Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 16 mars 2006, sous le n° 06BX00545, présentée pour la société FMFG, société à responsabilité limitée, représentée par ses cogérants en exercice, dont le siège social est 5, rue des Quatre Roues, à Poitiers (86000), par Maître Ouvrard ;
La société FMFG demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0403169, en date du 19 janvier 2006, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés, de contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés, de l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts, ainsi que de taxe sur la valeur ajoutée, ensemble des pénalités de mauvaise foi, qui lui ont été assignés au titre respectivement des exercices clos en 2000, 2001 et 2002, et de la période correspondante ;
2°) de la décharger des impositions, des pénalités et de l'amende en litige et de condamner l'Etat à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2008 :
- le rapport de Mme Leymonerie, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Vié, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société FMFG fait appel du jugement en date du 19 janvier 2006, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés, de l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts, ainsi que de taxe sur la valeur ajoutée, ensemble des pénalités de mauvaise foi, qui lui ont été assignés au titre respectivement des exercices clos en 2000, 2001 et 2002, et de la période correspondante ;
Sur l'étendue du litige
Considérant que, par décisions en date des 28 août et 6 septembre 2006, le ministre a prononcé la décharge de l'amende infligée à la société FMFG au titre de l'article 1763 A du code général des impôts, ainsi que des intérêts de retard afférents aux impositions et pénalités en litige ; que, dans cette mesure, le litige est devenu sans objet pour toutes les années en litige ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition
Considérant qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : « Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables » ; qu'aux termes de l'article R. 13-1 du même livre : « Les vérifications de comptabilité mentionnées à l'article L. 13 comportent notamment : a. La comparaison des déclarations souscrites par les contribuables avec les écritures comptables et avec les registres et documents de toute nature, notamment ceux dont la tenue est prévue par le code général des impôts et par le code de commerce. b. L'examen de la régularité, de la sincérité, et du caractère probant de la comptabilité, à l'aide particulièrement des renseignements recueillis à l'occasion de l'exercice du droit de communication, et de contrôles matériels » ; qu'enfin l'article L. 10 du même livre dispose : « L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. Elle contrôle également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursement. A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés » ;
Considérant, d'une part, que les dispositions des articles L. 13 et R. 13-1 du livre des procédures fiscales n'imposent pas au vérificateur d'informer le contribuable, dès ses premières interventions, et au vu des pièces comptables produites de ce qu'il envisage de rejeter la comptabilité ; que, d'autre part, contrairement à ce que soutient la société, le vérificateur pouvait, au cours de la vérification de comptabilité lui demander de lui fournir des éléments complémentaires relatifs aux modalités d'exploitation, susceptibles d'éclairer cet examen ; que, contrairement à ce que soutient la société, les courriers qui lui ont été adressés indiquaient bien que cette dernière n'était pas tenue d'y donner suite et ne revêtaient aucun caractère contraignant ; qu'au demeurant la société ne soutient pas que le vérificateur aurait reconstitué le chiffre d'affaires à partir de ces renseignements, quant à la quantité d'alcool contenue dans les cocktails autres que ceux qu'elle lui aurait fournie ; que les circonstances susrelatées et critiquées par la société illustrent au contraire l'existence d'un débat contradictoire ayant mis la société à même de s'expliquer sur les anomalies relevées par le vérificateur ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition ne peut qu'être écarté, de même, et en tout état de cause, que celui tiré d'une prétendue méconnaissance des stipulations des articles 5 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, laquelle ne peut être utilement invoquée s'agissant de la procédure administrative d'établissement de l'impôt ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : « Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge » et que selon l'article L. 193 du même livre : « Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition » ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas retenu le montant des impositions établies par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, excepté pour l'impôt sur les sociétés relatif à l'exercice clos le 30 septembre 2002 établi d'office faute de déclaration, la charge de la preuve incombe à l'administration ;
