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18/12/2008 | FRANCE | N°07BX00829

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 18 décembre 2008, 07BX00829


Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2007 sous le n° 07BX00829, présentée pour M. et Mme Kwango Di Lolo , M. Joseph NKOSI, M. Patrick et Mlle Joëlle , élisant domicile au cabinet de Me Jean Eric Malabre, 6 place de Stalingrad à Limoges (87000), par Me Malabre, avocat ; M. et Mme et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400563 du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision en date du 17 décembre 2003 par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à l

a demande de regroupement familial présentée par M. et Mme Kwango Di Lo...

Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2007 sous le n° 07BX00829, présentée pour M. et Mme Kwango Di Lolo , M. Joseph NKOSI, M. Patrick et Mlle Joëlle , élisant domicile au cabinet de Me Jean Eric Malabre, 6 place de Stalingrad à Limoges (87000), par Me Malabre, avocat ; M. et Mme et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400563 du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision en date du 17 décembre 2003 par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à la demande de regroupement familial présentée par M. et Mme Kwango Di Lolo au profit de M. Joseph NKOSI, ensemble le rejet du recours gracieux en date du 29 mars 2004, dirigé contre cette décision et à la condamnation de l'Etat à leur verser une somme totale de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis et une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail à M. Joseph NKOSI dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser une somme de 12 000 euros à M. et Mme Kwango Di Lolo en réparation de leur préjudice matériel, une somme de 8 000 euros à M. et Mme en réparation de leur préjudice moral, une somme de 7 000 euros à M. Joseph NKOSI en réparation de son préjudice moral, et une somme de 1 000 euros chacun à Melle Joëlle et à M. Patrick en réparation de leur préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2004, ou à titre subsidiaire à compter du 17 mai 2004, et capitalisation des intérêts ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 392 euros au titre des frais exposés en première instance par M. et Mme et autres et de 1 794 euros au titre des frais exposés en appel, ce dernier règlement emportant renonciation à l'indemnité d'aide juridictionnelle ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2008 :

- le rapport de Mme Dupuy, conseiller,

- et les conclusions de M. Lerner, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme Kwango Di Lolo , ressortissants de la République Démocratique du Congo, titulaires de cartes de séjour, ont sollicité le 6 août 2003 le regroupement familial en faveur de Joseph NKOSI ; que, par ses décisions en litige des 17 décembre 2003 et 29 mars 2004, le préfet de la Haute-Vienne a rejeté cette demande et le recours gracieux présenté par les intéressés, au motif de l'absence de preuve du lien de filiation entre le jeune Joseph et M. et Mme ;

Considérant qu'aux termes de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions contestées : « I. Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins un an, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par la présente ordonnance ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans (...) Le regroupement familial est sollicité pour l'ensemble des personnes désignées aux alinéas précédents (...) L'enfant pouvant bénéficier du regroupement familial est celui qui répond à la définition donnée à l'avant-dernier alinéa de l'article 15 » ; que l'avant-dernier alinéa de l'article 15 de la même ordonnance dispose que l'enfant « s'entend de l'enfant légitime ou naturel ayant une filiation légalement établie ainsi que de l'enfant adopté, en vertu d'une décision d'adoption, sous réserve de la vérification par le ministère public de la régularité de celle-ci lorsqu'elle a été prononcée à l'étranger » ;

