 1996 ;
Considérant, en deuxième lieu, que pour justifier que la vente par la SCI Saint-Denis Pierre de deux appartements à M. X pour un prix de 1 200 000 francs, alors qu'il les a revendus moins de deux ans après au prix de 2 200 000 francs, avait le caractère d'une libéralité constitutive d'un acte anormal de gestion, l'administration fiscale fait valoir les liens étroits existant entre la société et son gérant et le fait que la SCI Saint-Denis Pierre a vendu à la même époque des appartements situés dans le même lotissement 45% plus cher ; que si M. X soutient qu'il était dans l'intérêt de la société, qui exerçait une activité de construction vente, de vendre le plus rapidement possible les appartements en stock afin d'alléger les charges d'intérêts et d'immobilisation du stock, il ne fournit aucun élément tiré notamment de la situation financière de la société à la date de la transaction dont s'agit de nature à démontrer la nécessité d'une telle minoration du prix de vente ; qu'en outre, la différence de prix de vente ne saurait être expliquée par la situation en rez-de-chaussée de ces appartements dès lors qu'il s'agit de duplex avec jardin privatif ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve que l'avantage consenti à M. X était constitutif d'un acte anormal de gestion ;
Considérant, en troisième lieu, que M. X soutient que l'abattement de 15 % opéré par le service pour tenir compte de l'économie des frais de commercialisation réalisés serait insuffisant, la SCI Saint-Denis Pierre pratiquant un taux de 20%, il résulte de l'instruction que le taux de 15% retenu correspond à la commission habituellement perçue par les sociétés ayant la même activité ; qu'ainsi, et alors que M. X ne fournit pas d'élément de nature à établir la réalité du taux allégué, le moyen tiré de l'insuffisance de l'abattement opéré par l'administration fiscale pour calculer le montant de la libéralité consentie à M. X doit être écarté ;
En ce qui concerne les plus-values réalisées :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas contesté par M. X que les plus-values à court terme qu'il a réalisées à la suite de la vente en mai 1997 des deux appartements qu'il avait acquis auprès de la SCI Saint-Denis Pierre en juillet 1996 ont été calculées conformément aux dispositions des articles 150 A et 150 H du code général des impôts alors en vigueur en vertu desquelles les plus-values imposables sont constituées par la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant ; que M. X se prévaut de la documentation administrative de base 8 M- 2121 n°1 et 2 du 1er décembre 1995 en soutenant que, selon cette doctrine, " l'hypothétique dissimulation du prix doit être ajoutée au prix d'acquisition du bien afin de liquider la plus-value immobilière au titre de la vente subséquente " ; que, toutefois, cette doctrine précise que " les insuffisances d'évaluation n'ont pas à être prises en compte dans la mesure où le prix réévalué par l'administration n'a pas été effectivement versé par le cédant " ; qu'en l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction que M. X aurait effectivement versé à la SCI Saint-Denis Pierre le prix réévalué par l'administration ; que, par suite, n'entrant pas dans les prévisions de cette doctrine, il ne peut utilement s'en prévaloir sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, que M. X soutient que l'assujettissement aux plus-values litigieuses serait constitutif d'une double imposition compte tenu de l'imposition de la libéralité consentie par la SCI Saint-Denis Pierre du fait de la minoration du prix de vente des appartements ; que, toutefois, l'imposition de cette dernière somme dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux à laquelle il a été assujetti du fait de l'avantage dont il a bénéficié en tant qu'associé de cette société se fonde sur des dispositions distinctes de la loi fiscale ; que, par suite, le moyen ainsi soulevé doit être écarté ;
Sur les pénalités de mauvaise foi :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X était à la fois le gérant de la SCI Saint-Denis Pierre et le seul associé bénéficiaire de la libéralité consentie par la SCI Saint-Denis Pierre à raison de la vente des deux appartements en litige ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que M. X ne pouvait ignorer le caractère anormalement bas du prix convenu pour la transaction litigieuse, constitutif d'un avantage à son profit, et, par suite, de son intention de se soustraire à l'impôt ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les pénalités de mauvaise foi dont a été assorti le redressement en litige ne seraient pas fondées et violeraient le principe de personnalisation des peines doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'il a présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par M. X est rejetée.
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No 11BX00343