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02/03/2010 | FRANCE | N°09BX01811

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 02 mars 2010, 09BX01811


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 juillet 2009, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, demeurant Place Saint-Etienne à Toulouse Cedex 9 (31038) ;

Le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900868 du 19 mai 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté en date du 30 janvier 2009 refusant le séjour à M. X, portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 juillet 2009, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, demeurant Place Saint-Etienne à Toulouse Cedex 9 (31038) ;

Le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900868 du 19 mai 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté en date du 30 janvier 2009 refusant le séjour à M. X, portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'établissement entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République togolaise, ratifiée par la loi du 30 janvier 2001 ;

Vu la convention franco-togolaise du 13 juin 1996 relative à l'établissement des personnes, dont la ratification a été autorisée par la loi n° 2001-76 du 30 janvier 2001, publiée par le décret n° 2001-1325 du 21 décembre 2001 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2010 :

- le rapport de Mme Demurger, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 janvier 2010, présentée pour M. X ;

Considérant que M. X, ressortissant togolais, est entré en France le 30 novembre 2000, sous le couvert d'un passeport revêtu d'un visa long séjour, afin d'y poursuivre des études ; qu'il a bénéficié, de décembre 2000 à octobre 2004, de plusieurs titres de séjour en qualité d'étudiant ; que, le 21 avril 2005, sa demande de changement de statut pour exercer une activité salariée lui a été refusée par arrêté du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; que, dans l'attente d'un jugement du tribunal administratif de Toulouse sur la demande en annulation formée par M. X contre cet arrêté, l'intéressé a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour ; que, par décision du 20 octobre 2008, ladite demande a été rejetée ; que, le 6 janvier 2009, M. X a alors demandé au PREFET DE LA HAUTE-GARONNE d'examiner son droit au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article L. 313-14 du même code et de l'article 11 de la convention franco-togolaise du 13 juin 1996 ; que, par arrêté du 30 janvier 2009, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a refusé de délivrer un titre de séjour à M. X, l'a invité à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la convention franco-togolaise susvisée : Après trois années de résidence régulière et non interrompue, les ressortissants de chacune des Parties contractantes établis sur le territoire de l'autre Partie, peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans, dans les conditions prévues par la législation de l'Etat d'accueil. Ce titre de séjour est renouvelable de plein droit ; qu'aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour mentionnées aux articles L. 313-6, L.313-8 et L. 313-9, aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 313-10, aux articles L. 313-11, L. 313-11-1, L. 313-14 et L. 314-9, aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 9° de l'article L. 314-11 et aux articles L. 314-12 et L. 315-1 peut obtenir une carte de résident portant la mention résident de longue durée-CE ;

Considérant qu'il résulte de ces stipulations et dispositions combinées que tout ressortissant togolais peut obtenir une carte de résident valable dix ans, à la condition d'avoir résidé en France, de façon régulière et interrompue, pendant trois ans ; que tel n'était manifestement pas le cas de M. X à la date de sa demande d'admission au séjour, le 6 janvier 2009, dès lors qu'il se trouvait en situation irrégulière depuis le 20 octobre 2008 ; que l'intéressé ne peut pas davantage se prévaloir des cartes de séjour détenues en qualité d'étudiant, ces dernières n'étant pas au nombre de celles visées par l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par suite la situation de M. X se trouvant à plusieurs égards hors du champ d'application de ces dispositions, c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a estimé que l'absence de mention, dans les visas de l'arrêté du 30 janvier 2009, de l'article 11 de la convention franco-togolaise révélait que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE n'avait pas procédé à un examen réel de la situation personnelle de M. X ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. X, tant en première instance qu'en appel ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. X n'entrait pas dans le champ d'application de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, la circonstance que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE n'ait pas sollicité l'avis du maire de la commune de résidence de l'intéressé sur les ressources dont celui-ci disposait est sans influence sur la légalité de l'arrêté litigieux ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ;

Considérant d'une part, qu'il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a examiné les motifs à caractère humanitaire et exceptionnel dont se prévalait M. X à l'appui de sa demande de titre de séjour et les a écartés comme ne justifiant pas la délivrance d'un tel titre ; que, par suite, M. X ne peut valablement soutenir que le PREFET se serait fondé sur la seule situation de l'emploi pour lui refuser le titre de séjour sollicité ;

Considérant d'autre part, que si M. X fait valoir qu'il a acquis des qualifications au cours des quatre années de séjour en qualité d'étudiant, que muni d'autorisations provisoires il a travaillé comme salarié à temps plein, qu'il dispose d'un logement et de ressources financières lui permettant de vivre de manière autonome, qu'il maîtrise la langue française et témoigne d'une volonté de respecter les valeurs républicaines, ces circonstances ne justifient pas à elles seules la délivrance d'un titre de séjour pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que, si M. X soutient qu'il réside en France depuis huit ans, qu'il est bien inséré dans la société française, qu'il dispose d'une promesse d'embauche et que son frère et sa soeur résident régulièrement en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que quatre années correspondent à des années d'études, que l'intéressé est célibataire sans enfant et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents ; qu'ainsi, au regard des circonstances de l'espèce, la décision n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, elle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

Considérant que, si un étranger ne peut faire l'objet d'une mesure prescrivant à son égard une obligation de quitter le territoire français en application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, M. X ne peut utilement invoquer, à l'encontre de la mesure d'éloignement en litige, les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'octroi de la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale, dès lors que la délivrance d'un tel titre de séjour n'est pas de plein droit ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. X ne remplissait pas les conditions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que rien ne s'opposait donc à ce qu'il fasse l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'en outre, pour les mêmes raisons que celles précédemment évoquées, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé sa décision en date du 30 janvier 2009 ; que les conclusions de M. X tendant à l'annulation de ladite décision et aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 19 mai 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions en appel sont rejetées.

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N° 09BX01811


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX01811
Date de la décision : 02/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: Mme Florence DEMURGER
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : BOYER DE MONTEGUT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-03-02;09bx01811 ?
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