Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 23 février 2011 sous le n° 11BX00523, présentée pour M. Francis demeurant ..., par Me Delthil, avocat ;
M. demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000075 du 23 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 9 novembre 2009 par laquelle le ministre du travail a annulé la décision du 11 juin 2009 de l'inspectrice du travail et autorisé son licenciement pour motif économique ;
2°) d'annuler la décision en date du 9 novembre 2009 par laquelle le ministre du travail a autorisé son licenciement;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 700 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2012 :
- le rapport de M. Jacq, président ;
- les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;
- les observations de Me Wendling, avocat de M. Francis , de Me Eme, avocat de la société métaltemple Aquitaine.
Considérant que, par un jugement en date du 29 août 2008 du tribunal de commerce de Villeneuve-sur-Lot, la société Fumel D, spécialisée en métallurgie, a été placée en redressement judiciaire, puis, par un jugement en date du 2 avril 2009 du tribunal de commerce d'Agen, en liquidation judiciaire ; qu'à l'exclusion de la branche fonderie-fonte BMD, les activités de la société ont été cédées à la société B 4 Italia Métaltemple, à laquelle s'est substituée la société Métaltemple Aquitaine ; que ce même jugement a autorisé l'administrateur judiciaire de la société Fumel D, à procéder au licenciement d'environ cent quarante salariés non compris dans la reprise d'activité parmi lesquels M. , salarié protégé en tant que délégué syndical et membre du comité d'entreprise ; que, par une décision du 11 juin 2009, l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser le licenciement pour motif économique de l'intéressé ; que, sur recours hiérarchique exercé par la société Fumel D, le ministre du travail, par une décision du 9 novembre 2009, a annulé la décision de l'inspectrice du travail et a autorisé le licenciement de M. ; que celui-ci fait appel du jugement en date du 23 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre du travail ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des délégués syndicaux, membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et du comité d'entreprise, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, est subordonné à une autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'entreprise ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ;
Considérant que, par la décision contestée du 9 novembre 2009, le ministre du travail a accordé à l'administrateur judiciaire de la société Fumel D l'autorisation de licencier pour motif économique M. , délégué syndical et membre du comité d'entreprise ; qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre a entendu tirer les conséquences du jugement du tribunal de commerce d'Agen du 9 avril 2009 arrêtant le plan de cession et ordonnant le licenciement de 145 salariés sur les 353 que comptait la société Fumel D au 31 mars 2009 ; que le ministre a estimé que le licenciement ne pouvait être regardé comme en lien avec 1'exercice du mandat que les salariés détenaient, la proportion de salariés protégés n'étant pas surreprésentée parmi les licenciés et la plupart d'entre eux travaillant dans le secteur non repris par l'acquéreur ;
Considérant, en premier lieu, que le requérant soutient que la décision du ministre est insuffisamment motivée, dès lors qu'il n'a pas examiné si son licenciement était en lien avec le mandat détenu ; que, toutefois, le ministre a visé les textes applicables et a retenu l'absence de lien éventuel entre le licenciement et le mandat détenu, en indiquant la réalité et le sérieux des motifs économiques invoqués par l'entreprise et que l'appréciation des critères servant à déterminer l'ordre des licenciements ne permettait pas de suspecter une discrimination ; qu'il a donc bien procédé à 1'examen des éventuelles discriminations auxquelles le salarié protégé aurait pu être exposé pour les écarter mais n'avait pas à lister ces éventualités ; que, dès lors, le moyen doit être rejeté ;
Considérant, en deuxième lieu, que le requérant fait valoir que l'ordre des licenciements ne conduisait pas forcément à le retenir dans la liste des personnels à licencier dès lors que d'autres salariés étaient plus défavorablement placés dans cette liste au regard des critères retenus ; que, toutefois, l'ordre des licenciements s'applique à l'ensemble de l'entreprise par catégories d'emploi ; qu'en l'espèce, contrairement à ce qu'il soutient, le requérant était dans une situation dans laquelle l'ensemble des salariés de sa catégorie d'emploi se trouvait sur des postes supprimés et dans leur cas, l'ordre des licenciements n'avait plus à intervenir ; qu'au demeurant le non-respect des critères servant à la détermination de l'ordre des licenciements ne suffit pas, à lui seul, à révéler l'existence d'un lien entre le licenciement et les mandats détenus, dès lors qu'il n'appartient pas l'autorité administrative de se prononcer sur ces critères ;
Considérant, en troisième lieu, que le requérant soutient qu'il existe un second indice d'une discrimination dans le fait qu'ils ont été placés en chômage partiel ; que, toutefois, l'entreprise indique que de nombreux salariés ont été placés en chômage technique pour des durées similaires à celles retenues pour les salariés protégés et que ces derniers n'ont été placés dans une telle situation que sur leur acceptation expresse contrairement aux autres salariés qui y étaient placés d'office ; que la situation de l'entreprise ne révèle pas une proportion anormale de salariés protégés parmi les salariés licenciés ; que, par ailleurs, tous les salariés protégés travaillant dans la branche non reprise n'ont pas fait l'objet d'une demande de licenciement mais seulement dix d'entre eux sur quatorze ; qu'il n'apparait pas dès lors que la procédure a présenté un caractère discriminatoire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. , au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M . la somme demandée par la société Métaltemple Aquitaine, au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Métaltemple Aquitaine tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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No 11BX00523