Considérant que pour établir la réalité du lien de filiation entre le jeune Joseph et M. et Mme , les requérants ont produit un jugement d'adoption rendu par le tribunal de paix de Kinshasa le 19 novembre 2003 ; qu'hormis le cas où le document produit aurait un caractère frauduleux, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute une décision rendue par une juridiction étrangère ; que si par un courrier du 29 septembre 2004, le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Limoges a informé le préfet de la Haute-Vienne de ce que le jugement susmentionné autorisant l'adoption de Joseph avait été rendu en méconnaissance de certaines dispositions du code de la famille congolais, ces constatations sont, en tout état de cause, relatives au bien-fondé du jugement litigieux et non à sa régularité, et ne sont, en outre, pas de nature à établir son absence d'authenticité ; que le livret de famille de M. et Mme établi le 23 mars 2004 par le bureau de l'état civil de l'ambassade de la République démocratique du Congo mentionne Joseph comme enfant adopté ; que le préfet de la Haute-Vienne ne peut sérieusement soutenir que ce document ne serait pas authentique en faisant valoir qu'il diverge, quant au nombre d'enfants, de l'attestation de composition de famille établie le 31 août 2002, cette attestation ne mentionnant manifestement pas que les seuls enfants issus de l'union de M. et Mme ; qu'enfin, les requérants fournissent en appel une attestation du 21 décembre 2006 de l'ambassadeur de la République démocratique du Congo en France garantissant l'authenticité du jugement d'adoption du 19 novembre 2003 ; que, dans ces conditions, et alors même qu'il y a lieu de douter de l'authenticité de certains documents d'état civil versés au dossier, le préfet de la Haute-Vienne n'apporte pas d'élément suffisant pour dénier toute valeur probante au jugement susdit prononçant l'adoption du jeune Joseph ; que le préfet s'est ainsi livré à une appréciation erronée des circonstances de l'espèce en estimant que le lien de filiation unissant le jeune Joseph à M. et Mme n'était pas établi ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, les requérants sont fondés à soutenir que les décisions en litige portant refus de regroupement familial ont été prises en méconnaissance des dispositions de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que les décisions préfectorales étant annulées au seul motif d'une inexacte application des dispositions précitées de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, tenant à la justification d'un lien de filiation entre M. et Mme et le jeune Joseph, et les requérants n'apportant aucun élément de nature à établir que la demande de regroupement familial en cause satisferait aux autres conditions désormais exigées par les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'exécution du présent arrêt implique seulement que l'autorité administrative procède à un nouvel examen de la demande présentée par M. et Mme au titre du regroupement familial ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à demander qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Vienne de délivrer une autorisation de séjour et de travail à M. Joseph NKOSI ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit ci-dessus, les décisions en litige par lesquelles le préfet de la Haute-Vienne a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. et Mme au profit du jeune Joseph et a rejeté le recours gracieux présenté par les intéressés ont été prises en méconnaissance des dispositions alors applicables de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France ; que cette illégalité fautive est de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que, cependant, il n'est pas établi que la demande de regroupement familial en cause satisfaisait à l'ensemble des critères prévus par les dispositions susmentionnées de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, dans ces conditions, l'existence d'un lien de causalité entre cette illégalité fautive et les préjudices matériel et moral dont les requérants demandent la réparation n'est pas démontrée ; que leurs conclusions indemnitaires ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme et autres sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision en date du 17 décembre 2003 par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à la demande de regroupement familial présentée par M. et Mme Kwango Di Lolo au profit de M. Joseph NKOSI, ensemble du rejet de leur recours gracieux en date du 29 mars 2004 dirigé contre cette décision ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant, d'une part, qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme Kwango Di Lolo en première instance et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, que M. Kwango Di Lolo a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de la procédure d'appel ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Malabre, avocat de M. Kwango Di Lolo , renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat, qui est dans la présente instance d'appel la partie perdante, la somme de 1 300 euros au profit de Me Malabre au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Limoges du 26 octobre 2006, en tant qu'il a rejeté les demandes de M. et Mme Kwango Di Lolo tendant à l'annulation de la décision en date du 17 décembre 2003 par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à la demande de regroupement familial présentée par M. et Mme Kwango Di Lolo au profit de M. Joseph NKOSI et de celle portant rejet du recours gracieux présenté par ces derniers le 29 mars 2004, ensemble lesdites décisions, sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à M. et Mme M. Kwango Di Lolo au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens en première instance, et une somme de 1 300 euros à Me Malabre, avocat de M. Kwango Di Lolo , en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, au titre des frais exposés en appel, sous réserve que Me Malabre renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme Kwango Di Lolo et autres est rejeté.

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N° 07BX00829


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX00829
Date de la décision : 18/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BRUNET
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre DUPUY
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : MALABRE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-12-18;07bx00829 ?
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