Considérant, en premier lieu, que pour écarter la comptabilité de la société FMFG, le vérificateur s'est fondé sur l'absence de présentation du grand livre ainsi que des journaux d'inventaire ou auxiliaires et du registre des immobilisations comme du tableau des amortissements pour l'exercice clos en 2002, ainsi que, pour les exercices et périodes antérieurs, sur l'absence de bandes de contrôle journalières et de plus de deux cents tickets Z, sur la globalisation de certaines recettes, enfin sur le caractère non conforme à la réglementation d'une des deux caisses enregistreuses, laquelle affichait des dates aléatoires, et utilisait des codes désignant des produits différents sous le même intitulé ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur, pour la détermination des coefficients multiplicateurs de vente et la reconstitution des recettes de la société, laquelle exploitait un bar avec prestations musicales exotiques à destination d'une clientèle jeune et étudiante, a pris en compte les factures d'achats et les stocks dont il disposait, et déterminé les recettes en appliquant aux quantités ainsi établies les prix de vente unitaires ; qu'il a admis un taux d'offerts de 10 % pour la généralité des alcools, et de 13 % pour les boissons à base de rhum, et tenu compte des indications fournies par les gérants eux-mêmes tant en ce qui concerne la composition des différents cocktails et boissons servies qu'en ce qui concerne le taux de perte sur la bière, en ne retenant que 25 centilitres par litre de cette boisson servie à la pression ; qu'une telle méthode, qui rend compte des conditions d'exploitation propres à l'entreprise et s'appuie sur les données détenues par le contribuable, ne saurait être regardée comme viciée dans son principe, ni comme excessivement sommaire ; que si la société FMFG soutient qu'il n'a pas été tenu suffisamment compte des tickets intermédiaires qu'elle aurait été en mesure de produire en lieu et place des tickets Z manquants, elle n'établit pas que les montants retenus par le vérificateur seraient pour autant exagérés, alors que les codes portés sur ces tickets ne permettent pas l'identification précise des boissons effectivement servies ; que si, par ailleurs, elle fait valoir qu'il n'a pas été tenu compte de sa politique commerciale très active en direction de la jeunesse, laquelle supposait selon elle des offerts en nombre important, elle n'assortit cette allégation d'aucun élément de preuve quant à la réalité d'un taux supérieur à celui déjà pris en compte par le vérificateur ; qu'enfin, la circonstance que les taux de marge généralement retenus dans la profession et par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires seraient inférieurs à ceux retenus par le vérificateur, est sans incidence, dès lors que ce dernier ainsi qu'il a été dit s'est fondé sur les conditions d'exploitation propres à l'entreprise pendant la période vérifiée ; que, dès lors, d'une part, l'administration doit être regardée comme justifiant du bien-fondé des bases d'imposition en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour l'ensemble de la période en litige et d'impôt sur les sociétés afférent aux exercices clos en 2000 et 2001, d'autre part, la société n'apporte pas la preuve de l'exagération des bases d'imposition, concernant l'impôt sur les sociétés afférent à l'exercice clos en 2002 ;
Sur les pénalités de mauvaise foi
Considérant que l'importance des minorations de recettes constatées, rapprochées des irrégularités graves entachant la tenue et la présentation des documents comptables, l'absence récurrente de toute bande journalière, l'utilisation d'une caisse enregistreuse dont les gérants ne pouvaient ignorer le caractère non conforme à la réglementation ainsi que l'utilisation volontaire de codes s'opposant à l'identification des boissons effectivement servies sont de nature à justifier l'infliction à la société de pénalités exclusives de bonne foi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que la société FMFG n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande de décharge des impositions demeurant en litige ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante, soit condamné à payer à la société FMFG la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : A hauteur des dégrèvements accordés devant la cour, relatifs à l'amende infligée en application de l'article 1763 A du code général des impôts et aux intérêts de retard afférents aux impositions et pénalités au titre des exercices en litige, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la société FMFG.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société FMFG est rejeté.
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N° 06BX00545