Vu la décision en date du 31 décembre 2008 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant sur le pourvoi en cassation introduit par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, a :
1°) annulé l'arrêt du 16 novembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, d'une part, a annulé le jugement du 18 septembre 2003 du tribunal administratif de Poitiers rejetant la demande de M. X tendant à la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice résultant de son licenciement pour motif économique et, d'autre part, a condamné l'Etat à verser à M. X la somme de 35 000 euros, tous intérêts compris, en réparation du préjudice matériel et des troubles dans les conditions d'existence ;
2°) renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 10 novembre 2003, présentée pour M. Benoît X demeurant ..., par Me Bineteau, avocat ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 18 septembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête dirigée contre la décision du 27 mai 2002 par laquelle le ministre des affaires sociales a rejeté sa demande préalable et ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 57 248,47 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2002 ;
2°) d'annuler la décision de rejet de sa demande du 27 mai 2002 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2009 :
- le rapport de M. Bentolila, premier conseiller ;
- les observations de Me Lerat, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;
Vu la note en délibéré, enregistrée au greffe de la cour le 14 octobre 2009, présentée pour M. X ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des délégués du personnel qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, est subordonné à une autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ;
Considérant qu'est au nombre des causes sérieuses de licenciement économique la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; que, toutefois, en l'espèce, si les modifications structurelles décidées par la SMACL, à l'origine de la suppression du poste de M. X étaient motivées par le tassement de l'activité de la branche personnes physiques de cette entreprise et la volonté d'améliorer sa productivité, il ne résulte pas de l'instruction que la compétitivité de l'entreprise était menacée ; que, dès lors, le licenciement de M. X n'était justifié ni par des difficultés économiques, ni par des mutations technologiques, ni par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; qu'il suit de là, que la décision du 3 novembre 2000 par laquelle l'inspecteur du travail des Deux-Sèvres a autorisé le licenciement pour motif économique de M. X, conseiller d'assurance et délégué du personnel de la SMACL était illégale ;
Considérant que cette illégalité a constitué une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat dont M. X est fondé à se prévaloir pour obtenir la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice direct et certain résultant pour lui de cette décision illégale ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, qu'à la suite de son licenciement illégalement autorisé, M. X est resté sans emploi jusqu'en septembre 2001, puis a retrouvé un emploi dans une autre société, jusqu'au 13 juin 2003, date à laquelle il a été à nouveau licencié et s'est retrouvé sans emploi du 13 juin 2003 jusqu'en novembre 2005, période à partir de laquelle il a créé sa propre entreprise ; qu'il suit de là que constitue seul un préjudice matériel direct et certain en rapport avec l'autorisation administrative de licenciement illégale du 3 novembre 2000, le préjudice subi par M. X au titre de la période courant du licenciement qui a pris effet le 17 novembre 2000 jusqu'au 1er septembre 2001, date à laquelle M. X a retrouvé un nouvel emploi ;
Considérant qu'au titre du préjudice matériel, M. X est fondé à demander réparation de la différence entre le salaire net qu'il aurait effectivement perçu si l'autorisation administrative illégale de licenciement n'avait pas été délivrée et les allocations de chômage qu'il a perçues à la suite de son licenciement ; qu'il résulte de l'instruction que cette différence s'établit, pour la période de responsabilité comprise entre le 17 novembre 2000 et le 1er septembre 2001, date à laquelle M. X a trouvé un nouvel emploi, à la somme de 4 227,70 euros ; que la circonstance que M. X ait bénéficié au titre de l'allocation spécifique de conversion, de la somme de 28 137,95 euros, est sans incidence sur son droit à réparation du préjudice financier subi du fait de l'illégalité de l'autorisation administrative de licenciement ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 4 227,70 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2002, date de réception de sa réclamation préalable ;
Considérant, qu'au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, M. X ne justifie, ni n'établit la réalité et la nature des préjudices allégués, autres que celles relatives au préjudice inhérent à la nécessité de se reconvertir, qui en tout état de cause doit être regardé comme déjà pris en charge par la somme dont il a bénéficié au titre de la convention de conversion ; que dès lors les conclusions tendant à la réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence doivent être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à M. X d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 18 septembre 2003 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X la somme de 4 227,70 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2002.
Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus de la requête de M. X est rejeté.
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No 09BX00081