Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 28 septembre 2009, présentée pour M. Lionel A, demeurant ..., par Me Larrieu-Bordier ;
M. A demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 0604785 du 23 juillet 2009 en tant que, par cette ordonnance, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en annulation pour irrégularité de l'arrêté du 27 juillet 2006 par lequel le maire de Boulazac a ordonné son hospitalisation d'office à titre provisoire, et de l'arrêté du 28 juillet 2006 par lequel le préfet de la Dordogne a ordonné son hospitalisation d'office ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;
3°) de condamner l'Etat et la commune de Boulazac à lui verser, chacun, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 septembre 2010 :
- le rapport de M. Mauny,
- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;
Sur la régularité de l'ordonnance :
Considérant que si l'autorité judiciaire est seule compétente pour apprécier la nécessité des mesures d'hospitalisation d'office prises en application des articles L. 3213-1 et L. 3213-2 du code de la santé publique, il appartient néanmoins à la juridiction administrative d'apprécier la régularité des décisions administratives ayant cet objet ;
Considérant que la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Bordeaux, tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2006 par lequel le maire de Boulazac a ordonné son hospitalisation d'office à titre provisoire, et de l'arrêté du 28 juillet 2006 par lequel le préfet de la Dordogne a ordonné son hospitalisation d'office, est fondée non seulement sur l'inexacte appréciation qui aurait été faite de son état mental par ces deux autorités administratives, mais encore, contrairement à ce que fait valoir le préfet de la Dordogne, sur l'irrégularité des décisions qu'elles ont prises à son encontre aux regard des exigences légales de motivation ; que c'est dès lors à tort que le président de la 4ème chambre du tribunal administratif a regardé ladite demande comme étant dépourvue de moyen relatif à la régularité des arrêtés attaqués, et qu'il l'a, par ce motif, entièrement rejetée comme étant portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; qu'il suit de là que l'ordonnance attaquée du 23 juillet 2009 doit être annulée en tant qu'elle a rejeté celles des conclusions de la demande de M. A qui tendaient à l'annulation pour irrégularité de ces deux arrêtés comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif ;
Sur la légalité de l'arrêté du maire de Boulazac en date du 27 juillet 2006 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 3213-2 du code de la santé publique : En cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou, à défaut, par la notoriété publique, le maire... arrête..., à l'égard des personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes, toutes les mesures provisoires nécessaires, à charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au représentant de l'Etat dans le département qui statue sans délai et prononce, s'il y a lieu, un arrêté d'hospitalisation d'office dans les formes prévues à l'article L.3213-1. Faute de décision du représentant de l'Etat, ces mesures provisoires sont caduques au terme d'une durée de quarante-huit heures ; qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : ...doivent être motivées les décisions qui... restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police , et que, selon l'article 3 de la même loi, la motivation ainsi exigée doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ;
Considérant que le maire de la commune de Boulazac, dans l'arrêté du 27 juillet 2006 par lequel il a ordonné l'hospitalisation d'office de M. A à titre provisoire, se borne à indiquer qu'il est de notoriété publique que cette personne, par son comportement qui révèle des troubles mentaux, présente un danger pour la sûreté des personnes et pour elle-même ; qu'en s'abstenant de préciser les éléments de fait permettant de présumer la réalité de ce danger, ou de viser et joindre à son arrêté, en se l'appropriant, un avis médical décrivant avec précision l'état mental de l'intéressé au moment des faits motivant la mesure contestée, ou toute autre pièce de nature à attester la menace imminente pour lui-même ou pour autrui que représentait son état, le maire de Boulazac n'a pas satisfait aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; que l'arrêté du 27 juillet 2006 doit dès lors être annulé ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Dordogne en date du 28 juillet 2006 :
Considérant qu'en vertu de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique, les représentants de l'Etat dans les départements prononcent par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'hospitalisation d'office... des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public... Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation nécessaire ;
Considérant que l'arrêté du 28 juillet 2006 par lequel le préfet de la Dordogne a ordonné l'hospitalisation d'office de M. A mentionne, pour toute motivation, que ce dernier présentait de l'agressivité envers son entourage et une abolition du discernement ; qu'en s'abstenant d'énoncer avec précision les circonstances de fait qui ont rendu l'hospitalisation du requérant nécessaire, ou de se référer à un certificat médical circonstancié qui doit être établi avant sa décision, en se l'appropriant et en le joignant à l'arrêté attaqué, le préfet de la Dordogne a méconnu les exigences de motivation imposées par l'article L. 3213-1 du code de la santé publique ; que l'arrêté du 28 juillet 2006 doit dès lors être également annulé ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. A n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à la condamnation de l'Etat et de la commune de Boulazac au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er L'ordonnance du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux en date du 23 juillet 2009 est annulée en tant qu'elle a rejeté, comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, les conclusions de la demande de M. A tendant à l'annulation pour irrégularité de l'arrêté du 27 juillet 2006 par lequel le maire de Boulazac a ordonné son hospitalisation d'office à titre provisoire, et de l'arrêté du 28 juillet 2006 par lequel le préfet de la Dordogne a ordonné son hospitalisation d'office.
Article 2 : L'arrêté du maire de la commune de Boulazac en date du 27 juillet 2006 et l'arrêté du préfet de la Dordogne en date du 28 juillet 2006 sont annulés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 09BX02313